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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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troupes dans la ville. On ouvrit les tranchées à une distance
considérable, sous la direction de Nevitta et de Dagalaiphus, et on les
conduisit peu à peu jusqu’au bord du fossé. On combla ce fossé en peu de temps,
et, parle travail infatigable des soldats, en conduisit jusque sous les murs de
la ville une mine où l’on avait placé de distance en distance des poutres pour
empêcher le terrain de s’ébouler. Les soldats de trois cohortes choisies
traversèrent, un a un et sans bruit, cet obscur et dangereux passage ; et leur
intrépide chef fit avertir l’empereur qu’ils allaient déboucher dans la place
ennemie. Julien réprima leur ardeur, afin d’assurer leur succès ; et, sans
perdre un instant, il détourna l’attention des assiégés par le tumulte et les
cris d’un assaut général. Les Perses, qui du haut de leurs murs voyaient avec
dédain les efforts impuissants des assiégeants, chantaient en triomphe la
gloire de Sapor, et ils ne craignirent pas d’assurer l’empereur qu’il monterait
à la demeure étoilée d’Ormuzd, avant de se rendre maître de l’imprenable
Maogamalcha. En ce moment la place était déjà prise. L’histoire nous a transmis
le nom d’un simple soldat qui, sortant de la mine, monta le premier dans une
tour, où il ne rencontra personne. Ses camarades se précipitèrent avec une
valeur impatiente, et agrandirent l’ouverture : quinze cents Romains se
trouvaient au milieu de la ville. La garnison étonnée abandonna les murs, et ne
conserva plus l’espoir de se défendre. Bientôt on enfonça les portes ; les
troupes massacrèrent indistinctement quiconque leur tomba sous la main, et la
débauche et la cupidité suspendirent seules la vengeance. Le gouverneur qui
avait mis bas les armes sur une promesse de pardon, fût brûlé vif, quelques
jours après, pour avoir, disait-on, tenu quelques propos peu respectueux contre
le prince Hormisdas. On rasa les fortifications, et on ne laissa pas un seul
vestige qui pût rappeler l’existence de Maogamalcha. Trois immenses palais, où
l’on avait rassemblé avec peine tout ce qui pouvait satisfaire le luxe et
l’orgueil d’un monarque d’Orient, embellissaient les environs de la capitale de
la Perse. Des fleurs, des fontaines, disposées symétriquement selon le goût des
Perses, ornaient les jardins placés, dans une situation charmante, sur les
bords du Tigre ; et de grands parcs, enclos de murs, renfermaient des ours, des
lions et des sangliers qu’on entretenait à grands frais pour les plaisirs du
roi. Par l’ordre de l’empereur, on abattit les murs de ces parcs, on livra les
animaux aux traits des soldats, et on réduisit en cendres les palais de Sapor.
Julien ne connaissait pas, ou ne voulut point observer ici ces égards que la
prudence et la civilisation ont établis de nos jours entre les ennemis. Au
reste, ces inutiles ravages ne doivent pas exciter dans nos cœurs un sentiment
bien vif d’indignation ou de pitié : une simple statue, fruit des talents d’un
artiste grec, est plus réellement précieuse que ce l’étaient ces monuments
grossiers et dispendieux de l’art des Barbares ; et si la ruine d’un palais
nous affecte plus que l’incendie d’une chaumière, notre humanité s’est fait une
bien fausse idée des vraies misères de la vie humaine [2760] .
    Julien était un objet de terreur et de haine pour les
Persans, et les peintres de cette nation le représentaient sous l’emblème d’un
lion furieux, qui vomit de sa bouche un feu dévorant [2761] . Le héros
philosophe paraissait sous un jour plus favorable aux yeux de ses amis et de
ses soldats, et jamais ses vertus ne se montrèrent mieux que dans cette
dernière période, la plus active de sa vie. Il suivait, sans effort et presque
sans mérite, les lois de la tempérance et de la sobriété. Fidèle aux principes
de cette sagesse raisonnée qui exerce un empire absolu sur l’esprit et le
corps, il ne se permettait pas la moindre indulgence pour ses penchants les
plus naturels [2762] .
Dans ces climats dont la chaleur commande aux voluptueux Assyriens la
jouissance de tous les plaisirs des sens [2763] ,
le jeune conquérant conseilla une chasteté pure et sans tache. Ses belles
captives [2764] ,
loin de résister à ses fantaisies, se seraient disputé l’honneur de ses
caresses : il n’eut pas même la curiosité de les voir. Il soutint les travaux
de la guerre avec la même fermeté qu’il opposait aux charmes de

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