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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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courses, il se retirait précipitamment
avec l’impatience d’un philosophe qui regardait comme perdus tous les moments
qu’il n’employait pas au bien public ou à la culture de son esprit [2531] . Par cette
sévère économie de temps, il allongea en quelque façon la courte durée de son
règne ; et, si les dates étaient moins certaines, nous ne pourrions pas croire
qu’il ne s’est passé que seize mois entre la mort de Constance et le départ de
son successeur pour la guerre de Perse. L’histoire ne peut conserver que le
souvenir de ses actions ; mais ce qui existe encore de ses volumineux écrits
atteste son application et l’étendue de son génie. Le Misopogon, les Césars,
plusieurs de ses discours, et son ouvrage savant et rédigé avec soin contre la
religion chrétienne, furent composés pendant les longues nuits de deux hivers,
dont il passa le premier à Constantinople, et l’autre à Antioche.
    La réforme de la cour impériale fut un des premiers actes et
des plus nécessaires du gouvernement de Julien [2532] . Peu après son
entrée dans le palais de Constantinople, il eut besoin du service d’un barbier.
Un officier magnifiquement vêtu se présenta respectueusement. C’est un
barbier que je demande , s’écria le prince avec une feinte surprise, et
non pas un receveur général des finances [2533] . Il lui demanda
en quoi consistaient les profits de son emploi, et il apprit qu’en outre d’un
salaire et de quelques profits considérables, le’ barbier avait encore la
subsistance ale vingt valets et d’autant de chevaux. L’abus d’un luxe mutile et
ridicule avait créé mille charges de barbiers, mille chefs de gobelets, mille
cuisiniers et le nombre des eunuques ne pouvait se comparer qu’à celui des
insectes dans un jour d’été [2534] .
Le monarque, qui cédait volontiers à ses sujets la supériorité de mérite et de
vertu, se distinguait par la désastreuse magnificence de ses habits, de sa
table, de ses bâtiments et de sa suite. Les palais construits par Constantin et
par ses fils étaient décorés d’un grand nombre de marbres colorés et
d’ornements d’or massif. Les jouissances de la sensualité la plus raffinée
étaient rassemblées moins pour satisfaire leur goût que leur vanité : des
oiseaux des climats les plus éloignés, des poissons à l’extrémité des mers, des
fruits hors de leur saison, des roses d’hiver et des neiges dans la canicule [2535] . La dépense de
cette multitude de domestiques du palais surpassait celle des légions : et il
n’y en avait qu’une faible partie qui servit à l’utilité ou même à la splendeur
du trône. La plupart de ces charges vénales et obscures, la honte du prince et
la ruine des peuples, n’étaient qu’honorifiques, et les plus vils de la nation
pouvaient acheter avec leur argent le droit de vivre dans l’aisance et dans
l’oisiveté, aux dépens du revenu public. Le pillage d’une énorme maison, les
suppléments de profits et de gratifications bientôt réclamés comme un droit, et
les dons qu’ils arrachaient également de ceux qui craignaient leur haine et de
ceux qui réclamaient leur faveur, enrichissaient promptement ces valets audacieux.
Ils dissipaient leurs richesses sans réfléchir à la misère dont ils venaient de
sortir, et dans laquelle ils pouvaient encore retomber, et l’excès de leurs
rapines et de leur vénalité ne pouvait se, comparer qu’à l’extravagance de
leurs dissipations. Ils portaient des robes de soie brodées d’or à leurs tables
étaient servies avec délicatesse et profusion ; les maisons construites pour
leur servir d’habitation occupaient plus de terrain que le patrimoine d’un
ancien consul ; et les citoyens les plus distingués étaient forcés de descendre
de leurs chevaux pour saluer respectueusement un eunuque qu’ils rencontraient
sur les grands chemins. Le luxe du palais excita le mépris et l’indignation de
Julien, qui couchait habituellement sur le plancher, qui s’accordait à peine
les premières nécessités de la vie, et qui plaçait sa vanité, non pas dans
l’imitation, mais dans le mépris du faste de la royauté. Il était impatient que
la suppression totale d’un abus dont l’opinion publique exagérait encore
l’étendue, diminuât les impôts et apaisât les murmures des peuplés, qui
supportent, plus docilement le poids des taxes quand ils sont convaincus que le
fruit de leur industrie est appliqué au service de l’État.

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