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Fiorinda la belle

Titel: Fiorinda la belle Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco , Aline Demars
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certes, mais beaucoup plus pratique et plus sage que de se passer stupidement son épée au travers du corps. Et cette résolution, c’était de se passer du consentement paternel. Et ce fut avec un calme qui n’avait plus rien de forcé qu’il répondit tranquillement :
    « J’entends, monsieur. »
    Le vidame reprit, sans élever la voix :
    « J’ai eu la faiblesse de discuter avec vous. J’ai eu tort. C’est une erreur que je ne commettrai plus. Voici quelle est ma volonté formelle que je vous signifie : Je vous accorde la journée de demain pour réfléchir. Demain soir, à pareille heure, vous viendrez m’engager votre parole que vous acceptez l’union que je vous propose. À ce prix-là, seulement, j’oublierai que vous avez été assez dénaturé pour vous révolter contre l’autorité paternelle. Allez, monsieur.
    – Un instant encore, s’il vous plaît, monsieur, fit Ferrière d’une voix douce et attristée. Et si demain je viens vous dire que je persiste dans ma rébellion, qu’arrivera-t-il ?
    – Je considérerai que je n’ai plus de fils.
    – C’est le plus grand malheur qui pourrait s’abattre sur moi. Mais, monsieur, il est bien inutile d’attendre jusqu’à demain. Rien ne me fera changer de résolution. Je préfère vous le déclarer tout de suite : je n’aurai pas d’autre épouse que celle que mon cœur a élue.
    – Vous oubliez que je ne changerai pas non plus de résolution : vous n’aurez jamais mon consentement. Alors ?
    – Alors, monsieur, je viens de penser que je n’ai que vingt-deux ans. J’ai de longues années devant moi. Je réfléchis qu’il serait abominable vraiment de me condamner à passer ces années dans le désespoir et la douleur, tout cela pour un préjugé de caste respectable si on veut, mais qui ne vaut pas qu’on lui sacrifie deux existences. Je trouverai, n’en doutez pas, un prêtre qui consentira à nous unir sans exiger le consentement paternel. »
    Cette fois, ce fut le vidame qui chancela, et qui, d’une voix troublée, s’écria :
    « Quoi ! vous oserez passer outre ma volonté ?
    – J’aurai ce regret, monsieur.
    – Ah ! fit le vidame qui déjà se remettait, j’aurais dû penser que vous n’auriez jamais le courage de vous meurtrir vous-même. Par Dieu, les jeunes gens d’aujourd’hui tiennent étrangement à leurs précieuses personnes. C’est si simple, en effet, de se passer du consentement paternel. Eh bien, monsieur, voilà un arrangement auquel je n’aurais pas songé, je l’avoue. Et comme tout s’arrange : vous ne vous tuez pas, je ne vous tue pas. Nous sauvons tous les deux notre âme dont le salut se trouvait compromis par ce meurtre. Mais c’est parfait. Allez, courez vous faire unir clandestinement par un prêtre complaisant, allez donc, vous dis-je, et que ma malédiction vous accompagne. »
    Il s’était animé peu à peu, sa voix s’était enflée et c’était dans un grondement sauvage qu’il avait lancé sa malédiction.
    « Mon père !… supplia Ferrière ému jusqu’au fond des entrailles.
    – Je ne suis plus votre père ! interrompit le vidame d’une voix tonnante. Je n’ai plus de fils !… Hors d’ici !… Hors d’ici, vous dis-je, ou j’appelle mes laquais et je vous fais jeter dehors comme un ribaud, comme un truand que vous êtes. Dehors ! »
    Ferrière comprit qu’il n’y avait rien à dire. Il était bouleversé. Mais pas un instant sa résolution ne fut ébranlée. Il s’inclina silencieusement devant son père et se dirigea lentement vers la porte du petit perron.
    Avant de franchir le seuil, il se retourna et jeta sur son père un regard suppliant.
    Le vidame était demeuré debout au milieu de la vaste salle. Il se tenait droit, raide, comme pétrifié. Il leva le bras, l’allongea dans un geste impérieux et gronda une dernière fois :
    « Hors d’ici !… »
    Longtemps après que la porte se fut fermée sur son fils, le vidame demeura figé dans son attitude. Enfin il se laissa tomber, accablé, dans son fauteuil. Deux larmes brûlantes jaillirent de ses paupières rougies, glissèrent lentement sur ses joues pâles, allèrent se perdre dans son opulente barbe blanche. Et il murmura dans un sanglot :
    « Je n’ai plus de fils. »
    Il resta ainsi un long moment. Puis il se redressa péniblement et, courbé, voûté, il se tint debout au milieu de la pièce, promenant un œil rêveur sur les tableaux qui la garnissaient et qui

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