Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
Vom Netzwerk:
voulait assurer la fortune,
l’avaient engagé à laisser entre les mains de l’aîné de ses fils, les armées et
les provinces de l’Occident. La nouvelle qu’il reçut bientôt de la conduite de
Carin lui causa les regrets les plus vifs. Pénétré de douleur et de honte, le
vieil empereur ne cacha point la résolution où il était de satisfaire la
république par un acte sévère de justice, d’éloigner du trône un fils indigne
qui en dégradait la majesté, et d’adopter le brave et vertueux Constance, alors
gouverneur de la Dalmatie [1084] .
Mais l’élévation de cet illustre général fut différée pour quelque temps ;
et dès que Carin se trouva débarrassé, par la mort de son père, du frein de la
crainte ou de la décence, Rome gémit sous la tyrannie d’un monarque qui
joignait à la folie d’Élagabale la cruauté de Domitien [1085] .
    Le seul mérite que l’histoire ou la poésie ait remarqué dans
l’administration de Carin, fut la splendeur extraordinaire avec laquelle, en
son nom et au nom de son frère, il célébra les jeux du cirque et de
l’amphithéâtre. Plus de vingt ans après, lorsque les courtisans de Dioclétien
lui représentaient la gloire et l’affection des peuples que son prédécesseur
avait acquises par sa munificence, ce prince économe convenait que le règne de
Carin avait été en effet un règne de plaisir [1086] . Au reste,
cette vaine prodigalité, que pouvait dédaigner la prudence de Dioclétien,
excita la surprise et les transports du peuple. Les vieillards, se rappelant la
pompe triomphale de Probus, celle d’Aurélien et les jeux séculaires de
l’empereur Philippe, avouaient que ces fêtes brillantes étaient toutes
surpassées par la magnificence du fils de Carus [1087] .
    On peut se former une idée des spectacles de Carin, en
considérant quelques particularités que l’on trouve dans l’histoire concernant
les jeux donnés par ses prédécesseurs. Si nous nous bornons aux chasses de
bêtes sauvages, quelque blâmable que nous paraisse la vanité du dessein, ou la
cruauté de l’exécution, nous serons forcés de l’avouer, jamais, avant ni depuis
les Romains, l’art n’a fait des efforts si prodigieux ; jamais on n’a dépensé
des sommes si excessives pour l’amusement du peuple [1088] . Sous le règne
de Probus, de grands arbres transplantés au milieu du cirque, avec leurs
racines, formèrent une vaste forêt, qui fut tout à coup remplie de mille
autruches, de mille daims, de mille cerfs et de mille sangliers, et tout ce
gibier fut abandonné à l’impétuosité tumultueuse de la multitude. La tragédie
du jour suivant consista dans un massacre de cent lions, d’autant de lionnes,
de deux cents léopards, et de trois cents ours [1089] . Les animaux
que le jeune Gordien avait destinés à son triomphe, et qui parurent aux jeux
séculaires de son successeur, étaient moins remarquables par le nombre que par
la singularité. Vingt zèbres déployèrent aux yeux du peuple romain leurs formes
élégantes et la beauté de leur robe, brillante de différentes couleurs [1090] . Dix élans et
autant de girafes, les plus doux et les plus grands des animaux qui errent dans
les plaines de la Sarmatie et dans celles de l’Éthiopie, contrastaient avec
trente hyènes d’Afrique, et dix tigres de l’Inde, les créatures les plus
féroces de la zone torride. La force peu dangereuse dont la nature a doué les
plus grands des quadrupèdes, fut admirée dans le rhinocéros, dans l’hippopotame
du Nil [1091] ,
et dans une troupe majestueuse de trente-deux éléphants [1092] . Tandis que la
populace contemplait avec une surprise stupide ce magnifique spectacle, le
naturaliste pouvait observer la figure, et les caractères de tant d’espèces
différentes, transportées de toutes les parties de l’ancien continent dans
l’amphithéâtre de Rome. Mais cet avantage passager que la science tirait de la
folie, ne saurait certainement justifier un emploi si extravagant des richesses
de l’État. On trouvé pourtant dans l’histoire romaine une occasion, unique à la
vérité, où le sénat de Rome lia prudemment les jeux de la multitude avec les
intérêts de la république ; ce fut pendant la première guerre punique. Un
petit nombre d’esclaves, qui n’avaient pour armes que des javelines émoussées [1093] , donna la
chasse, au milieu du cirque, à une troupe considérable d’éléphants pris sur les
Carthaginois. Ce divertissement utile

Weitere Kostenlose Bücher