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Fleurs de Paris

Fleurs de Paris

Titel: Fleurs de Paris Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Michel Zévaco
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laissé…
    – Alors, cette lettre est de
Magali ?…
    – Quand je te le dis !… Ouvre tes
esgourdes…
    Et le gamin se mit à déchiffrer la lettre
suivante :
    « Mon pauvre Ernest,
    « Je te quitte. La misère est trop
grande, je n’y tiens plus. Depuis le départ du père, nous mourons
peu à peu de faim. Nous étions si heureux avant ! Pour comble
de malheur, je vois bien que tu es en train de mal tourner. Pour
nous tirer de la misère et t’empêcher de devenir un méchant gueux,
il nous faut de l’argent. Où en trouver ? Ce n’est pas avec
les dix ou douze francs que je gagne par semaine que nous pourrons
nous relever. Mon cher petit frère, je suis bien triste, et j’ai un
gros chagrin de me séparer de toi. Mais il le faut… Je vais essayer
de gagner de l’argent… et pour la manière dont je vais m’y prendre,
je mourrais de honte de t’avoir près de moi. Je te laisse la pièce
de cent sous qui est dans le tiroir de la table, et je me suis
arrangée avec Mme Bamboche, notre concierge, pour le loyer. Tu
pourras rester dans le logement, et le mari de Mme Bamboche te
fera travailler avec lui dans ses théâtres, quand il aura fini sa
prison. Toutes les semaines, mon cher Zizi, je t’enverrai de
l’argent. Sois sage, c’est ta sœur qui t’en supplie ; va à
l’école, suis bien les conseils de M. et Mme Bamboche, et
ne t’inquiète de rien. Je me charge de ta vie. Puisque je ne suis
pas morte de désespoir, il faut vivre. Nous vivrons, mon cher petit
frère. J’aurais bien aimé que ce fût autrement : mais
puisqu’il n’y a pas moyen d’y échapper, je vais demander notre
subsistance au trottoir…
    « Ta sœur qui t’aime et t’embrasse bien
fort.
    « Juliette Gildas…
Magali
 ! »
    Zizi comprit-il tout ce qu’il y avait de
tristesse et de dévouement dans cette lettre navrante ?…
Peut-être, car une grosse larme roula sur sa joue maigre et pâle de
gamin vicieux. La Merluche avait écouté en ouvrant des yeux
effarés.
    – Alors, comme ça, dit-il, ta frangine
s’est esbignée ?… Pourquoi faire, donc ?…
    – Pour se faire grue, répondit rudement
Zizi.
    La Merluche demeura un instant foudroyé ;
puis, hochant la tête, il se mit à déchiqueter le poulet, et,
engloutissant la première cuisse il bégaya :
    – Ah ! oui, zut, alors !…
    Et lui aussi, sans trop savoir pourquoi, il se
mit à pleurer, tout en dévorant. Son visage effaré se barbouilla de
larmes et de jus de poulet.
    – Tu ne boulottes pas ? dit-il.
    Zizi garda le silence, tordant machinalement
dans ses mains la lettre de Magali. Tout à coup, il assena un coup
de poing sur la table.
    – Tout ça, cria-t-il, c’est la faute de
cette crapule de marquis. Une perle ! Oui, parlons-en !
La perle des cochons ! Ah ! si je le tenais,
celui-là !…
    *
* * * *
    À ce moment, sur le palier, devant la porte
demeurée entr’ouverte, quelque chose comme une ombre passait,
descendant l’escalier. Aux paroles que prononçait Zizi, cette ombre
s’arrêta un instant ! Et ces paroles, elle parut les
recueillir en tressaillant… puis, lentement, elle descendit.
    L’ombre, c’était La Veuve qui sortait pour se
rendre au cabaret des Croque-Morts…
    – Boucle donc la lourde, commanda
Zizi.
    Ayant fermé la porte, La Merluche vint se
rasseoir, et il se fit en lui un mélange de bruits bizarres,
soupirs, mastication effrénée, sanglots retenus et gloussements de
plaisir glouton. Zizi finit par l’imiter, du moins en ce qui
concerne la mastication. Ils en étaient au croupion du poulet et
ils allaient tirer au sort l’as de pique – à ce moment, il y avait
vingt minutes que La Veuve était sortie – lorsqu’on frappa à la
porte.
    – C’est elle, fit La Merluche, qui,
d’émotion, avala de travers.
    Zizi, très ému, lui aussi, alla ouvrir :
ce n’était pas Magali… c’était Marie Charmant.
    – Mademoiselle Magali n’est pas là ?
fit la bouquetière en avançant sa jolie tête.
    – Elle est allée porter de l’ouvrage, dit
Zizi, qui, à la vue de sa voisine du dessus, rougit jusqu’aux
oreilles.
    – Je voudrais vous dire deux mots,
monsieur Ernest, reprit Marie Charmant. Mais en particulier…
ajouta-t-elle en jetant un regard sur La Merluche.
    Zizi se tourna vers La Merluche, et, se
redressant sur ses ergots, ordonna :
    – File, Merluchon ! Je reçois du
monde !…
    Et La Merluche « fila ».
    – J’ai un service à vous demander, dit
Marie

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