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Histoire de la Bretagne ancienne et moderne

Histoire de la Bretagne ancienne et moderne

Titel: Histoire de la Bretagne ancienne et moderne Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Charles Barthélémy (de Paris)
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résultat de ranger la ville de Calais
sous la domination du roi d’Angleterre. Une trêve avait été signée
peu de temps après entre Édouard et Philippe, et la Bretagne s’y
trouvait comprise ; mais de nombreux chefs de bandes des deux
partis n’en parcouraient pas moins la province, rançonnant les
villes et faisant des conquêtes pour leur propre compte. L’habile
et téméraire Dagworth avait péri non loin d’Auray, et ses
compatriotes, pour venger sa mort, reprirent le cours de leurs
pillages et de leurs cruautés dans les campagnes. Un de leurs chefs
surtout, sir Richard Bemborough, commandant de Ploërmel, faisait
retomber sa colère sur les marchands et les laboureurs. Les champs
et les routes se couvraient de cadavres. Une foule d’enfants et de
vieillards expiraient dans les cachots, et les jeunes gens qui
échappaient aux massacres étaient menés sur les marchés, où l’on en
trafiquait comme de vils animaux. Les populations désespérées se
réfugiaient dans les cités, en proie à la misère, à la faim et aux
maladies contagieuses. Elles maudissaient avec énergie Charles de
Blois, Édouard d’Angleterre et Jean de France, qui venait de
succéder à Philippe de Valois.
    Le sire de Beaumanoir, chevalier plein
d’honneur, commandant de Josselin pour Charles de Blois, pressé du
désir de faire cesser ces malheurs, envoya demander un sauf-conduit
à Bemborough pour aller le trouver. L’ayant obtenu, Beaumanoir se
mit en marche pour se rendre à Ploërmel : arrivé devant le
capitaine anglais et en présence de ses compagnons d’armes, il leur
parla en ces termes pleins d’une noble fierté :
    « Chevaliers d’Angleterre, je m’étonne
fort que des hommes vaillants comme vous l’êtes fassent une guerre
honteuse et cruelle, non pas aux gens qui portent les armes, mais
aux marchands, aux laboureurs, aux hommes paisibles. Ce n’est pas
coutume que les soldats soient employés à vexer et à ruiner le
pauvre habitant qui sème le blé, qui nous procure du vin et qui
nourrit le bestail. Je vous en dis tout mon penser, s’il n’y avoit
pas de laboureurs, ne faudroit-il pas que les nobles travaillassent
à la terre et se servissent du fléau et de la houe ? Ne
faudrait-il pas qu’ils endurassent la pauvreté, ce qui seroit
grande peine pour qui n’y est pas accoutumé. Paix donc sur les
paysans d’ores en avant ; ils n’ont que trop souffert ;
les volontés de Dagworth, qui voulait qu’on les épargnât, n’ont été
que trop oubliées ! »
    Bemborough, offensé de la hardiesse d’un tel
discours, lui dit d’une voix haute et forte :
    « Taisez-vous, Beaumanoir ; qu’il
n’en soit plus question ! Montfort sera duc de toute la
Bretagne, Édouard sera couronné roi de France, et les Anglais
auront partout la puissance et le commandement, malgré les François
et ceux qui tiennent à leur parti. »
    Beaumanoir reprit avec une grande
modération : Songiez un autre songe, cestuy est mal songié.
Jamais par telles voies ne parviendrez à vos fins. Vos goberges,
Bemborough, ne valent néant. Ceux qui en disent le plus sont sujets
à se méprendre. Agissons plus sagement, s’il vous plaist, délivrez
les prisonniers, et nous verrons après ce qu’il conviendra de
faire. »
    Bemborough s’emporta, refusa de mettre les
paysans en liberté, et finit par s’écrier : « Il ne faut
pas s’imaginer qu’il existe au monde d’aussi vaillants guerriers
que les Anglais ; ils surpassent tous les autres en courage et
prouesse ; et quant aux Bretons, qui donc en a parlé ?
qu’ont-ils fait ? quelles conquêtes ont établi leur
gloire ? Il leur convient bien de se comparer à la nation
anglaise ! » Beaumanoir, en présence d’une pareille
forfanterie, eut peine à se contenir. Il ajouta cependant avec une
modération apparente : Les Anglais sont sans doute des
guerriers recommandables ; mais, à mon avis, ils sont loin de
l’emporter sur les Bretons. À l’occasion, je me fais fort de le
leur apprendre par expérience, et si Bemborough, dont j’estime le
grand cœur, ne veut pas attendre une rencontre fortuite, il n’a
qu’à choisir un certain nombre des siens, désigner le jour et le
lieu, et là, sans plus de paroles, je le lui ferai
reconnaître. »
    Bemborough accepta le défi, donna sa parole à
Beaumanoir, et tous deux, se séparant, songèrent au choix de leurs
hommes, dont le nombre était fixé à trente. Le rendez-vous fut
donné près d’un

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