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Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Clerc
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David Salvador, avait accepté, en novembre 1959, la création d’une « commission d’épuration » des collabos de Batista : les
mujalistas
– du nom de l’ex-leader de la confédération. Or, c’est un fait, la classe ouvrière n’avait pas appuyé les rebelles en 1957-1958. Dès lors pouvait être décrété
mujalista
quiconque ne prenait pas le virage radical voulu par le noyau central castriste. En pratique, les cibles de cette épuration seront des dirigeants du M-26 très enracinés à la tête de leur branche, volontiers corporatistes et donc peu disponibles pour l’embardée révolutionnaire. Mais, au jeu de l’épuration, l’épurateur finit en général par être épuré : de fait, David Salvador, ancien ouvrier du sucre, se trouve mis hors jeu à la fin du printemps 1960. Jorge Sotus, de Santiago, qui le remplace, était naguère tout aussi anticommuniste que lui, mais lui est disposé à servir de courroie de transmission au nouveau ministre du Travail, Martínez Sánchez. Les syndicalistes répondant au PSP appuient ce processus qui vise, en somme, ceux qui avaient tenté de leur barrer le chemin au congrès. Passé dans la clandestinité en juin, Salvador sera arrêté en novembre. Jugé en août 1962, il sera condamné à trente ans de prison. L’un des premiers actes du syndicat « normalisé » est de réclamer l’abolition de la grève. Il lui sera répondu positivement. Dès lors, la CTC sera totalement aux ordres.
    Autre cible de cet an II de la Révolution : la presse. Elle avait composé avec Batista. Lorsque le temps vient, au printemps 1960, de mettre un terme au pluralisme, ces compromissions sont rappelées. L’instrument utilisé pour ce combat est la
coletilla
: le codicille. C’est dans le milieu des typographes, puis dans l’esprit de journalistes, qu’est née l’idée de faire suivre tout article jugé désagréable à la Révolution d’un « six-crochet » – un paragraphe en caractères différents – rectifiant le tir. Jorge Zayal, directeur d’
Avance
, refuse ce système ; le 21 janvier, il se réfugie dans une ambassade. Son journal est confisqué. Il paraîtra sous la responsabilité d’une coopérative de travailleurs, puis il sera sabordé vers la fin de l’année, faute depouvoir équilibrer ses comptes après la chute des ressources publicitaires consécutives à la nationalisation de l’économie en octobre. Les dernières feuilles indépendantes sombreront dans la même mésaventure. Auparavant, les deux journaux de l’établissement conservateur, le
Diaro de la Marina
et
Prensa libre
, auront été l’un fermé et l’autre saisi, en mai 1960.
    Deux incidents attirent l’attention des journaux européens, du fait que leurs protagonistes ne sont pas soupçonnables d’être des batistiens mal repentis. Le 1 er avril 1960, Conte Agüero demande asile à l’Argentine. Une semaine plus tôt, ce vieil ami de Castro s’est vu interdire par des travailleurs l’accès du studio où il a une émission. Ex-secrétaire des Jeunesses puis du Parti orthodoxe, il avait été l’un des destinataires des lettres que Fidel écrivait de prison après la Moncada. Il les avait publiées après la victoire. Il avait aussi aidé à la réécriture de
L’Histoire m’absoudra
. Mais cet esprit libre a mené plus d’une philippique contre le « noyautage communiste » ; et ces traits sont devenus intolérables dans la nouvelle Cuba. Le
Lider
lui-même insulte son ex-ami à la télévision. Lorsque Raúl, dans un meeting, lui promet « le poteau », il « choisit » de partir. Aux États-Unis, il publiera
Les Deux Visages
de Fidel Castro
, un ouvrage assez démolisseur. La veille de son exil, la principale chaîne de télévision privée, CMQ, est « normalisée ». Sa concurrente, Channel-1, l’avait été peu avant. Quant aux radios, elles ont été regroupées, après la victoire, en un « Front indépendant des émetteurs libres » (FIEL), répondant directement aux ordres du gouvernement.
    L’autre défection significative, dans le domaine de la presse, est celle, le 19 juillet, du directeur de
Bohemia
, Miguel Ángel Quevedo. L’hebdo avait été un fervent soutien du castrisme débutant. Sa rubrique «
En Cuba
» était demeurée, sous la dictature, une lucarne sur l’état des choses. Le bureau de Quevedo était l’étape obligée des journalistes étrangers. Il choisit, lui, l’ambassade du Venezuela pour asile. Il reproche au castrisme de faire de

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