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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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courage pour repousser
l’ennemi de leur pays ; ils se bornèrent à lui demander la permission de s’en
servir : ils dirent qu’après avoir assure leur indépendance, ils viendraient
implorer la faveur d’être admis de nouveau au rang de ses sujets. Leurs
raisons, leur éloquence, leurs larmes, ne purent rien obtenir. Jovien fit
valoir, en rougissant, la sainteté des serments ; et la répugnance avec
laquelle il avait accepté d’eux le présent d’une couronne d’or, ne leur
laissant plus d’espoir, Sylvanus, l’un des orateurs du peuple, s’écria indigné
: Empereur, puissiez-vous être ainsi couronné par toutes les villes de vos
domaines ! Jovien, qui en peu de semaines avait déjà pris les habitudes
d’un prince [2827] ,
fut choqué de la hardiesse et de la vérité du propos ; et comme il voyait que
le mécontentement des habitants pourrait bien les porter à se soumettre au roi
de Perse, un édit leur ordonna, sous peine de mort, de sortir de la ville dans
trois jours. Ammien a peint avec énergie la désolation générale, qui paraît
avoir excité en lui une vive compassion [2828] .
La belliqueuse jeunesse de Nisibis abandonna, avec une indignation douloureuse,
des murs qu’elle avait si glorieusement défendus ; des parents en deuil
versaient une dernière larme sur la tombe d’un fils ou d’un mari, qui allait
être profanée par la main grossière des Barbares ; et le vieillard baisait le
seuil, s’attachait aux portes de la maison où il avait passé les jours
tranquilles et fortunés de son enfance. Une multitude effrayée remplissait les
grands chemins ; les distinctions de rang, de sexe et d’âge, s’évanouissaient
au milieu de la consternation générale. Chacun s’efforçait d’emporter quelques
débris du naufrage de sa fortune ; et, ne pouvant se procurer sur-le-champ un
nombre suffisant de chevaux et de chariots, ils étaient réduits à laisser la
plus grande partie de leurs richesses. Il paraît que le barbare insensibilité
de Jovien aggrava les peines de ces infortunés. On les établit cependant dans
un quartier d’Amida, nouvellement reconstruit ; et, augmentée d’une colonie
aussi considérable, cette ville, qui commençait à se relever, recouvra bientôt
son antique splendeur, et devint la capitale de la Mésopotamie [2829] . L’empereur
expédia des ordres pareils pour l’évacuation de Singara, du château des Maures,
et pour la restitution des cinq provinces situées au-delà du Tigre. Sapor goûta
pleinement la gloire et les fruits de sa victoire, et cette paix ignominieuse a
été regardée, avec raison, comme une époque mémorable dans la décadence et la
chute de l’empire romain. Les prédécesseurs de Jovien avaient quelquefois
renoncé à des provinces éloignées et peu utiles ; mais depuis la fondation de
Rome, le génie de cette ville, le dieu Terme, qui gardait les bornes de la
république, n’avait jamais reculé devant le glaive d’un ennemi victorieux [2830] .
    Lorsque Jovien eut rempli ce traité, que les cris de son
peuple auraient pu lui donner le désir d’enfreindre, il s’éloigna de la scène de
son déshonneur, et alla avec toute sa cour jouir des plaisirs d’Antioche [2831] . Il n’écouta
point les inspirations du fanatisme religieux, et l’humanité ainsi que la
reconnaissance l’engagèrent à rendre les derniers honneurs à son souverain [2832] ; mais, sous le
prétexte de charger des funérailles Procope, qui déplorait de bonne foi la mort
de l’empereur, on lui ôta le commandement de l’armée. Le corps de Julien fut
transporté de Nisibis à Tarse. Le convoi, qui marchait lentement, employa
quinze jours à faire ce chemin ; et, lorsqu’il traversa les villes de l’Orient,
les diverses factions l’accueillirent ou par des cris de douleur, ou par des
outrages. Les païens plaçaient déjà leur héros bien-aimé au rang de ces dieux
dont il avait rétabli le culte ; tandis que les chrétiens précipitaient son âme
aux enfers et poursuivaient son corps jusque dans la tombe [2833] . Un parti
déplorait la ruine prochaine du paganisme, et l’autre célébrait la délivrance
miraculeuse de l’Église. Les chrétiens applaudissaient en termes pompeux et
ambigus à la vengeance céleste suspendue si longtemps sur la tête coupable de
Julien. Ils affirmaient qu’au moment où le tyran expira au-delà du Tigre, sa
mort fut révélée aux saints de l’Égypte, de la Syrie et de la Cappadoce [2834] ; et, au

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