Fiorinda la belle
paraissait merveilleux cet instinct qui faisait deviner à la douce Marie Stuart qu’un danger la menaçait. Ses yeux allèrent chercher Fiorinda. Elle suivait cette petite scène comme haletante. Il vit qu’elle avait tout entendu.
Une seconde, il la fixa droit dans les yeux.
Il écarta très doucement sa femme, il la prit par la main, l’amena devant Fiorinda et mit cette main dans celle de la jeune fille.
Puis, fixant de nouveau la jolie diseuse de bonne aventure, il prononça avec la même douceur :
« Ne craignez rien, m’amour. Je sais, moi, que Fiorinda n’a jamais apporté le malheur à personne… Elle ne voudra certes pas commencer par vous. »
Il sembla à Fiorinda bouleversée que ces paroles avaient un sens caché qui était à son adresse. Elle leva sur François ses grands yeux lumineux embués de larmes et, trop émue pour parler, elle eut une légère inclinaison de tête qui semblait approuver.
Cet instant d’émotion violente fut très bref. Presque aussitôt, elle redressa la tête. Son visage avait repris son expression espiègle et rieuse accoutumée.
Et Marie Stuart, et peut-être aussi François, se sentirent complètement rassurés.
Fiorinda porta ses yeux sur Catherine, tout naturellement, sans crainte, sans bravade.
Catherine put croire qu’elle demandait une suprême confirmation de ses ordres. Elle eut un signe de tête impérieux et sec. Et le regard effroyablement menaçant qu’elle dardait sur elle disait assez clairement quel sort serait le sien si elle la trahissait.
Fiorinda sourit doucement.
Et elle se décida enfin à dire la bonne aventure.
XX – LA RÉCOMPENSE
Très simplement, sans pose, sans rechercher l’effet, en souriant de son joli rire réconfortant, Fiorinda dit juste tout le contraire de ce que Catherine lui avait ordonné de dire.
Ses prétendues révélations causèrent un tel ravissement à Marie Stuart qu’oubliant la présence de sa belle-mère elle jeta les bras autour du cou de François, aussi radieux qu’elle, et l’embrassa de tout son cœur en disant :
« Ah ! mon doux cœur, que je suis heureuse !… »
Fiorinda, pendant ce temps, observait Catherine.
Elle s’était assise un peu à l’écart. Elle ne sourcillait pas. Elle souriait doucement, elle hochait la tête d’un air rêveur, elle semblait se réjouir de la joie puérile de ses enfants.
Fiorinda songea :
« Prodigieuse comédienne !… Si je ne savais ce que je sais, je me laisserais prendre à ces airs d’amour maternel !… Mais je ne vous laisserai pas faire, madame Catherine, et puisque je dois payer de ma vie ce que vous ne manquerez pas d’appeler une trahison, j’irai jusqu’au bout, je mettrai le roi en garde contre vos ténébreuses menées… Condamnée pour condamnée, vous ne pourrez jamais me meurtrir qu’une fois après tout.
Pendant un quart d’heure environ, elle répondit avec une inlassable complaisance à toutes les questions que le roi et la reine lui posèrent. Car, maintenant que toute appréhension était bannie de leur esprit, ils se montraient insatiables.
Comme si elle venait de faire une découverte importante, Fiorinda s’écria tout à coup :
« Ah ! un point noir !… Un danger qui vous menace !… »
Et, comme elle voyait une ombre assombrir le front du roi, elle se hâta d’ajouter :
« Je le signale parce que je vois que le triomphe est assuré. »
Les voyant rassurés tous les deux, elle révéla, avec une gravité soudaine destinée à les impressionner et qui, en effet, les impressionna vivement :
« Votre amour est la chose à laquelle vous tenez le plus au monde… Je vois, fureur, haine, jalousie, suscitées par votre amour, dans votre entourage immédiat. Gardez-vous bien, gardez-vous dans votre amour, car c’est par lui qu’on veut vous frapper. Je vois, en effet, de sourdes et méchantes machinations autour de vous. Vous en triompherez, je le répète, mais veillez, gardez-vous, méfiez-vous de tous et de toutes… J’ai dit. »
En donnant cet avertissement, elle tenait les yeux fixés avec insistance sur les yeux de François. Il comprit que c’était surtout à lui qu’elle s’adressait et qu’elle faisait allusion à ce qu’elle aurait dû faire ou dire elle-même. D’un léger signe de tête, il marqua qu’il avait compris et remercia d’un sourire.
Catherine comprit qu’elle la narguait. Elle continuait de sourire d’un air énigmatique.
La consultation était
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