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Histoire de la Bretagne ancienne et moderne

Histoire de la Bretagne ancienne et moderne

Titel: Histoire de la Bretagne ancienne et moderne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Barthélémy (de Paris)
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clergé réfractaire. Pendant ce temps-là,
l’Assemblée législative, qui avait remplacé la Constituante,
enlevait à la fois à la révolution et à la monarchie leurs
illusions d’un moment. Là, la Gironde et la Montagne déterminèrent
la guerre civile et la guerre étrangère par les décrets contre les
émigrés et contre les prêtres. Le second de ces décrets livrait à
la justice les prêtres réfractaires, et enjoignait aux départements
d’en adresser les titres à l’Assemblée. On ne leur laissait pas
même la chétive pension qui leur avait été allouée en indemnité de
leurs biens ; c’était les placer, après les avoir dépouillés,
entre la faim et l’apostasie (novembre 1791).
    Les émigrés, sommés de rentrer, refusèrent
d’obéir : quant au clergé, il fut martyr. Alors les
révolutionnaires trouvèrent ce lien d’union qui devait être leur
force, la guerre contre les puissances étrangères, qui menaçaient
de tuer le vautour dans son œuf. La guerre de vingt-cinq ans allait
commencer.
    Les départements n’avaient pas attendu les
décrets de l’Assemblée législative pour violer l’amnistie en
remettant la main sur le clergé. Les scènes les plus déchirantes
vinrent émouvoir tout l’Ouest en faveur des nouveaux martyrs, et
surtout en faveur des moines et des religieuses, arrachés de force
à leur vie de pénitence et de dévouement, et jetés sans défense et
sans ressource au milieu d’une société qui les traitait en
parias : lutte horrible et inouïe entre la prière et le
blasphème, entre le chapelet et le sabre !
    « L’expulsion des Calvairiennes de
Carhaix fut un véritable drame. À toutes les visites et à toutes
les sommations, ces pauvres filles avaient répondu qu’on les
arracherait des grilles de leur parloir. La population des
montagnes et des landes voisines était accourue à leur aide. Les
milliers de mendiants qu’elles nourrissaient étaient là, grouillant
sous les haillons, tendant l’écuelle de bois où ils recevaient la
soupe, et remplissant l’air de lamentations et de prières
navrantes : le jour fatal, toute la ville se joignit aux
campagnes. Une heure s’écoula sans que les officiers chargés de
leur expulsion eussent le courage de paraître. Enfin, au moment où
les sœurs distribuaient leur dernière aumône aux pauvres, les trois
charrettes requises pour l’enlèvement s’avancèrent, escortées par
la garnison de Carhaix, sous les ordres de deux municipaux et du
procureur syndic. Les soldats se postèrent aux issues du couvent,
et leurs chefs entrèrent au parloir.
    « Que voulez-vous ? demanda une sœur
converse.
    « – Parler à votre supérieure.
    « – Elle est sans doute en prière.
    « – Allez la chercher.
    « Bientôt parut une petite femme en
longue robe noire, Malo, était un de ces hommes merveilleusement
doués qui peuvent tout. Après avoir follement dépensé sa jeunesse
dans le plaisir, la débauche et les duels, il changea tout à coup,
et s’apprêtait à faire ses vœux dans un couvent de la Trappe, quand
les guerres d’Amérique éclatèrent. Il abandonne le froc, ressaisit
l’épée, se fait appeler le colonel Armand, et illustre ce nom dans
la campagne des États-Unis. De retour en Bretagne, il fait partie
de la députation de 1787, qui réclamait de Louis XVI les
privilèges de la province : on l’enferme à la Bastille, d’où
il sort triomphant avec ses compagnons. Fidèle aux vieilles
franchises bretonnes, il provoque et signe les protestations de
l’Église et de la noblesse contre les premiers envahissements de
l’idée révolutionnaire. La parole enfin ne lui suffit plus ;
il y joint l’action, et dès 1789 il remue toute la Bretagne du fond
de sa terre de Saint-Malo.
    La Rouërie eut d’abord une idée toute
nationale : ce fut de courir à Coblentz arrêter le mouvement
de l’émigration. Il dit à ses amis que c’était en France, et non
pas sur le Rhin, qu’ils pouvaient sauver la monarchie : on le
prit pour un rêveur. Alors il jura de prouver sa thèse par des
faits, et revint en Bretagne, où il convainquit les gentilshommes.
Ayant obtenu enfin l’adhésion des princes, le 5 décembre 1791, il
put entamer l’exécution de son grand projet. On le vit, à partir de
ce moment, faire une sorte, de miracle en créant une association
dans le pays le plus morcelé par les intérêts. Il arrivait seul et
sans appui à Rennes ou à Vannes, et le lendemain il avait

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