Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain
:
c’est dans ces volumes que se trouve à peu prés tout ce qui concerne le
christianisme ; c’est là aussi que l’on voit ce passage du monde ancien au
monde moderne, des mœurs et des idées de l’Europe romaine à celles de notre
Europe, qui forme l’époque la plus intéressante et la plus importante à
éclaircir de l’ouvrage entier. D’ailleurs les temps postérieurs ont été traités
avec soin par un grand nombre d’écrivains ; aussi les notes que j’ai
ajoutées aux volumes suivants sont-elles rares et peu développées. C’est déjà
trop peut-être ; cependant je puis assurer que je me suis sévèrement
imposé la loi de ne dire que ce qui me paraissait nécessaire, et de le dire,
aussi brièvement que je le trouvais possible.
On a beaucoup écrit sur et contre Gibbon : dés que son
ouvrage parut, il fut commenté comme l’aurait été un manuscrit ancien ; à
la vérité les commentaires étaient des critiques. Les théologiens surtout
avaient à se plaindre de la manière dont y était traitée l’histoire
ecclésiastique ; ils attaquèrent les chapitres XV et XVI, quelquefois avec
raison, souvent avec amertume, presque toujours avec des armes inférieures à
celles de leur adversaire, qui possédait et plus de connaissances et plus de
lumières et plus d’esprit, autant du moins que j’en puis juger par ceux de
leurs travaux que j’ai été à portée d’examiner. Le docteur R. Watson, depuis
évêque de Landaff, publia une série de Lettres ou Apologie du
Christianisme , dont la modération et le mérite sont reconnus par Gibbon
lui-même [1] .
Priestley écrivit une Lettre à un incrédule philosophe, contenant un tableau
des preuves de la religion révélée, avec des observations sur les deux premiers
volumes de M. Gibbon . Le docteur White, dans une suite de sermons dont le
docteur S. Badcock fut, dit-on, le véritable auteur, et dont M. White ne fit
que fournir les matériaux, traça un tableau comparatif de la religion
chrétienne et du mahométisme (1 re éd., 1784, in-8°), où il combattit
souvent Gibbon, et dont Gibbon lui-même a parlé avec estime (dans les Mémoires
de sa vie , p. 167 du 1 er vol. des Œuvres Mêlées , et dans
ses Lettres , n os 82, 83, etc.). Ces trois adversaires sont
les plus recommandables de ceux qui ont attaqué notre historien : une
foule d’autres écrivains se joignirent à eux. Sir David Dalrimple, le docteur
Chelsum, chapelain de l’évêque de Worcester [2] ;
M. Davis, membre du collège de Bailleul, à Oxford ; M. East Apthorp,
recteur de Saint-Mary-le-Bow , à Londres [3] ; J. Beaitie, M. J. Milner, M. Taylor, M. Travis, prébendaire de Chester et
vicaire d’Eastham [4] ; le docteur Whitaker, un anonyme qui ne prit que le nom de l’ anonymous
gentleman ; K. H. Kett [5] ,
etc., etc., prirent parti contre le nouvel historien ; il répondit à
quelques-uns d’entre eux par une brochure intitulée : Défense de quelques
passages des chapitres XV et XVI de l’Histoire de la Décadence et de la Chute
de l’Empire romain [6] .
Cette défense, victorieuse sur quelques points, faible sur d’autres, mais d’une
extrême amertume, décela toute l’humeur que les attaques avaient causée à
Gibbon, et cette humeur indiquait peut-être qu’il ne se sentait pas tout à fait
irréprochable : cependant il ne changea rien à ses opinions dans le reste de
l’ouvrage; ce qui prouve du moins sa bonne foi.
Quelques peines que je me sois données, je n’ai pu me
procurer qu’une bien petite partie de ces ouvrages : ceux du docteur Chelsum,
de. M. Davis, de M. Travis et de l’anonyme, sont les seuls que j’aie été à
portée de lire ; j’en ai tiré quelques observations intéressantes, et
quand je n’ai pu ni les étendre ni les appuyer sur de plus fortes autorités,
j’ai indiqué à qui je les devais.
Ce n’est pas seulement en Angleterre que Gibbon a été
commenté ; F. A. G. Wenck, Professeur de droit à Leipzig, savant très
estimable, en entreprit une traduction allemande, dont le premier volume parut
à Leipzig, en 1779, et y ajouta des notes pleines d’une érudition non moins
vaste qu’exacte ; j’en ai tiré un grand parti : malheureusement M. Wenck
ne continua pas son entreprise ; les volumes suivants ont été traduits par
M. Schreiter, professeur à Leipzig, qui n’y a joint qu’un très petit nombre de
notes assez insignifiantes. M. Wenck annonçait dans sa préface qu’il publierait
des
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