Fiorinda la belle
chercher, pensant qu’il était probablement en course. Ils étaient maîtres de la place, cela leur suffisait. Maintenant il s’agissait de délivrer la prisonnière et d’explorer les caves à la recherche de Beaurevers.
Ferrière, naturellement, s’occupa de Fiorinda. La vieille mère Culot avait fourni des indications si précises qu’il ne fut pas long à trouver.
Ses compagnons furent moins heureux. Ils vinrent se casser le nez devant la porte de la cave qui était fermée à clef. Le pis est que cette misérable porte, bardée de fer, paraissait solide en diable. Ils s’y connaissaient, ils virent qu’il ne serait pas facile de l’abattre, et que cela demanderait pas mal de temps.
Et Rospignac pouvait leur tomber dessus, s’ils traînaient trop.
Ils se mirent à l’œuvre sans perdre un instant.
Mais il leur avait fallu sortir, aller jusqu’aux communs, qui se trouvaient au fond de la propriété, contre le mur de clôture, pour y trouver un tronc d’arbre qui ferait l’office de bélier. Cela leur avait demandé quelques minutes. Et quelques minutes perdues, en de certaines circonstances, cela peut avoir des conséquences terribles.
Ferrière et Fiorinda ne s’étaient pas livrés à de grandes effusions.
Ils comprenaient l’un et l’autre que ce n’était pas encore le moment. Ils quittèrent donc la chambre et s’en furent trouver les quatre braves. Ferrière apprit ainsi le contretemps qui se produisait.
Lui aussi, il songeait que Rospignac pouvait survenir d’un instant à l’autre, et, s’il était en force, la lutte recommencerait. Peut-être ne s’en tireraient-ils pas tous à si bon compte. Nous n’avons pas besoin de dire qu’il ne songeait nullement à abandonner Beaurevers. Mais il s’inquiétait de Fiorinda et eût voulu la voir loin de là. Il lui offrit donc de la conduire à l’auberge du Pré toute proche en attendant qu’ils en eussent fini. Il reviendrait ensuite près de ses compagnons. Son absence ne durerait pas cinq minutes en tout.
Mais Fiorinda secoua sa jolie tête mutine et déclara :
« C’est pour moi que M. de Beaurevers s’est mis dans la situation critique où il est… Je ne m’en irai pas sans lui… Nous nous en irons tous ensemble. »
Elle disait cela de son petit air tranquille qui indiquait qu’elle n’en démordrait pas.
Au fond, Ferrière l’approuvait. Il n’insista pas.
Or, il faut expliquer ici comment il se faisait que cette porte de cave était fermée. Pour cela, il nous faut parler du dixième homme de Rospignac, celui qui ne s’était pas trouvé au corps de garde avec ses compagnons, et qui, par conséquent, n’avait pas subi le même sort qu’eux.
Cet homme était celui qui avait remplacé son maître dans ses fonctions de garde-malade près de Beaurevers.
Or, il venait de descendre peu d’instants avant l’arrivée de Ferrière et de ses compagnons. Comme il faisait toujours en pareil cas, il avait passé la clef à l’intérieur et donné un tour, s’enfermant ainsi lui-même avec son prisonnier. Pourquoi agissait-il ainsi ? Simplement parce que ses camarades lui avaient fait la mauvaise farce de l’enfermer une fois plus longtemps qu’il ne voulait. Il prenait ses précautions pour que ce mauvais tour ne se renouvelât plus. D’ailleurs, après s’être enfermé, il laissait la clef dans la serrure.
L’homme, bien tranquille, était entré dans le caveau de Beaurevers. Il avait planté sa torche dans un coin et s’occupait consciencieusement à étendre un onguent sur un linge avant de renouveler le pansement de son malade.
C’était une brute inintelligente et mauvaise. Tout en s’activant, il accablait Beaurevers d’injures. Il lui disait notamment, d’une voix rocailleuse :
« N’aie pas peur, fils de chien ! Encore un pansement comme celui-ci, et ce sera le dernier ; je serai délivré de cette assommante corvée. »
Et avec un gros rire stupide :
« Toi aussi, tu seras délivré, truand de petite truanderie, mais pas de la même manière. Demain, on t’enchaînera solidement et on fera venir le tourmenteur juré qui te dira deux mots… Tripes du diable, je ne voudrais pas être dans ta chienne de peau ! Ah ! peste non ! »
Beaurevers paraissait assoupi. Mais il ne dormait pas. Il entendait tout ce que la brute lui disait. Cette brute s’avançait peut-être un peu en disant que le lendemain il serait soumis à la question, attendu qu’elle n’en savait rien,
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