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Galaad et le Roi Pêcheur

Galaad et le Roi Pêcheur

Titel: Galaad et le Roi Pêcheur Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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que le Roi Pêcheur aura été guéri, il faudra que Galaad, Bohort et toi-même partiez plus loin, jusqu’à la cité de Sarras. Là seulement vous aurez la révélation des mystères du saint Graal. Là aussi vous retrouverez la nef dans laquelle vous m’aurez placée. Alors, pour mon honneur et pour le salut de mon âme, fais-moi enterrer au Palais Spirituel qui se dresse en plein cœur de cette cité de Sarras. Enfin, je puis te dire également que ni toi, ni Galaad ne reverrez la cour du roi Arthur. C’est Bohort qui s’en ira rendre compte au roi et à ses gens de tout ce qu’il aura vu. »
    En entendant sa sœur parler ainsi, Perceval se mit à pleurer. Elle dit encore : « Mon frère, pourquoi pleurer pour si peu ? Nous sommes ici pour accomplir les desseins de Dieu, dussent-ils nous paraître obscurs et impénétrables. Partez demain tous trois, et que chacun d’entre vous suive sa propre voie jusqu’à ce que le Haut Maître vous rassemble chez le Roi Pêcheur. Ainsi parle Dieu par ma bouche, mon frère, et je vous prie, toi et tes compagnons, de suivre mes instructions jusqu’au bout. Ainsi seulement pourrez-vous mettre un terme aux aventures du saint Graal. » Tout en versant des larmes, les trois compagnons le lui promirent solennellement. Elle demanda alors à recevoir le corps du Christ, et l’on manda un sage ermite qui habitait près de là, à l’orée d’un bois. Il arriva bientôt, et Lawri communia avec une grande dévotion, recommandant son frère à la grâce de Dieu. Puis elle rendit le dernier soupir entre les bras de Perceval. Mais celui-ci en fut si triste et si désemparé qu’il pensa ne jamais s’en remettre. Et ses compagnons n’étaient pas moins affligés que lui.
    Ce même jour, guérit la dame. Car dès qu’on l’eut lavée du sang de Lawri, elle se vit nettoyée de sa lèpre, et sa chair, jusqu’alors toute noire et horrible à voir, avait recouvré son éclatante beauté d’autrefois. Et si les habitants de la forteresse en furent tout joyeux, les trois compagnons le furent autant, car ils comprenaient que le sacrifice de la jeune vierge n’avait pas été inutile et que le miracle s’était produit {52} . Ils firent embaumer le corps de Lawri et, conformément aux volontés qu’elle avait exprimées, ils allèrent le déposer dans la nef, sur un lit recouvert d’un riche drap de soie. Cela fait, ils poussèrent la nef à la mer et, aussitôt, le vent gonfla les voiles et l’emmena au large avec tant de force qu’elle disparut bientôt à l’horizon.
    Quand ils ne la virent plus, les trois compagnons se sentirent un long moment éperdus de tristesse, et Bohort finit par dire à Perceval qu’il regrettait que l’on n’eût pas joint un écrit au corps, pour que chacun sût qui était Lawri, et les circonstances de sa mort. Perceval le rassura : « J’ai déposé à son chevet une lettre qui explique ses origines, sa vie, sa mort et les aventures vers lesquelles elle nous a guidés. Si on la découvre quelque part en terre étrangère, on saura ainsi qui elle est. » Galaad l’en félicita et se réjouit en pensant que les gens qui la trouveraient un jour pourraient lui rendre les grands honneurs que méritait son dévouement.
    Les habitants de la forteresse avaient escorté les trois compagnons jusqu’au port, et la plupart d’entre eux pleuraient d’émotion en pensant que cette jeune fille avait accepté la mort pour rendre la vie à leur dame. Cependant, ils eurent beau presser les chevaliers d’accepter l’hospitalité de la forteresse et d’y demeurer aussi longtemps qu’ils le désireraient, ceux-ci refusèrent même d’y rentrer, demandant seulement qu’on voulût leur donner des chevaux. Pleins de gratitude, les habitants se hâtèrent d’aller chercher les trois meilleurs destriers qu’ils purent trouver et les leur ramenèrent, tout sellés et sanglés.
    Lorsqu’ils furent prêts à partir, Galaad, Bohort et Perceval virent le temps s’obscurcir et les nuages devenir très noirs. Ils se retirèrent vers une chapelle qui se trouvait un peu plus loin, au bord du chemin qu’ils avaient l’intention de suivre et, mettant leurs chevaux sous l’appentis, allèrent s’abriter à l’intérieur. Or, le temps empira, le tonnerre se mit à gronder, des éclairs zébraient les nues, et la foudre tomba sur la forteresse. La tempête dura toute la journée, si terrible qu’elle abattit au moins la moitié des remparts et des

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