Furia Azteca
emmêlée et son ymaxtli était collé, sa couleur sombre éclaircie par mon omicetl.
Je me sentais moi aussi imprégné d'elle et de ma pro-680
pré sueur. J'avais affreusement soif et l'intérieur de mon gosier semblait lui aussi être garni de poils. J'appris ensuite que c'était une sensation normale quand on a m‚ché du jfpuri. Tout doucement, pour ne pas la réveiller, je me levai et m'habillai pour chercher de l'eau. Avant de partir je pris ma topaze pour jeter un dernier regard sur la belle femme étendue sur les peaux de jaguar. Je pensai que c'était la première fois que j'avais des relations sexuelles avec un dirigeant et je me sentis tout fier de moi.
Pas pour longtemps. Lorsque je quittai la maison, le soleil était encore haut et la fête allait bon train. Après avoir bu tout mon so˚l, je rencontrai les yeux accusateurs de la fille que j'avais poursuivie tout à
l'heure. Je lui dis en souriant d'un air innocent :
" Voulez-vous qu'on fasse la course ? Je peux maintenant prendre du jîpuri autant que je veux. J'ai été initié.
- Inutile de vous en vanter, me répondit-elle d'un ton rageur. Votre initiation a duré une demi-journée, une nuit entière et encore presque toute une autre journée. "
Je n'en revenais pas. Comment était-il possible qu'un temps aussi long semble si court ? Je me sentis rougir sous ses accusations.
" C'est toujours elle qui profite la première du meilleur ma-rakame que procure la lumière divine. Ce n'est pas juste. Tant pis si on me traite de rebelle et d'insolente. Je l'ai dit et je le répète, elle a fait semblant d'avoir reçu la lumière divine du Grand-Père, de la Mère et du Frère. Elle a menti afin de pouvoir profiter la première de tous les ma-tu‚ne qu'elle initie. "
Ces paroles rabaissèrent tant soit peu l'orgueil que j'avais conçu pour m'être uni à un chef légitime, du fait que ce chef ne valait guère mieux que les femmes qui suivent les mauvais chemins. Je fus également blessé
dans mon amour-propre car le si-riame ne réclama jamais plus ma présence auprès d'elle. Elle avait eu le meilleur de moi-même.
Toutefois, j'arrivai à amadouer la colère de l'autre fille après avoir dormi et récupéré mes forces. Elle s'appelait Vi-rikôta, ce qui veut dire Terre Sainte et qui est aussi le nom de la région située à l'est de ces monta-681
gnes o˘ l'on récolte le jîpuri. La fête continua encore plusieurs jours et je parvins à la persuader de me laisser la poursuivre à nouveau. J'avais pris soin de ne pas trop manger et de ne pas boire de tesgiiino et, cette fois, je la rattrapai assez facilement.
Après avoir pris quelques morceaux de jîpuri, nous partîmes tous deux en direction d'une jolie clairière au milieu des bois. Il me fallut m‚cher une bonne quantité de ces cactus moins puissants pour approcher les sensations que j'avais expérimentées avec le si-riame et pour sentir mes sens changer de fonction. Cette fois les couleurs des fleurs et des papillons se mirent à'chanter.
Vi-rikôta avait, elle aussi, un médaillon entre les jambes ; comme je n'en avais pas encore épuisé la nouveauté, je fis preuve, cette fois encore, de beaucoup d'initiative. Pourtant, jamais ni elle ni moi n'arriv‚mes à
l'extase que j'avais connue pendant mon initiation. Je n'avais pas l'impression de monter vers le ciel et j'étais toujours conscient de l'herbe moelleuse sur laquelle nous étions couchés. Cette union fut beaucoup moins mémorable, pour moi, que la précédente, sans doute parce que Vi-rikôta et moi n'avions pas droit au cactus à cinq côtes qui donne la vraie lumière divine.
Néanmoins, nous nous accordions si bien tous les deux que nous ne cherch
‚mes pas d'autres partenaires pendant toute la durée des festivités. Nous pratiqu‚mes le ma-rakame à plusieurs reprises et je la quittai à mon grand regret uniquement parce que mon hôte, Tes-disora, insistait pour que j'assiste à la grande course le ra-rajî-puri, entre les meilleurs coureurs du village et ceux de Guacho-chî.
" O˘ sont-ils ? demandai-je. Je n'ai vu arriver personne.
- Ils arriveront quand nous serons partis. Guacho-chî est loin d'ici, vers le sud-est. "
La distance qu'il m'indiqua représentait quinze longues courses mexica ou quinze lieues espagnoles. Sans compter qu'il s'agissait d'une distance en ligne droite, alors qu'en réalité, dans un pays escarpé, les chemins suivent un parcours tortueux à travers ravins et pentes. Je calculai
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