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Herge fils de Tintin

Herge fils de Tintin

Titel: Herge fils de Tintin Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Benoit Peeters
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du problème.
    Finalement, ni Hergé ni Tintin ne seront inquiétés.
C’est Jacques Van Melkebeke qui va faire les frais de cette
campagne. En 1945, il a déjà fait plusieurs mois de détention préventive et a été privé pour dix ans du droit
d’exposer ses œuvres. En octobre 1946, il figure parmi les
accusés au procès du Nouveau Journal . On lui reproche
surtout un article tardif et brutal concernant un procès de
résistants 9 . Certains ne lui pardonnent pas non plus sescomptes rendus d’expositions. Il le reconnut lui-même,
Van Melkebeke avait plutôt la dent dure : « Je pensais que
la critique artistique était l’affaire d’un homme de métier
impartial mais absolument intransigeant 10 . » Il s’en était
pris à la plupart des peintres belges en vue, dont René
Magritte.
    Condamné à dix ans de détention, Van Melkebeke n’est
pas arrêté immédiatement et continue discrètement à
exercer ses fonctions de rédacteur en chef. Mais, en
décembre 1946, Raymond Leblanc, qui a des amis à la
Sûreté de l’État, apprend qu’une descente de la police judiciaire va avoir lieu dans ses locaux. Avant cette visite, il fait
disparaître toutes les traces de l’activité de Van Melkebeke
et nomme l’un de ses proches, l’avocat André Fernez, au
poste de rédacteur en chef. Leblanc, qui estime avoir déjà
eu assez de difficultés à faire accepter la présence de l’auteur
des Aventures de Tintin , ne veut plus entendre parler de Van
Melkebeke, en tout cas au sein de ses bureaux. C’est Hergé
qui joue désormais les intermédiaires, y compris sur le plan
financier : pour les seuls travaux effectués pendant l’année
1946, il lui verse plus de trente mille francs, une somme
considérable pour l’époque.
    Entré dans la clandestinité, « l’ami Jacques » se teint les
cheveux en noir, et ne travaille plus que sous pseudonyme, notamment sous celui de Georges Jacquet. Le
20 février 1947, il place même dans Tintin une couverture, signée « Edg. Jacobs » alors qu’elle n’est à l’évidence
pas de celui-ci. Hergé aide Van Melkebeke chaque fois
qu’il le peut. Il continue à le payer, officiellement pour des
« travaux de coloriage », mais manifestement il s’agit
d’autre chose. L’ancien rédacteur en chef collabore surtout au scénario du Temple du Soleil et commence à préparer une nouvelle aventure qui devrait envoyer Tintin et
ses compagnons sur la Lune. Van Melkebeke n’écrit d’ailleurs pas que pour Hergé. Il est, à ce moment, le discret
coscénariste de l’ensemble des séries du journal : Corentin de Cuvelier, Hassan et Kaddour de Laudy et bien sûr Blake
et Mortimer 11 .
     
    Lorsque Hergé et Van Melkebeke avaient demandé à
Jacobs de créer une histoire pour Tintin, le dessinateur
avait songé à un récit médiéval, Roland le hardi . Mais
comme Laudy et Cuvelier avaient déjà opté pour des
récits historiques et féeriques, il fut « aimablement prié »
de créer une histoire contemporaine. « Faisant contre
mauvaise fortune bon cœur », Jacobs choisit la science-fiction « comme un moindre mal 12  ». Quelques semaines
plus tard, il propose Le Secret de l’espadon . Cette première
aventure de Blake et Mortimer connaît d’emblée un
succès considérable, marquant les lecteurs de Tintin plus
encore que Le Temple du Soleil .
    C’est peu de temps après, au début de l’année 1947,
que les deux auteurs cessent de collaborer. Pour Jacobs, le
travail sur sa propre série est trop écrasant pour qu’il soit
possible d’œuvrer parallèlement sur Les Aventures de
Tintin . Toujours en retard, il livre les planches de L’Espadon à la dernière limite, vers 3 ou 4 heures du
matin. C’est « un travail de forçat, un véritable train
d’enfer » qu’il ne pourrait pas tenir longtemps 13 .
    Comme le raconta Jacobs au lendemain de la mort
d’Hergé, cette séparation ne s’est pas faite très facilement :
Nous formions un excellent tandem et nous en avions tous
les deux conscience. Peu de mois avant que je ne le quitte,
d’ailleurs, Hergé m’avait demandé de travailler à cent pour
cent avec lui. Pour ma part, j’étais assez réticent, car je craignais de rester dans son ombre. Après quelques jours de
réflexion, je lui ai dit que j’accepterais de rester avec lui si
nous pouvions cosigner les albums. Hergé a paru un peu surpris et il m’a demandé à réfléchir. La semaine suivante, il m’a
dit que chez

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