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Gisors et l'énigme des Templiers

Gisors et l'énigme des Templiers

Titel: Gisors et l'énigme des Templiers Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean Markale
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d’Henry II, ce
fut là un marché de dupes pour le roi de France.
    L’enjeu était bel et bien la couronne de France. Mais
c’était aussi la possession de Gisors, position clé dans le rapport de forces
entre les deux royaumes. Les acteurs de la comédie étaient Henry le Jeune, fils
d’Aliénor et du Plantagenêt, et Marguerite, fille de Louis VII. Marguerite
devait apporter en dot Gisors et le Vexin. Mais en 1158, les fiancés avaient
tout juste un peu plus de trois ans, c’était bien tôt pour célébrer le
mariage ! On décida donc de neutraliser Gisors en
attendant que le mariage devienne possible. C’est ainsi que la forteresse fut
mise sous séquestre, et confiée à un parti apparemment neutre, en l’occurrence
l’ Ordre du Temple . L’Ordre délégua à cette fin trois de
ses chevaliers : Robert de Pirou, Tostes de Saint-Omer et Richard de Hasting. Ce furent les trois seuls Templiers – du moins ayant le titre
de chevaliers – à occuper le château de Gisors , et encore n’y
restèrent-ils même pas trois ans. On voit que de là à considérer Gisors comme
une forteresse templière, à voir le château comme un sanctuaire du Temple et un
lieu secret où dorment sinon le trésor du moins les archives du Temple, il y a
plus qu’un pas : c’est un précipice. La réalité historique est implacable,
tant pis si elle ruine les fantasmes de certains auteurs en mal de copie.
    Cela dit, et toute affabulation ésotérique étant définitivement écartée, il n’en reste pas moins vrai que les Templiers
ont joué un rôle dans cette affaire, et cela ne préjuge en rien des conclusions
qu’on peut être amené à tirer des motivations profondes et
secrètes de l’Ordre du Temple. Il n’y aurait pas énigme à propos des
Templiers si l’Ordre n’avait pas trempé dans plusieurs affaires pour le moins
obscures et dont on ne discerne pas toujours les raisons véritables.
    Cependant, l’accord de 1158 stipulait que les jeunes fiancés
ne pourraient être mariés avant l’âge de sept ans et que, de toute façon, il
faudrait demander des dispenses au souverain pontife. L’Église était donc
garante de l’accord. En attendant, le Vexin – moins Gisors neutralisée – serait
au roi de France, à l’exception de quelques fiefs accordés au roi d’Angleterre.
Si Marguerite mourait avant le mariage, le Vexin resterait à la France, à la
réserve des fiefs concédés au roi d’Angleterre. En apparence, tout était net et
simple.
    En 1160, l’accord est officialisé dans un traité en bonne et
due forme. On y précise que la petite Marguerite apportera en dot les
forteresses de Gisors, Neaufle et Neufchâtel, et que le mariage aura lieu dans
trois ans. Or, quelques mois plus tard, en novembre de la même année, Aliénor
et Henry Plantagenêt font célébrer le mariage des deux enfants royaux à Rouen,
en toute légalité, et avec les dispenses nécessaires accordées par les
autorités ecclésiastiques. Immédiatement, les trois Templiers commis à la garde
de Gisors remettent les clés de la forteresse à Henry II qui ne manque pas
d’y installer une solide garnison. Bien lui en prit, car Louis VII, qui se
sent berné, est prêt à engager le combat contre son vassal et néanmoins roi
d’Angleterre.
    La légende prétend que le roi de France fit arrêter les
trois Templiers gardiens de Gisors dans leur maison d’Éragny, à peu de distance
de Gisors, et qu’il les fit pendre à un arbre. La réalité est très
différente : Robert de Pirou, Tostes de Saint-Omer et Richard de Hasting furent
simplement chassés de France, autrement dit interdits de séjour, et se
réfugièrent dans les États d’Henry II, qui, d’après les chroniques du
temps, les combla de bienfaits. Il est vrai qu’ayant fait montre d’un zèle
particulier envers le roi d’Angleterre, ils méritaient une bonne récompense.
Les ex-pauvres Chevaliers du Christ, devenus Chevaliers du Temple de Jérusalem,
et accessoirement banquiers des rois, avaient peut-être fait vœu de pauvreté,
mais l’Ordre lui-même pouvait recevoir des dons – et il ne s’en privait pas. Ce
n’était d’ailleurs pas exceptionnel à l’époque : les Cisterciens étaient,
après une période de déclin, devenus très riches, et les Ordres Mendiants
allaient suivre cet exemple au siècle suivant. Or, quand un Ordre monastique
est riche, et qui plus est quand il s’agit d’un Ordre de moines-soldats, les
membres de cet Ordre,

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