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Haute-Ville, Basse-Ville

Titel: Haute-Ville, Basse-Ville Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jean-Pierre Charland
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regards rapides au bosquet. Il finit par déclarer tout d'un coup :
    —    Non, je n'ai pas de petite amie. Enfin, je voudrais... je suis amoureux de Germaine depuis longtemps, mais elle ne s'intéresse pas à moi.
    —    Elle a quelqu'un d'autre dans sa vie ?
    —    Pas que je sache. Seulement, elle vise plus haut, mieux que moi. Je suis un petit commis, infirme...
    Grâce se trouvait au bord des larmes. Gagnon s'en voulait un peu maintenant. Il essayait de connaître Blanche le mieux possible, en interrogeant ses amis, tout en doutant que ce soit utile. Grâce avala la boule d'émotions formée dans sa gorge. Il dit encore :
    —    Comme elle ne voulait pas de moi, elle m'a présenté Blanche. A l'entendre, elle serait parfaite pour moi, gentille, dévouée, travailleuse. Alors, quand j'essayais de me rapprocher d'elle, elle mettait Blanche entre nous. Quand nous nous promenions tous les trois, Blanche était au milieu. Quand nous voulions nous asseoir sur un banc, elle se mettait rapidement à un bout, désignait à Blanche la place près d'elle et je me retrouvais à côté de Blanche. C'est comme pour les photos, au pique-nique de la chorale: j'ai dit à Germaine «J'aimerais te prendre en photo.» Elle a répondu: «Non, je ne suis pas coiffée. Prends plutôt Blanche. » Pourtant, elle est toujours mieux coiffée que Blanche.
    Il se tut, surpris d'en avoir tellement dit. Jamais auparavant il n'avait parlé de ses sentiments pour Germaine, et surtout du mépris qu'il sentait chez elle. Il aurait eu bien trop honte. Tous se seraient moqués de lui. Avec le policier, ce n'était pas la même chose. Cet homme s'occupait d'un meurtre, alors les petites histoires d'amour frustré, cela ne devait pas l'impressionner beaucoup. Il le voyait comme une sorte de médecin : il devait en avoir entendu tellement, ces petites révélations se perdaient sans doute dans les détails de toutes les autres histoires, sûrement plus terribles, qu'on lui avait déjà racontées. Le commis se sentait même plutôt soulagé d'avoir formulé tout cela.
    —    Et Blanche ? Que pensiez-vous de Blanche ? demanda encore Gagnon tout doucement.
    —    Elle était laide, ennuyeuse. Comme elle ne savait pas trop de quoi parler, elle pouvait rester là, sans rien dire, des heures durant. Elle me faisait penser à un chien. Vous connaissez les beagles? Ces chiens aux grandes oreilles, avec des grands yeux tristes ?
    Gagnon fit signe que oui, un peu intrigué du changement de sujet. Grâce continua :
    —    Elle était comme un beagle: immobile devant moi, les yeux tristes, attendant une caresse. Je détestais cela.
    Ce gars-là n'avait pas pu tuer Blanche, comme il n'aurait pu tuer un beagle. Peut-être le pousser du pied pour l'éloigner, certainement pas le tuer. Sa victime de prédilection aurait été Germaine - après le vol, les amours déçus motivaient de nombreux meurtres -, mais pas Blanche. Pourtant, il demanda encore :
    —    Que faisiez-vous samedi, le 3 juillet, en fin d'après-midi?
    —    J'ai quitté le travail après cinq heures, comme d'habitude, pour aller chez moi. Je ne mène pas une vie très exaltante.
    —    Vous avez des témoins capables de dire où vous avez passé la soirée ?
    —    Je ne sais pas. Je vis dans une maison de chambres. Les autres locataires m'ont peut-être vu dans la soirée. Nous échangeons souvent quelques mots. Mais de là à me rappeler après huit jours qu'à telle heure nous avons parlé entre voisins de la température, je ne le puis pas.
    —    Et le reste de la semaine, rien de particulier ?
    —    Le dimanche, je vais à la messe, parfois ensuite je vais dîner chez ma mère. C'est ce que j'ai fait la semaine dernière. Je travaille tous les jours de la semaine, je vais manger dans un petit restaurant pas trop cher, puis je rentre. Quand il n'y a aucune activité de la chorale, j'écoute la radio et je lis. Cette semaine, il y a eu une répétition mercredi soir. C'est ce jour-là qu'on a commencé à se demander où Blanche se trouvait, Germaine et moi. Elle n'avait pas donné signe de vie, ni à la chorale ni chez Germaine, depuis samedi.
    —    Ça ira, fit Gagnon. Je peux vous reconduire quelque part en voiture ?
    Grâce le regarda un moment, surpris que cela se termine de cette façon. Il fit non de la tête et retourna rapidement vers l'église Saint-Roch. Gagnon resta un bon moment sous son arbre, près de la rivière,

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