Hamilcar, Le lion des sables
large
jusqu’au retour de l’officier.
— Le
consul se réjouit d’avoir la visite d’un envoyé de Carthage. Il me prie de te
demander de bien vouloir le rejoindre sous sa tente. Tu peux garder tes armes.
Nos cités sont en paix et c’est en ami que tu viens. Du moins, c’est ce que
nous souhaitons. Suis-moi.
Hamilcar
pénétra sous l’immense tente devant laquelle les licteurs [22] avaient déposé leurs faisceaux. L’intérieur était meublé
richement : une grande table, plusieurs lits de repos, des sièges, des
brûle-parfum, des coffres et des candélabres montés sur des trépieds.
Un homme
vint à leur rencontre. Petit de taille, il était vêtu d’une longue tunique
blanche ornée d’une bande rouge dont un pan était rejeté sur son épaule gauche.
— Bienvenue
à toi, noble Carthaginois. Je suis le consul Appius Claudius.
— Je
te salue, noble consul. Je suis Hamilcar Barca, fils d’Adonibaal, membre du
Conseil des Cent Quatre, et je suis envoyé par l’amiral Hannon pour te
communiquer un message du Grand Conseil.
— Je
vois que Carthage choisit bien ses ambassadeurs en dépit de leur jeunesse. J’ai
beaucoup entendu parler de ton père qu’on dit être l’un des hommes les plus
influents de ta cité. Salue-le de ma part si tu le rencontres. Bien entendu,
n’omets pas de faire de même avec Hannon bien qu’à vrai dire, je ne le tienne
pas en grande estime.
— Je
ne puis te permettre d’insulter mon chef.
— Tu
agis en officier loyal et discipliné et je t’en félicite. A ta place, je ne me
serais pas comporté autrement. Mais je te crois suffisamment intelligent pour
avoir remarqué que ton supérieur manque de finesse. Lorsqu’il nous a rendu
certains navires qui s’étaient égarés sur vos côtes du fait de la tempête, il n’a
pas pu s’empêcher d’avoir des mots méprisants à notre égard.
— Je
suis au courant de son dialogue avec le tribun Gaïus Claudius.
— Qu’en
penses-tu ?
— Si
j’avais été à sa place, je me serais exprimé autrement. Accuser quelqu’un
d’avoir peur n’est pas le meilleur moyen de mériter son amitié.
— Ta
jeunesse ne t’empêche pas d’être sage. Si tu le veux bien, prenons place sur
ces lits de repos et buvons à la gloire de nos deux cités. Tu m’entretiendras
ensuite des raisons de ta visite.
Les deux
hommes s’installèrent sur des couches mœlleuses cependant que des esclaves,
mystérieusement surgis du fond de la tente, leur versaient à boire et
disposaient sur un plateau une légère collation. Quand ils furent partis et
après avoir fait honneur à la nourriture, Hamilcar se résolut à parler :
— Appius
Claudius, Carthage s’inquiète de la présence de tes troupes à Rhêgion.
— Elles
se trouvent sur un territoire qui fait partie de la Confédération italique.
Quoi de plus normal ?
— Nul
n’a le droit de vous interdire de masser des légions là où vous le voulez sur
votre territoire. Vous êtes les maîtres chez vous comme nous le sommes chez
nous. La question n’est pas là.
— Où
est-elle alors ?
— Les
Mamertins et les Syracusains, nos alliés, redoutent que vous ne prépariez une
offensive contre eux.
— Nous
avons de bons motifs de le faire. Tu es trop jeune pour avoir connu ces temps
de calamités mais, quand ils étaient les alliés de Pyrrhus, les Mamertins ont
ravagé la Campanie. Ils ont détruit nos propriétés, nos champs et nos vignobles
et réduit en esclavage des femmes et des enfants qu’il nous a fallu racheter en
payant d’énormes rançons. Rome n’oublie rien et ne pardonne rien même si elle
doit parfois attendre longtemps pour exercer sa légitime vengeance contre ses
ennemis. Le temps est venu pour les Mamertins d’expier leurs fautes.
— Le
Conseil des Cent Quatre m’a chargé de te dire qu’ils sont nos alliés et que
leur ville est protégée par une garnison carthaginoise. Si tu franchis le
détroit, Carthage considérera que Rome a rompu le traité et nous a déclaré la
guerre.
— Hamilcar,
ne nous emballons pas. Sache que, bien que consul, je n’ai pas le droit de
déclarer la guerre si telle était – et ce ne l’est
pas – mon intention. Seul le Sénat a pouvoir de le faire et j’espère
bien que nous n’arriverons pas à une telle extrémité. Les Mamertins ne valent
pas que Carthage et Rome se battent pour eux. Nos deux cités ont mieux à faire
que de s’occuper de ces misérables. Je transmettrai
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