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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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motifs, soit d’orgueil, soit de politique, qui avaient engagé
Dioclétien à s’éloigner le premier de la capitale de l’empire, avaient acquis
un nouveau poids, par l’exemple de ses successeurs et quarante années
d’habitude. Rome se trouvait insensiblement confondue avec ces États soumis qui
avaient autrefois reconnu sa souveraineté ; et la patrie des Césars
n’inspirait qu’une froide indifférence à un prince guerrier, né sur lés rives du
Danube, élevé dans les cours ou dans les armées d’Asie, et revêtu de la pourpre
par les légions de la Bretagne. Les Italiens, qui avaient regardé Constantin
comme leur libérateur, obéirent avec soumission aux édits qu’il daigna
quelquefois adresser au sénat et au peuple de Rome ; mais ils eurent
rarement l’honneur de posséder leur souverain. Tant que la vigueur de son âge
le lui permit, Constantin selon les différents besoins de la paix ou de la
guerre, visita successivement les frontières de ses vastes États, soit avec une
lenteur pleine de dignité, soit avec l’appareil imposant de la rapidité la plus
active, et se tint toujours prêt à entrer en campagne contre ses ennemis
étrangers et domestiques. Mais enfin, parvenu au faîte de sa postérité et au
déclin de sa vie, il conçut le dessein de fixer dans une résidence moins
variable la force et la majesté du trône. Dans le choix d’une situation
avantageuse, il préféra les confins de l’Europe et de l’Asie, pour pouvoir
mieux assujettir sous son bras puissant les Barbares qui habitaient entre le
Danube et le Tanaïs et pour éclairer de plus près la conduite du roi de Perse,
qui supportait impatiemment le joug, que lui avait imposé un traité
ignominieux. Telles avaient été les vues de Dioclétien quand il avait choisi et
embelli le séjour de Nicomédie. Mais sa mémoire était justement odieuse au
protecteur de l’Église, et Constantin n’était pas insensible à l’ambition de
fonder une ville qui pût perpétuer la gloire de son nom. Pendant les dernières
opérations de la guerre contre Licinius, il avait eu souvent l’occasion
d’observer, comme capitaine et comme homme d’État, l’incomparable position de
Byzance, et de remarquer combien la nature, en la mettant à l’abri d’une
attaque étrangère, lui avait prodigué de moyens pour faciliter et encourager un
commerce immense. Plusieurs siècles avant Constantin, un des plus judicieux
écrivains de l’antiquité [1772] avait décrit les avantages de cette situation, qui avait donné l’empire des
mers à une faible colonie sortie de la Grèce, et en avait fait cette république
indépendante et florissante [1773] .
    Si nous considérons Byzance dans toute l’étendue qu’elle
acquit avec l’auguste nom de Constantinople, nous pouvons nous la représenter
comme un triangle inégal. L’angle obtus qui s’avance vers l’orient et vers les
rives de l’Asie, est battu par les vagues du Bosphore de Thrace. Le nord de la
ville est borné par le port, et le sud est baigné par la Propontide ou la mer
de Marmara. La base du triangle regarde l’occident, et termine le continent de l’Europe.
Mais il est nécessaire d’entrer ici dans une description plus détaillée pour
faire comprendre la structure géographique et la situation respective des mers
et des terres qui forment ce port incomparable.
    Le canal tortueux  à travers lequel les eaux du Pont-Euxin
s’écoulent avec une constante rapidité vers la mer Méditerranée, reçut le nom
de Bosphore, aussi célèbre dans l’histoire que dans les fables de l’antiquité [1774] . Une foule de
temples et d’autels expiatoires, semés avec profusion sur ses rochers et sur
ses bards, attestaient les terreurs, l’ignorance et la dévotion des navigateurs
de la Grèce, qui, à l’exemple des Argonautes, allaient à la découverte des
routes dangereuses du Pont-Euxin et de ses rives inhospitalières. La tradition
a longtemps conservé la mémoire du palais de Phinée, infesté par les
dégoûtantes harpies [1775]  ;
et celle du règne d’Amycus le Sylvain [1776] ,
qui proposa le combat du ceste au fils de Léda [1777] . Le détroit du
Bosphore est terminé par les roches Cyanées, qui, selon les poètes, flottaient
autrefois sur les eaux et avaient été destinées par les dieux à défendre
l’entrée de l’Euxin contre la curiosité des profanes [1778] . Depuis les
roches Cyanées jusqu’à la pointe et au port de Byzance, la longueur

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