FBI
d’affaires de Detroit qui s’est laissé aller à des insinuations lors d’une conversation avec un de ses collègues est convoqué par le SAC de la ville, qui lui dit : « Si vous traitez à nouveau Hoover d’homosexuel, je m’occuperai personnellement de vous, et sans tarder. »
Rejeton d’une vieille famille de Virginie (son père était le propriétaire du Richmond News Leader), Joseph Bryan III a eu droit lui aussi à une visite d’intimidation de Louis Nichols et de Cartha DeLoach. Bryan travaillait pour la division « Guerre psychologique » de la CIA, qui a eu accès à la collection des photos et des films pornographiques saisis par le FBI. Depuis lors, il se répand dans les dîners en ville sur les mœurs très particulières du directeur du FBI. La visite de Nichols et de DeLoach le calme, et pour longtemps. Quarante ans plus tard, il s’en souvient encore, non sans inquiétude.
Au début des années 1960, Bobby Kennedy demande à l’un de ses hommes de confiance d’enquêter sur l’homosexualité présumée du directeur du FBI. Mais son enquêteur fait chou blanc. Son dossier n’est guère constitué que de racontars. On dit ainsi que J. Edgar Hoover participait, travesti en femme, à des orgies homosexuelles à New York. Ce on-dit parvient aux oreilles des agents new-yorkais, proches de Bobby Kennedy, qui enquêtent clandestinement sur leur patron et le suivent lors de ses séjours. Le même bruit arrive aux oreilles de Cartha DeLoach, qui entame son enquête. Il lui faudra plus de dix ans pour découvrir qu’à l’origine du ragot se trouve Susan Rosenstiel, quatrième épouse de Lewis Solon Rosenstiel, milliardaire américain propriétaire du groupe Schenley Industries. Ce personnage sulfureux a fait fortune en vendant de l’alcool pendant la prohibition, sans doute avec le concours du crime organisé. Le divorce des époux Rosenstiel a donné lieu à un feuilleton à rebondissements qui s’est terminé devant les tribunaux. Elle a accusé son ex-mari d’être lié à la Mafia, mais, sur ordre des juges, son témoignage n’a jamais été rendu public. Elle a même fait de la prison pour diffamation. Lewis Solon Rosenstiel est un proche de J. Edgar Hoover. En 1957, il embauche Louis Nichols, numéro trois du Bureau et génie des relations publiques de Hoover. Depuis lors, il multiplie les contributions financières à la « fondation J. Edgar Hoover », chargée de lutter contre le communisme et d’inculquer les valeurs américaines à la jeunesse du pays. Les deux hommes échangent faveurs et services. Or, Susan Rosenstiel est convaincue que Hoover a communiqué à son ex-mari les informations confidentielles dont celui-ci s’est servi lors de leur divorce. Pour se venger, elle dit avoir vu Hoover en travesti, entouré de blondinets tout juste âgés de dix-huit ans. Elle décrit le directeur du FBI lisant des passages de la Bible au milieu de jeunes mignons vêtus de seuls gants en caoutchouc ! Susan Rosenstiel ajoute que Roy Cohn, l’ancien bras droit du sénateur Joseph McCarthy, participait lui aussi à l’orgie.
En février 1993, bien après la mort de J. Edgar Hoover, le journaliste britannique Anthony Summers reprendra à son compte les ragots de Susan Rosenstiel dans un ouvrage qui connaît alors un succès fulgurant. Ses descriptions de J. Edgar en drag queen (en robe rouge avec un boa, ou en robe noire à volants avec bas résille, talons hauts, perruque blonde à grosses boucles) dérangent et fascinent une Amérique puritaine. La presse adore « Gay Edgar Hoover ». Les caricaturistes affûtent leurs crayons. Le président Clinton s’en donne à cœur joie. Au moment de choisir un nouveau directeur du FBI, après avoir viré William Sessions, il lance : « Je vais avoir du mal à trouver quelqu’un pour chausser les escarpins de Gay Edgar ! » Tout Washington glousse et a compris que les talons des escarpins en question étaient des talons aiguilles. Le chef de la minorité républicaine au Sénat, Bob Dole, complimente une journaliste de l’agence de presse UPI sur sa jupe qui semble « sortie tout droit de la dernière collection de J. Edgar Hoover », etc.
Roy Cohn met les choses au point avant de mourir du sida : « Hoover n’aurait certainement jamais rien fait, et certainement pas en public. Ni en privé, d’ailleurs. Où qu’il aille, Hoover avait toujours peur que les personnes qu’il rencontrait ne puissent compromettre
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