Histoire de la Bretagne ancienne et moderne
à la Vendée comme à la république que
devant son épée de pacificateur toute la guerre allait changer de
face, « Je rends, disait-il, les chefs responsables des fautes
de leurs subordonnés ; ils doivent les prévenir par une bonne
police. » C’était flétrir d’un seul mot tout le passé.
Arrivé dans le bas Poitou avec dix-huit mille
hommes, Hoche dit aux Vendéens : « Pensez-vous qu’avides
de sang nous allions venger l’assassinat par l’assassinat ?
Non ! Les vrais républicains ne sont pas cruels. Ils viennent
vous arracher à la tyrannie, et non vous égorger. Ne nous fuyez
plus ; nous saurons respecter votre faiblesse. Rétablissez vos
chaumières, priez Dieu et labourez vos champs. C’est contre
Charette, cet éternel ennemi de votre repos et de votre bonheur,
que je dirige les forces qui me sont confiées par la
république. » – Et les faits vinrent aussitôt confirmer ces
paroles, de manière à ne plus laisser de doute ni de méfiance aux
paysans. Hoche poursuit en administrateur et en général sa
stratégie. Impitoyable justicier des capitaines, il reçoit à merci
les soldats qui se rendent, donne aux paysans de quoi rebâtir leurs
chaumières, etc. Charette s’arme vainement contre un tel ennemi.
Hoche cependant désespère un moment de le vaincre ; il fait
alors une chose indigne de son caractère, il promet six mille louis
d’or à celui qui lui livrera Charette. Honneur à la Vendée !
elle n’eut pas un Judas pour vendre son dernier héros. Mais l’heure
de Charette avait sonné, et Stofflet ne le précéda dans la tombe
que de quelques jours. Le premier voyait tomber autour de lui tous
ses lieutenants ; convaincus qu’ils n’avaient plus de merci à
attendre, les derniers Vendéens se resserrent autour de Charette
avec le sombre et héroïque courage du désespoir.
Pris et conduit à Angers, Stofflet est
condamné à être fusillé. Il refuse le bandeau qu’on lui
offre : « Arrière ! dit-il, les généraux vendéens
n’ont pas peur des balles ! Vive la religion ! vive le
roi ! » Il meurt à quarante-trois ans, le 23 février
1796. – Entouré d’espions, Charette lutte comme le lion que les
chasseurs ont acculé. Enfin il est pris ! Cette conquête
électrise toute l’armée républicaine. « Mon cher général,
écrit un ami à Hoche, nous sommes comme des fous depuis cette bonne
nouvelle. » Elle arrive à Paris à huit heures du soir. Les
cinq directeurs la reçoivent avec des cris de joie, et la font
annoncer sur tous les théâtres, comme ils eussent fait la prise
d’une capitale ou d’un royaume.
Charette est conduit à Nantes, et à toutes les
questions dont on l’accable, il ne répond que ces mots :
« J’ai combattu et je meurs pour ma religion, pour ma patrie
et pour mon roi ! » Avant de quitter le tribunal, il
adresse ces seules paroles à ses juges : « Je ne cherche
point à reculer l’instant de ma mort, mais je prie qu’on me donne
un prêtre catholique. » Arrivé devant les soldats qui doivent
le fusiller, Charette refuse le bandeau qu’on lui offre, désigne sa
poitrine, en disant d’une voix forte : « Visez là ;
c’est là qu’on doit frapper un brave ! » Il avait
trente-trois ans.
Avec lui finit l’insurrection de l’Ouest, qui
avait commencé par des soldats sans généraux, et se terminait par
des généraux sans soldats. Il suffit, pour le démontrer, de résumer
les derniers événements de la rive gauche de la Loire ; après
quoi, nous allons passer sur la rive droite de ce fleuve pour y
recueillir l’histoire peu connue et mal jugée de la
chouannerie.
Hoche avait rouvert les églises et relevé les
chaumières. Les Vendéens n’aspiraient plus qu’au repos, après tant
de fatigues et de souffrances. D’Autichamp, le nouveau
généralissime, essaya de rallier quelques soldats de Stofflet, mais
sans résulta : chaque jour, fidèle à son système, Hoche
donnait amnistie complète aux paysans qui se rendaient, et
promettait guerre et mort aux agents qui les rappelaient aux
armes.
L’année 1799 était arrivée ; le 18
brumaire éleva Bonaparte au pouvoir. Les royalistes et les
républicains tournèrent ensemble leurs yeux vers l’homme de la
Providence. Les uns rêvèrent d’un nouveau Monk, les autres un
second Washington. Ils se trompaient les uns et les autres.
Cadoudal et Frotté, qui triomphaient encore en Bretagne, jettent en
vain leur épée dans la balance ;
Weitere Kostenlose Bücher