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Gondoles de verre

Gondoles de verre

Titel: Gondoles de verre Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Nicolas Remin
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menacé le grand-prince, assis en terrasse au café Quadri , avec une arme. Un sous-lieutenant des chasseurs croates l’avait maîtrisé. Aussitôt, deux agents de police qui passaient par là l’avaient arrêté. L’incident n’avait pas duré plus de trois minutes. Quant au sujet de la dispute, Potocki refusait de le confier au sergent. L’arme en question, à présent posée sur le bureau de Tron, était un pistolet de duel à deux coups. Il s’agissait d’un beau modèle aux canons ciselés et à la crosse en nacre. Pas le genre d’arme qu’on utilise pour tuer quelqu’un, pensa Tron. Il faisait plutôt penser à un accessoire de théâtre.
    — Il n’est pas chargé, dit Bossi qui avait suivi son regard. Selon toute vraisemblance, il n’avait pas l’intention de tuer Troubetzkoï.
    — Où est-il à présent ?
    Bossi désigna le plancher de l’index.
    — En bas, aux arrêts.
    — Et le consul ?
    — Il a présenté son passeport et refusé de venir au commissariat. Pourtant, le comportement du sergent Valli a été irréprochable. Je me demande par conséquent pourquoi il est reparti.
    — Il veut prouver qu’il ne prend pas Potocki au sérieux, dit Tron. Qu’il trouve son geste ridicule, quelles qu’aient pu être ses intentions. Qu’est-ce que nous avons contre Potocki ?
    — Pas grand-chose. Il a menacé quelqu’un avec une arme qui n’était pas chargée et dont on n’est même pas sûr qu’elle fonctionne encore.
    Le sergent haussa les épaules.
    — Si Troubetzkoï ne porte pas plainte, l’affaire est réglée.
    — Je doute qu’il le fasse, remarqua le commissaire. Sinon, il serait venu ici.
    — Vous voulez que j’aille chercher Potocki ?
    Tron hocha la tête.
    — Je crois qu’il a bu, précisa Bossi avant de sortir.
     
    Quand le prévenu apparut dans l’embrasure de la porte, Tron constata qu’en effet il avait bu. Pendant un moment, il eut l’impression que Potocki ne savait ni ce qui s’était passé ni où il se trouvait. Des gouttes de sueur perlaient sur son front. Son élégant costume en lin était maculé. Ses yeux, petits et injectés de sang, ressemblaient à deux pierres au milieu de son visage. On aurait dit que depuis le soir où sa femme avait été assassinée, il avait vidé un verre de cognac après l’autre. Même si les affirmations de Troubetzkoï étaient exactes, Anna Kinsky ne semblait pas lui avoir été d’un grand secours.
    Potocki se contenta de le saluer d’un hochement de tête. Il s’avança d’un pas chancelant, en traînant les pieds, et prit place de l’autre côté du bureau. Puis il dit sans le moindre préambule : — L’arme n’était pas chargée.
    Tron hocha la tête.
    — Je sais.
    Son interlocuteur parvint à esquisser un sourire en coin.
    — C’est une pièce de musée, poursuivit-il. Malgré tout, je pensais qu’elle l’impressionnerait.
    — Pourquoi vouloir l’impressionner ?
    — Pour qu’il signe.
    — Qu’il signe quoi ?
    — Un court aveu que j’ai rédigé.
    — Vous avez cru pour de bon que cet aveu possédait la moindre valeur ?
    — Non, bien sûr que non. Je voulais juste que Troubetzkoï pose le masque un moment. Je voulais voir dans ses yeux que je ne me suis pas trompé.
    — Et vous l’avez vu ?
    — J’aurais peut-être vu quelque chose si cet imbécile d’officier ne m’avait pas frappé avec son sabre.
    Il secouait la tête avec rage.
    — Quel officier avec son sabre ?
    — Celui qui m’a désarmé et poussé contre la table !
    Potocki ferma les yeux et plaqua le dos à son siège d’un geste si brusque que le bois craqua. Lorsqu’il rouvrit les paupières, des larmes lui coulèrent sur les joues. Tout à coup, l’idée qu’il pût être mêlé à la mort de sa femme parut aussi absurde à Tron que l’hypothèse d’une liaison entre Anna Kinsky et lui. Le commissaire se pencha au-dessus de son bureau – au-dessus du pistolet à deux coups, le corps du délit. Il dit d’une voix qui se voulait à la fois compréhensive et ferme : — Pourquoi ne nous laissez-vous pas le soin d’enquêter ?
    — Parce que vous enquêtez ? répliqua le veuf sur un ton plus désespéré qu’agressif.
    — Oui, et pas seulement contre le grand-prince, dit Tron.
    — Ah bon ? Contre qui encore ?
    Potocki jeta un regard las de l’autre côté de la table.
    — Puis-je commencer par vous poser une question, monsieur Potocki ?
    — Je vous en prie.
    — Elle concerne Anna Kinsky. Vous avez dit qu’elle

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