FBI
confient pour mission d’implanter un réseau d’espionnage aux États-Unis. Le choix est logique : grâce à ses contacts dans les milieux de l’aéronautique, Costes est susceptible d’avoir accès à des informations confidentielles sur l’effort de guerre américain.
L’aviateur se rend d’abord en Espagne avec sa femme. Avant d’embarquer pour les États-Unis, il rencontre des fonctionnaires de l’ambassade américaine à Madrid. Dans ses mémoires, Bob Maheu raconte : « Costes a expliqué à ses contacts que les Allemands l’envoyaient aux États-Unis pour espionner. Il a offert ses services comme agent double. Ils lui ont dit que, quand il arriverait aux États-Unis, il devrait rencontrer un agent du FBI. » Mais les Américains se méfient : « Ils ne lui ont pas dit qu’on le soupçonnait d’être un fils de pute et que, en plus de travailler avec lui, je devrais surveiller chacun de ses faits et gestes. »
Avant l’arrivée de Dieudonné Costes en Floride, Bob Maheu suit des cours accélérés d’espionnage. Il se familiarise avec l’encre sympathique, le système dit des « boîtes aux lettres » destinées à recevoir les messages des agents, les codes secrets. Il se forge une nouvelle identité : Robert A. Marchand, riche homme d’affaires canadien installé à New York, où il vit du marché noir.
« Connolly et moi avons rencontré Costes à Miami quand il a débarqué du bateau avec sa femme russe, poursuit Bob Maheu. Nous l’avons interrogé pendant deux ou trois jours, en quête d’une faille dans son histoire, résolus à découvrir s’il n’était pas un agent triple. Mais nous n’avons rien trouvé. » C’est ainsi que commence l’opération baptisée « Cocase » par le Bureau.
Dieudonné Costes n’est pas un aventurier ; c’est un homme d’affaires. Il est payé par les Allemands et demande une forte somme au FBI en échange de ses services. Connolly et Maheu acceptent. Costes et sa femme sont envoyés à New York, où ils s’installent à l’hôtel Park Lane. Le FBI craint toujours que Costes ne soit un agent triple, dont la vraie fidélité irait en dernière analyse à ses maîtres d’origine, l’Abwehr. Une dizaine d’agents du bureau de New York sont affectés en renfort à l’opération « Cocase ». Parmi eux, Jack Danahy.
Un des rapports « Cocase » indique que l’aviateur n’hésite pas à mentir pour paraître plus important et plus intelligent qu’il n’est. Régulièrement, les agents du FBI le prennent en flagrant délit : « Il nous avait dit qu’il ne parlait pas un mot d’anglais, rigole Jack Danahy ; en fait, il le parlait parfaitement. On l’a surpris plusieurs fois à parler au téléphone à sa petite amie, une starlette qui habitait Hollywood. »
Les débuts de « Cocase » sont lents et laborieux, en raison du système de communications plutôt rudimentaire. Dieudonné Costes, qui n’a pas encore d’opérateur radio, en est réduit à envoyer des messages rédigés à l’encre sympathique à des « boîtes aux lettres » au Portugal ou en Espagne, fournies par l’Abwehr avant son départ de France. Le texte de ces messages a été soigneusement rédigé par des officiers de l’état-major allié affectés à l’opération « Cocase » ; il contient ce qu’il faut d’informations stratégiques (mouvements de troupes, production d’armements) pour être crédible aux yeux des Allemands.
L’Abwehr a prévu d’envoyer un opérateur radio, Jean-Paul Marie Cavaillez, que Costes a rencontré lors de ses classes à l’école de Hambourg. Mais Cavaillez tarde à débarquer aux États-Unis. Les responsables de « Cocase » lui forcent la main de la plus élégante des manières : fin juin 1943, Costes envoie une lettre annonçant le proche bombardement de Hambourg ; le cachet de la poste atteste que la missive est bien partie avant le bombardement. Quand l’Abwehr reçoit l’information, il est trop tard : une tempête de feu s’est déjà abattue sur la ville, y faisant plus de 50 000 morts. Croyant qu’ils auraient pu obtenir l’information à temps, les responsables de l’Abwehr accélèrent le départ de Cavaillez pour les États-Unis.
Les agents du FBI surveillent Cavaillez dès son arrivée à New York et s’aperçoivent vite que l’opérateur radio préfère courir les filles plutôt que de contacter Costes. Une nouvelle fois, le Bureau doit précipiter les
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