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Gauvain

Gauvain

Titel: Gauvain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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pensa alors que, du fait de l’heure tardive, Escanor ne manquerait pas de s’y arrêter pour passer la nuit. Du reste, la distance qui les séparait était telle qu’il ne pourrait en aucun cas le rattraper avant l’étape.
    « Jeune homme, demanda-t-il, qu’allons-nous faire ? Il est clair qu’Escanor de la Montagne ira se loger dans cette forteresse, et cela ne m’arrange guère. – Seigneur, il n’y a là aucune difficulté. Tu aurais tort de t’inquiéter tant que je suis là. Cette forteresse, ainsi que toutes les terres qui l’environnent et la grande forêt que tu vois, m’appartenait autrefois. L’ensemble, j’en ai doté une autre de mes sœurs qui a épousé un chevalier vaillant et sage. À ce que je crois, ton ennemi ira lui demander l’hospitalité, et on ne la lui refusera pas. En revanche, il serait malséant, quel qu’en soit notre besoin, que nous allions nous loger dans la même demeure, chez le même hôte que notre ennemi mortel. Aussi te proposé-je que nous nous rendions chez un riche bourgeois de bonne compagnie. Au service de mon père avant de l’être au mien, il nous hébergera dans les meilleures conditions. – Précède-nous donc, répondit Gauvain, et fais préparer notre gîte au plus tôt. »
    Ainsi fut fait. Dès que le jeune homme fut arrivé chez le bourgeois, qui l’accueillit avec de grandes démonstrations d’amitié, il lui expliqua ce qu’il attendait de lui et lui dit que son hôte, cette nuit-là, serait le preux chevalier Gauvain, neveu du roi Arthur. Le bourgeois en fut tout réjoui. Aussitôt, il manda ses serviteurs, leur fit préparer les sièges, le feu, le souper, avec une célérité, un soin au-dessus de tout reproche. Puis il monta sur son destrier robuste et léger, et il sortit de la ville. Gauvain avait déjà atteint les portes de la forteresse. Le bourgeois l’accueillit très courtoisement, ainsi que la jeune fille, et les mena jusqu’à son logis. Il les fit descendre de cheval et les conduisit dans la grande salle que jonchaient tapis et coussins. Un grand feu brûlait dans la cheminée. Les serviteurs s’empressèrent pour les désarmer, mais Gauvain s’y refusa obstinément.
    « Ami, dit-il au jeune homme, hâte-toi de courir vers la tour, et arrange-toi, comme tu l’as fait la nuit dernière, pour que ce maudit Escanor ne puisse prendre son plaisir avec la jeune fille. Pour l’amour de moi, fais l’impossible afin que ta sœur ait celle-ci en sa garde pendant toute la nuit. Dis en outre à Escanor que s’il s’y oppose, il ne lui reste qu’à remonter à cheval, car je suis prêt à l’affronter sur-le-champ plutôt que de le laisser jouir de la jeune fille contre mon gré. » Le jeune homme avait bien compris. Il se précipita chez son beau-frère et fut accueilli le mieux du monde. Mais Escanor le reconnut aussi : « Maudit sois-tu ! s’écria-t-il. De ma vie je ne serai content que je ne me sois vengé de toi. Si je te tenais en dehors de ces murs, je n’y manquerais pas, sans délai ! » Puis, se retournant vers ses hôtes, il ajouta : « Je n’ai jamais vu de garçon plus insolent et plus insensé. Il m’a contraint de me séparer de mon amie pendant toute la nuit dernière. »
    Le seigneur de la forteresse marquait déjà quelque étonnement quand le jeune homme, sans se départir de son calme et de sa courtoisie, expliqua l’affaire en détail. Puis, s’adressant à son beau-frère : « Je m’en rapporte à ton jugement, quant au forfait qu’a commis cet homme devant le roi Arthur. Pour moi, je ne fais qu’accomplir les ordres de Gauvain, et ce ne sont pas les menaces de cet homme qui me fléchiront. Cependant, cher beau-frère, je réclame de toi un don. – Quel est-il ? – Que ma sœur prenne en charge dans ses appartements cette jeune fille et ne la rende au chevalier que demain matin, lorsqu’il prendra congé. – Par ma foi, dit le seigneur, je n’ai pas le droit de te refuser quoi que ce soit. Si je suis le maître, en cette forteresse, c’est bien parce que tu me l’as donnée en toute amitié. Il en sera ainsi : cette jeune fille sera donc sous la garde et la protection de ta sœur aussi longtemps qu’elle demeurera ici. » Escanor de la Montagne ne manqua pas de protester vigoureusement. « Si tu n’acceptes pas, dit le jeune homme, Gauvain viendra en personne te combattre ici même. Le duel me semble inévitable. – Attends ! s’écria le seigneur. Cela serait

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