Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Frontenac_T1

Frontenac_T1

Titel: Frontenac_T1 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Micheline Bail
Vom Netzwerk:
moins. Et où se dirigeraient-ils, sinon vers Québec? Allaient-ils renouveler le pacte conclu quatre ans plus tôt avec les Cinq Nations et attaquer en même temps Montréal, par voie de terre?
    Frontenac, Callières, Champigny, Vaudreuil et les officiers d’état-major avaient eu beau virer la question dans tous les sens, force leur était d’admettre que la situation du pays était à nouveau terriblement précaire. Tous étaient assujettis à la même fatalité et liés par la même appréhension de voir bientôt fondre sur eux le péril anglais. Une angoisse que l’on n’osait nommer minait leur esprit.
    Louis dormait peu depuis quelque temps. Il avait moins de sang-froid qu’autrefois et gérait mal les pressions qui fusaient de toutes parts. Callières, de son côté, ne mangeait presque plus, au point que Louis s’en inquiéta.
    â€” Seriez-vous souffrant, mon cher? Vous picorez dans votre assiette. Je ne vous reconnais pas, lui avait-il dit la veille. Il n’est pas propice de tomber malade quand nous sommes dans de si mauvais draps. Mangez donc, avait-il ajouté en lui tendant un morceau de viande que l’autre avait repoussé d’un air dégoûté.
    â€” Non, je n’ai guère d’appétit ces jours-ci.
    Callières n’en jonglait pas moins avec les problèmes et trouvait des solutions originales aux situations les plus inextricables. Une qualité que Louis avait eu l’occasion d’apprécier à maintes reprises. Il était d’ailleurs persuadé qu’il n’attendait que son départ – ou sa fin – pour le remplacer à la tête de la colonie. «Et pourquoi pas? se disait-il. Si quelqu’un doit me succéder, aussi bien que ce soit lui. » Une candidature qui lui plaisait davantage, en tout cas, que celle de Vaudreuil. Callières nourrissait d’ailleurs de la méfiance à l’égard de ce subordonné qu’il considérait comme un dangereux rival.
    Des clameurs venues du dehors se firent entendre. Un officier fit irruption dans la pièce.
    â€” Un nommé Claude Bizaillon, messeigneurs, prétend porter un message du sieur de La Noue.
    â€” Faites-le entrer.
    Un homme d’une pâleur de déterré s’avança sur le pas de la porte. Il salua brièvement en prononçant des paroles inaudibles, regarda les gens à la ronde d’un air hagard, puis s’effondra de tout son long en cognant durement le sol. Quelques officiers le portèrent sur un canapé. Il respirait à peine et semblait avoir trépassé.
    â€” De l’alcool. Qu’on m’apporte de l’alcool! clama Louis en se tournant vers un officier. Et préparez-lui un bouillon.
    Champigny s’était penché sur l’homme inconscient et tentait de lui dégager le col. Comme on le serrait de trop près, Louis obligea les autres à reculer.
    On remit le flacon d’eau-de-vie à l’intendant qui en imbiba un mouchoir et le pressa sur le nez de Bizaillon. Il refit le geste jusqu’à ce que l’autre fasse mine de revenir à la vie : il toussait et reniflait bruyamment. Champigny lui souleva la tête et lui fit ingurgiter quelques gouttes d’alcool. On supposa qu’il avait marché de longues heures sans dormir ni manger, ce qui expliquait son extrême faiblesse. Quand l’homme put enfin articuler quelques mots, l’intendant le fit asseoir et l’aida à avaler le bouillon, trempé de pain, qu’il se mit bientôt à engloutir avec voracité. Son état laissait présager celui des autres restés là-bas...
    Les mines étaient basses et un silence lourd s’était installé. On ne pouvait qu’imaginer le pire. Quand il eut bien mangé et suffisamment récupéré, Louis se planta devant le rescapé et commença à le presser de questions.
    â€” Dites-moi, où sont les autres et dans quel état?
    â€” Dans un... état périlleux... pour le moins, monseigneur. Nous manquons de tout et... nous sommes échoués pour la plupart à la rivière Chazi, à l’embouchure du Richelieu. Nous avons des blessés.
    â€” Combien?
    â€” Je dirais... pas loin d’une quinzaine... et plusieurs morts.
    â€” Mais que s’est-il passé, diable, pour que vous soyez dans ce triste état?
    â€”

Weitere Kostenlose Bücher