Game Over - L’histoire d’Éric Gagné
passer tes lancers de 95 à 75 milles à lâheure. Mais aujourdâhui les frappeurs te perçoivent différemment. Il va falloir que tu apprennes à gérer le match autrement.
â Non, non! Chu capable de retrouver mon change - up !
â Si ton bras ne passe plus à la même vitesse quâavant, lâeffet sur la balle ne sera plus jamais le même. Tu ne le retrouveras pas, ce lancer.
Leur argument était simple : si mes lancers atteignaient 84 milles à lâheure dans un match donné, Michel et Pierre-Luc me conseil-laient de mâajuster à la situation en donnant un peu plus de mouvement à mes lancers, en développant une cutter 2 par exemple, et en forçant lâadversaire à cogner des roulants. Et si jâatteignais 92 milles à lâheure dans une autre rencontre, je nâavais quâà lancer en conséquence.
Il fallait, disaient-ils, que je cesse de rechercher le retrait sur des prises à tout prix.
Sur le coup, câétait un ajustement difficile à imaginer parce que tous les lancers qui mâavaient rendu dominant étaient encore bien présents dans ma tête. Et quand jâétais dominant, je savais longtemps dâavance comment jâallais retirer chaque frappeur.
Mais en même temps, jâavais lâesprit ouvert et jâétais prêt à modifier mon approche si on me démontrait que câétait logique.
Jâai vite reconnu que les arguments de Pierre-Luc et Michel avaient du sens. Après tout, dâautres lanceurs étaient passés par là avant moi et certains sâen étaient extrêmement bien tirés. Dâailleurs, jâavais toujours admiré des artilleurs comme Greg Maddux et Tom Glavine. Ils lançaient à 92 ou 95 milles à lâheure à leur arrivée dans les majeures et le temps avait fini par étioler la puissance de leurs lancers, mais ils sâétaient brillamment ajustés et ils étaient parvenus à rester efficaces pendant deux décennies.
La durabilité est une extraordinaire qualité qui nâest pas reconnue à sa juste valeur dans le monde du sport.
Lors de mes départs subséquents, je me suis donc efforcé de mettre en pratique les changements que Michel et Pierre-Luc avaient proposés. De toute manière, je nâavais pas vraiment le choix. Il me fallait dorénavant travailler avec les outils que jâavais.
Une telle chose mâétait déjà arrivée lors de mes premières années dans les ligues mineures, juste avant que je subisse une greffe de tendon au coude. Sans que je sache pourquoi, mes lancers avaient alors perdu une dizaine de milles à lâheure. Et pendant presque une saison complète, jâavais tout naturellement fait les ajustements nécessaires pour continuer à retirer les frappeurs.
à compter de cette «mise au point», toutes les pièces du puzzle se sont mises à sâassembler. Dès la semaine suivante, jâai connu un départ de bien meilleure qualité. Puis, lors de mes cinq matchs subséquents, lâadversaire a été limité à un, quatre, deux, zéro et deux points.Mes sorties étaient plus longues et plus constantes. Mes lancers avaient de lâétoffe et leur vélocité était redevenue digne des ligues majeures.
Les recruteurs de plusieurs organisations (les Phillies, les Blue Jays, les Mets et les Brewers, notamment) ont alors commencé à fréquenter le stade municipal.
Le 6 août, après mâavoir vu limiter les Skyhawks de Sussex à cinq coups sûrs et un point mérité, Michel a confié aux journalistes de Québec quâil sâattendait à me voir quitter la ville.
â Ãric a gagné son pari et il est nettement prêt à faire le saut dans le baseball affilié. Si ça arrive, il devrait se retrouver au niveau AAA. Je ne serais pas surpris de le voir quitter Québec prochainement tellement il est dominant, disait-il.
Interrogé par les mêmes journalistes, le recruteur des Brewers, Jean-Philippe Roy, tenait le même genre de discours:
â Ce nâest pas compliqué: Gagné sâamuse littéralement avec les frappeurs.
Finir la saison dans les majeures! Câétait lâobjectif que je mâétais fixé depuis le début: dâabord retrouver la forme, et ensuite recevoir un coup
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