Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Fleurs de Paris

Fleurs de Paris

Titel: Fleurs de Paris Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
Vom Netzwerk:
ces dons qu’aucune
éducation ne peut donner, cette vive intelligence, cette fierté
d’âme, cette instinctive noblesse des attitudes, tout, en elle,
exhalait le parfum d’un charme que, depuis… je n’ai plus retrouvé…
Il semble donc que Hubert d’Anguerrand, aimant une pareille femme,
n’avait qu’à l’épouser. J’oublie de te dire que Jeanne Mareil
aimait le baron. Oui, quoi qu’il soit arrivé, si profond que soit
l’abîme aujourd’hui creusé entre Jeanne et Hubert, je jure qu’elle
m’aimait !
    Le baron ajouta en lui-même :
    Qui sait si elle ne m’aime pas encore ?
Et moi !… qui sait si je ne l’aime pas toujours ?…
Quoi ! malgré ce que j’ai vu ?… Quoi ! j’aimerais la
tourmenteuse de ma fille ?… Hubert d’Anguerrand, continua-t-il
sourdement, n’avait qu’à demander Jeanne Mareil à elle-même et à sa
mère. Il eût été accueilli avec joie. Et, dès lors, c’était une
existence de bonheur qui s’ouvrait devant lui. Au lieu de ce
bonheur, le meurtre, le crime, les douleurs, les angoisses, les
remords, la vieillesse avant l’âge, voilà ce que j’ai
trouvé !… Bien des pauvres créatures ont souffert : toi,
ton frère Edmond, ce Gérard même, moins criminel que moi,
peut-être. (Lise pâlit, se raidit et serra les mains avec force.)
Tout cela parce que j’étais riche et que Jeanne était pauvre, parce
que je portais un titre et que Jeanne était fille de paysans… Tu
vois à quel point mon crime fut sordide et vil… Mon crime, le voici
au lieu de faire de Jeanne, ma femme, je voulus en faire ma
maîtresse. Mon orgueil d’argent, mon orgueil de race, car je
croyais alors qu’il y a des races différentes, tout ce qu’il y
avait en moi d’orgueil insensé se révolta à la pensée des
ricanements de l’aristocratie angevine conviée aux noces du
millionnaire baron avec la pauvre fille d’une fermière… J’eus le
courage d’exposer ces idées à Jeanne. Repoussé, j’usai de violence.
Jeanne devint l’hôtesse du château, ou plutôt sa prisonnière. Sa
force de résistance, digne d’admiration, car bien peu de femmes
eussent montré une pareille vaillance, la défense farouche et enfin
de compte victorieuse qu’elle m’opposa ne m’inspirèrent que des
pensées de lâcheté. Lorsque Jeanne sortit du château, aussi pure
qu’elle y était entrée, j’avais ruiné sa mère, et quant à la
malheureuse enfant, je l’avais perdue de réputation… La mère de
Jeanne mourut de chagrin ; ce fut ma première victime…
    Lise, toute pâle, les mains jointes
nerveusement serrées, écoutait ce récit avec une sorte
d’angoisse.
    – La deuxième victime ! continua
Hubert avec un rauque soupir. Hubert la dédaigna, vécut à peine
avec elle, et tandis qu’elle passait les plus belles années de sa
jeunesse au fond du château de Segré, lui cherchait à s’étourdir à
Paris… car il aimait toujours Jeanne Mareil. De temps à autre, aux
grandes fêtes, Hubert faisait une courte apparition au château,
puis ses visites s’espacèrent de plus en plus… De ce mariage,
pourtant, naquirent trois enfants Gérard d’abord (Lise frissonna),
Gérard que son père emmena à Paris dès qu’il eut six ans ;
dans l’espoir de se raccrocher au moins à une affection
paternelle ; puis, Edmond, puis enfin, toi, ma Valentine… Des
années s’écoulèrent. Hubert d’Anguerrand, s’il n’avait pas oublié
Jeanne Mareil, avait du moins à peu prés oublié qu’il avait perdu
cette malheureuse. En tout cas, il se croyait oublié d’elle. Il ne
venait presque plus au château. Ses domaines étaient gérés, sous la
surveillance de la baronne Clotilde, par un gentilhomme ruiné qui
s’appelait Louis de Damart…
    « C’était un vieux camarade de collège.
Nous nous connaissions depuis l’adolescence. Je ne te dirai pas
grand’chose de cet homme, sinon qu’il était veuf et qu’il avait une
fille… une fille que tu connais… une fille qui s’appelle maintenant
Adeline d’Anguerrand…
    Lise n’eut pas un geste, mais un imperceptible
frisson la secoua.
    – Veuf et ruiné, le comte de Damart
vivait de mes libéralités ; peu à peu, il devint une sorte
d’intendant général de mes propriétés et je m’applaudissais de ce
que ce fidèle ami s’occupât de soins auxquels je ne voulais pas
m’arrêter. Il s’était établi prés du château, et je savais qu’il
tenait compagnie à la baronne Clotilde ; mais j’avais en

Weitere Kostenlose Bücher