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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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d’impressions sinistres contre les citoyens les plus distingués par leur
naissance et par leur mérite. Dès que le mot de trahison venait l’effrayer, sa
cruauté n’avait plus de bornes, et devenait inexorable. On avait découvert ou
imaginé une conspiration contre sa vie ; Magnus, sénateur consulaire, était
nommé comme le principal auteur du complot ; et, sans qu’on entendit un seul
témoin, sans jugement, sans avoir la permission de se défendre, il fut mis à
mort avec quatre mille de ses prétendus complices. Une foule innombrable
d’espions et de délateurs infestaient l’Italie et les provinces : sur la plus
légère accusation, les premiers citoyens de l’État qui avaient gouverné des
provinces, commandé des armées, possédé le consulat et porté les ornements du
triomphe, étaient chargés de chaînes, conduits ignominieusement sur des
chariots publics et en présence de l’empereur. La confiscation, l’exil, ou une
mort simple, passaient pour des exemples extraordinaires de sa douceur. Il fit
enfermer dans des peaux de bêtes nouvellement égorgées plusieurs des malheureux
qu’il destinait à la mort ; d’autres furent déchirés, par des animaux, et
quelques-uns expirèrent sous des coups de massue. Pendant les trois années de
son règne, il dédaigna de visiter Rome ou l’Italie. Des circonstances
particulières l’avaient obligé de transporter son armée des rives du Rhin aux
bords du Danube. Son camp était le siége de cet affreux despotisme qui,
ouvertement soutenu par la puissance terrible de l’épée, foulait aux pieds les
lois et l’équité [582] .
Il ne souffrait auprès de lui aucun homme d’une naissance illustre, ou qui fut
connu par des qualités éminentes ou par des talents pour l’administration. La
cour d’un empereur romain retraçait l’image de ces anciens chefs d’esclaves ou
de gladiateurs, dont le souvenir inspirait encore la terreur, et dont on ne se
rappelait qu’en frémissant la puissance formidable.
    Tant que la cruauté Maximin ne frappa que des sénateurs
illustres, ou même ces hardis aventuriers qui s’exposaient, à la cour ou à
l’armée, aux caprices de la fortune, le peuple contempla ces scènes sanglantes,
avec indifférence, et peut-être avec plaisir. Mais l’avarice du tyran, irritée
par les désirs insatiables des soldats, attaqua enfin les propriétés publiques.
Chaque ville possédait un revenu indépendant, destiné à des achats de blé pour
la multitude, et aux dépenses qu’exigeaient les jeux et les spectacles : un
seul acte d’autorité confisqua en un moment toutes ces richesses au profit de
l’empereur. Les temples furent dépouillés des offrandes en or et en argent, que
la superstition y avait consacrées depuis tant de siècles ; et les statues
élevées en l’honneur des dieux, des héros et des souverains, servirent à
frapper de nouvelles espèces. Ces ordres impies ne pouvaient être exécutés,
sans donner lieu à des soulèvements et à des massacres. En plusieurs endroits,
le peuple aima mieux mourir pour ses autels, que de voir, dans le sein de la
paix, ses villes exposées aux déprédations et à toutes les horreurs de la
guerre. Les soldats eux-mêmes, qui partageaient ces dépouilles sacrées,
rougissaient de les recevoir. Quoique endurcis à la violence, ils redoutaient
les justes reproches de leurs parents et de leurs amis. Il s’éleva dans tout
l’univers romain un cri général d’indignation, qui appelait la vengeance sur la
tête de l’ennemi commun du genre humain ; enfin, un acte particulier
d’oppression souleva contre lui les habitants d’une province jusqu’alors
tranquille et désarmée [583] .
    L’intendant de l’Afrique était le digne ministre d’un maître
qui regardait les amendes et les confiscations comme une des branches les plus
considérables du revenu impérial. Une sentence inique avait été portée contré
quelques-uns des jeunes gens les plus riches de la contrée ; son exécution les
aurait dépouillés de la plus grande partie de leur patrimoine. Dans cette
extrémité, le désespoir leur inspire une résolution qui devait compléter ou
prévenir leur ruine. Après avoir obtenu trois jours avec beaucoup de difficultés,
ils profitent de ce délai pour faire venir de leurs terres et rassembler autour
d’eux, un grand nombre d’esclaves et de paysans armés de haches et de massues
et entièrement dévoués aux ordres de leurs seigneurs. Les chefs de

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