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Hannibal, Sous les remparts de Rome

Hannibal, Sous les remparts de Rome

Titel: Hannibal, Sous les remparts de Rome Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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signifier l’interdiction de franchir les limites de l’ager
romanus, du territoire originel de Rome. Il devrait se contenter
d’autoriser l’un des dix captifs à venir plaider sa cause devant le Sénat et
attendre la réponse de celui-ci. Toujours aussi conciliant et, au demeurant,
épuisé par le voyage, le Carthaginois se soumit à cet ultimatum et prit ses
quartiers dans une vaste propriété dont il pilla sans vergogne la cave et les
celliers.
    Conduit
devant les Pères conscrits, le représentant des prisonniers fut invité à
s’exprimer et le fit avec des accents qui tirèrent des larmes aux plus endurcis
des présents :
    — Vénérables
Sénateurs, je n’ignore pas que Rome a toujours refusé de racheter ceux des
siens que l’infortune du sort a placés dans les mains de l’ennemi. Chaque
soldat connaît cette règle et elle lui dicte sa conduite sur le champ de
bataille. Loin de moi l’idée de solliciter l’abrogation de cette mesure pleine
de sagesse. Qu’il me soit toutefois permis de vous expliquer les raisons qui me
poussent à vous demander de faire une exception en notre faveur. Nous n’avons
pas été faits prisonniers durant le combat. Nous avons accompli notre devoir
jusqu’au bout. Quand la panique s’est emparée de l’armée, après la mort de
Lucius Aemilius Paullus, nous nous sommes retranchés derrière l’enceinte de
notre camp en espérant que Caïus Térentius Varron, dont les ordres sont à
l’origine de ce désastre, viendrait à notre secours. Il était trop préoccupé
par sa propre sécurité pour songer aux malheureuses victimes de son inaptitude
à commander les légions et il a préféré nous abandonner. Que pouvions-nous
faire, encerclés par des milliers d’ennemis et privés d’eau ? Nous avons
pensé que sauver notre vie en rachetant notre liberté était le dernier service
que nous pouvions rendre à notre cité. Celle-ci manque cruellement de bras pour
la défendre et l’on m’a dit que vous aviez recruté, pour les incorporer dans
l’armée, huit mille esclaves. Croyez-vous qu’ils soient plus experts que nous
dans l’art de la guerre ? Aussi, Pères conscrits, au nom de tous mes
compagnons, je vous supplie de nous racheter afin que nous puissions reprendre
notre place au combat et venger nos glorieux morts.
    Quand il
eut fini de parler, on entendit au loin les cris et les lamentations des
familles des prisonniers qui tentaient de forcer le barrage établi autour du
Sénat. Craignant que ces manifestations n’influencent le choix de ses
collègues, le vieux Titus Manlius Torquatus se leva et, d’une voix tremblant
d’indignation, tonna :
    — L’émotion
est mauvaise conseillère et craignez qu’elle ne vous égare si vous cédez aux
supplications de nos compatriotes. J’ai écouté avec attention les propos du
représentant des captifs et ce qu’il a dit m’a touché. Parmi les prisonniers,
je compte des parents et des amis chers. Mon cœur saigne en songeant à ce qui
les attend. Toutefois, une seule chose m’intéresse : le salut de Rome.
Devons-nous prendre en considération la demande qui nous est faite ? Je
réponds que non car elle est formulée par des hommes qui n’ont plus le droit de
se ranger au nombre de nos concitoyens. Ils l’étaient jadis, ils ne le sont
plus depuis qu’ils sont devenus les esclaves des Carthaginois. Ils prétendent
avoir préféré sauver leur vie pour continuer à servir, une fois rachetés, dans
les rangs de nos légions. Que penseront les nouvelles recrues, auxquelles nous
nous efforçons d’inculquer le sens de la discipline, de tels compagnons ?
Qui nous garantit que, lors d’une prochaine bataille, ils ne se livreront pas
une nouvelle fois à l’ennemi, assurés d’être rachetés par notre cité et qu’ils
n’entraîneront pas leurs camarades moins expérimentés à imiter leur
exemple ? Croient-ils que le paiement d’une rançon suffira à les laver de
leur lâcheté et de leur infamie ? Nous devons rester fidèles à nos
traditions et à la règle immuable qui veut que les prisonniers soient
abandonnés à leur sort. D’ailleurs, en y dérogeant, nous rendrions avant tout
service à Hannibal. Ce maudit Punique recevrait de nous tant d’or et d’argent
en échange des captifs qu’il pourrait recruter, en Gaule et en Ibérie, des
milliers et des milliers de nouveaux mercenaires pour nous infliger d’autres
défaites. Nous récupérerions vingt mille hommes et lui le

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