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Hasdrubal, les bûchers de Mégara

Hasdrubal, les bûchers de Mégara

Titel: Hasdrubal, les bûchers de Mégara Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Patrick Girard
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d’Utique.
    Interrogés,
les fuyards racontèrent le malheur soudain qui s’était abattu sur eux il y
avait de cela trois jours. Alors que les hommes vaquaient aux champs ou
commerçaient dans leurs humbles échoppes, un détachement de Numides, au visage
masqué par une pièce de tissu, avait fait irruption dans la localité. Il leur
avait fallu moins d’une heure pour incendier les maisons, les greniers à blé,
les bâtiments publics et égorger le bétail. Curieusement, ils s’étaient
abstenus de molester la population rassemblée sur la place du village et
rejointe par ceux qui travaillaient aux champs. Le chef du commando numide
avait ordonné à la foule terrorisée de prendre immédiatement la route de
Carthage s’ils ne voulaient pas être massacrés par d’autres soldats dissimulés
dans les collines environnantes.
    Quand le
pitoyable cortège pénétra dans l’enceinte de la métropole punique, la foule
massée près de la porte d’Utique ne put retenir ses larmes. Compatissante, elle
offrit aux malheureux un abri provisoire dans des bâtiments inoccupés situés
dans le faubourg mi-urbain, mi-rural de Mégara. Les plus excités se répandirent
en ville et envahirent les tavernes nombreuses dans le quartier du port
marchand. Le vin aidant, le ton monta rapidement et les récits les plus
fantaisistes commencèrent à circuler. Ce n’était point une bourgade mais des
dizaines de villages qui auraient été incendiés par les soudards à la solde de
Masinissa. Ceux-ci, non contents de massacrer les vieillards et les enfants en
bas âge, auraient violé aussi bien les jeunes filles que de vénérables
matrones, sous les yeux horrifiés de leurs mères et de leurs époux.
    Les agents
du Conseil des Cent Quatre ne furent pas sans remarquer que les propagateurs de
ces mauvaises nouvelles étaient des agents au service d’Azerbaal. La bourse
pleine de menue monnaie, ils prenaient soin de renouveler les consommations de
leurs auditeurs et les patrons des tavernes durent sortir de leurs celliers
leurs réserves d’amphores. À la tombée de la nuit, les groupes devinrent plus
nombreux et des rixes éclatèrent entre ceux qui minimisaient la portée des
événements survenus et ceux qui se proclamaient partisans de représailles
impitoyables. À la taverne du Dauphin agile, un mystérieux personnage, dont les
habits luxueux attestaient qu’il devait rarement fréquenter les quartiers
populaires, se tailla un franc succès en suggérant à la plèbe de se réunir, tôt
le lendemain matin, sur le maqom pour exiger du Conseil des Cent Quatre une
réaction à la mesure de l’insulte faite à la cité d’Elissa.
    Les agents
d’Hannon le Rab rapportèrent immédiatement ce fait à leur maître. Celui-ci,
entouré de ses principaux conseillers, interrogea ses proches :
    — Dois-je
donner l’ordre à la garde de disperser sans pitié ceux qui s’attrouperont
demain matin devant le bâtiment du Sénat ?
    — Tu
le pourrais mais je te le déconseille, lui rétorqua un nommé Giscon. Les hommes
ne sont pas sûrs et nous ne pouvons compter sur les auxiliaires d’Hasdrubal le
boétharque. À l’évidence, il fait partie du complot ourdi contre toi et il
trouvera tous les bons prétextes pour ne pas faire intervenir ses troupes.
    — Nous
sommes donc perdus !
    — Non.
Il nous suffit de gagner du temps en faisant mine de céder aux exigences de la
populace.
    — Quelles
sont-elles ?
    — Elle
crie vengeance et nous demande de lancer une expédition punitive contre
Masinissa. C’est un risque qu’il nous est difficile de prendre. Mais nous
pouvons trouver une parade.
    — Laquelle ?
interrogea Hannon le Rab.
    — Au
sein du Conseil, le souverain numide compte une quarantaine de partisans qui
s’empresseront de voler à son secours. Détournons sur eux la fureur de nos
concitoyens en les désignant comme traîtres à Carthage et en les bannissant de
nos murs. Ils sont fortunés et il nous suffira d’annoncer que le produit de la
vente de leurs biens sera distribué aux indigents et aux réfugiés. Ces
misérables seront trop heureux de se partager quelques menues pièces de monnaie
et ils ratifieront notre choix en nous acclamant comme les sauveurs de la
patrie. Hasdrubal et ses amis en seront pour leurs frais et il sera grand
temps, par la suite, quand le calme sera revenu, de leur faire payer leur
comportement irresponsable.
    — Giscon,
tu as eu une idée géniale et nous la suivrons. Le

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