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Funestes présages

Funestes présages

Titel: Funestes présages Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Paul C. Doherty
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posa les mains sur les bras de sa chaire et se mit à se balancer d’avant en arrière.
    — C’est douloureux, admit le magistrat, mais de terribles meurtres ont eu lieu à St Martin. Ce fut d’abord l’abbé Stephen. Et à présent des membres du chapitre abbatial sont abattus et marqués au fer rouge d’une façon horrible.
    Il s’interrompit.
    — Ils sont morts par le poison ou la flèche et on a écrasé le crâne de frère Gildas, l’architecte, avec une grosse pierre.
    Lady Margaret suffoqua et ferma les yeux. Elle se mit à trembler sans pouvoir se maîtriser. Elle prit une profonde inspiration, rouvrit les yeux et saisit sa coupe de posset qu’elle serra entre ses mains.
    — De grâce, Madame, parlez-moi de Sir Stephen.
    — Lui et Reginald étaient comme des frères. Vous souvenez-vous du livre des Proverbes : « Des frères unis sont comme une forteresse » ? Eh bien, il en était ainsi. Stephen venait d’une famille noble, mais pauvre. Ses parents étaient morts jeunes et le père de Reginald lui avait donné l’hospitalité par charité.
    Elle soupira.
    — Ils furent donc élevés comme des frères. Quand la guerre civile éclata entre le roi et ses barons conduits par Montfort, Reginald et Stephen s’engagèrent sous la bannière royale. Édouard les appelait ses jeunes lions. Ils lui appartenaient, en temps de paix comme en temps de guerre, et endurèrent toutes les épreuves et les privations de la campagne. Comme vous le savez, Stephen, un jour, sauva la vie du souverain. La guerre prit fin et les butins furent distribués aux vainqueurs. Les domaines de Reginald s’agrandirent : il reçut prairies et pâtures, granges et greniers. Je possède des terres en Cornouailles, dans le Somerset, le sud du Yorkshire et le Kent. Stephen, lui aussi, s’enrichit. On lui donna des propriétés des rebelles dans le Lincolnshire et le Norfolk. Ils devinrent tous deux chevaliers bannerets et membres du Conseil royal. Ils partageaient la chambre d’Édouard et faisaient partie de ce groupe particulier de chevaliers qui avaient le droit de porter des armes en sa présence. Leur affection était réciproque et le roi les aimait tous les deux : ils pouvaient obtenir tout ce qu’ils désiraient. Ma famille vient du Lincolnshire. Le roi a arrangé notre mariage. Je n’avais que dix-sept ans, mais quand j’ai rencontré Sir Reginald, je m’en suis éprise. Il était aimable et courtois, bien que soldat dans l’âme. Oh, il pouvait vous ennuyer à mourir avec des détails sur la chasse ou les qualités de tel destrier comparé à tel autre, mais c’était un homme de bien.
    — Et Sir Stephen ?
    — Ah oui ! La bruyère dans l’allée du jardin, l’épine sur la rose.
    Elle prit une large inspiration.
    — Il m’a déplu dès la première minute : des yeux ardents, impétueux, un peu moqueurs. Je pense, Sir Hugh, qu’il ne croyait en rien, sauf au roi, à Sir Reginald et à sa propre épée.
    — En rien ? s’étonna Corbett.
    — Oh, il assistait à la messe, mais bavardait pendant son déroulement quand il ne s’endormait pas ! Daubigny ne s’intéressait ni aux prêtres ni à la religion. Il ne blasphémait pas, il ne se montrait pas injurieux ; il était seulement cynique et railleur. Personne n’a été plus étonné que moi quand il est entré à St Martin.
    — Et vous continuez à le détester ?
    — Il m’arrive, Sir Hugh, de le haïr.
    Lady Margaret se retourna, l’air dur, les yeux plissés, les lèvres pincées avec détermination.
    — Reginald ne cessait de parler de lui et ils ne pouvaient supporter d’être séparés trop longtemps. Pas un Noël, une fête de Pâques, une Saint-Jean ou une Saint-Michel sans Sir Stephen. J’avais parfois l’impression d’être mariée à deux hommes et non à un seul.
    — Se gaussait-il de vous ?
    — Il n’était pas lubrique, mais avait un regard ardent et un peu insolent. Je pense que le mariage de Sir Reginald l’avait contrarié. Les années ont passé. Le roi employait encore Sir Stephen pour diverses missions. Quand il était au loin, je m’agenouillais pour remercier le Bon Seigneur, mais il revenait toujours, cracha-t-elle.
    — Et Sir Reginald ?
    — Nous étions heureux.
    — Combien d’années votre mariage a-t-il duré ?
    — Cinq ans.
    — Qu’en est-il de la disparition de Sir Reginald ?
    — Au fond de moi, j’ai toujours blâmé Daubigny. Vous avez ouï parler, Sir Hugh, de la

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