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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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servir d’encouragement ou
d’avertissement au reste de l’armée. Ils traversèrent le Tigre à la nage dans
le silence de la nuit ; ils surprirent un poste de l’ennemi, mal gardé, et au
point du jour ils arborèrent le signal, preuve de leur courage et de leur
succès. Cette épreuve disposa l’empereur à écouter ses ingénieurs, qui promirent
de construire, avec des peaux de moutons, de bœufs et de chèvres, cousues et
remplies de vent, un pont flottant, qu’ils couvriraient de terre et de fascines [2810] . On employa
vainement à ce travail deux jours bien importants dans la situation de l’armée
; et les légions, qui déjà manquaient de vivres, jetèrent un regard de
désespoir sur le fleuve et sur des Barbares, dont le nombre et l’acharnement
augmentaient en proportion de la détresse de l’armée impériale [2811] .
    Dans cette affreuse situation, des bruits de paix ranimèrent
l’espoir des Romains. Quelques moments avaient fait évanouir la présomption de
Sapor ; il remarquait avec douleur qu’une suite de combats lui avait enlevé
ceux de ses nobles qui se distinguaient le plus par leur fidélité et leur valeur,
ses plus braves soldats, et la plus grande partie de ses éléphants. Ce monarque
expérimenté craignit de provoquer le désespoir de l’ennemi, les vicissitudes de
la fortune, et les forces encore entières de l’empire romain, qui ne
tarderaient peut-être pas à secourir ou à. venger le successeur de Julien. Le
Surenas lui-même, accompagné d’un autre satrape, arriva au camp de l’empereur [2812] , et déclara que
la clémence de sort maître voulait bien annoncer à quelles conditions il
consentait à épargner et à renvoyer l’empereur avec les restes de son armée
captive. La fermeté des Romains se laissa séduire par l’espérance du salut.
L’avis du conseil et les cris des soldats obligèrent Jovien à recevoir la paix
qui lui était offerte, et le préfet Salluste fut envoyé sur-le-champ, avec le
général Arinthæus, pour savoir les intentions du grand roi. Le rusé Persan
renvoya, sous différents prétextes, la conclusion du traité ; il éleva des
difficultés, demanda des éclaircissements, suggéra des moyens, revint sur ce
qu’il avait promis, forma de nouvelles prétentions, et employa en négociations
quatre jours, pendant lesquels les Romains achevèrent de consommer lé peu de
vivres qui restait dans leur camp. Si Jovien avait été capable d’exécuter un
projet hardi et prudent, il aurait sans relâche continué sa marche ; la
négociation du traité aurait suspendu les attaques des Persans, et avant la fin
du quatrième jour, il serait arrivé sain et sauf dans la fertile province de
Corduène, qui n’était éloignée que de cent milles [2813] . Ce prince irrésolu,
au lieu de rompre les lacs dont cherchait à l’envelopper l’ennemi, attendit son
sort avec résignation, et accepta les humiliantes conditions d’une pais qu’il
n’était plus en son pouvoir de refuser. Les cinq provinces au-delà du Tigre,
cédées aux Romains par le grand-père de Sapor, furent rendues au monarque
persan ; il acquit, par un seul article du traité, l’importante ville de
Nisibis, qui, durant trois sièges consécutifs, avait bravé l’effort de ses
armes ; Singara, et le château des Maures, l’une des plus fortes places de la
Mésopotamie, furent également détachées de l’empire en sa faveur. La permission
qu’il accorda aux habitants de se retirer avec leurs effets fut regardée comme
une grâce, mais il exigea que les Romains abandonnassent à jamais le roi et le
royaume d’Arménie. Les deux nations ennemies signèrent une paix, ou plutôt une
trêve de trente années. Le traité fut accompagné de serments solennels et de
cérémonies religieuses ; et de part et d’autre on livra des otages d’un rang
distingué [2814] .
    Le sophiste d’Antioche, indigné de voir le sceptre de son
héros dans la faible main d’an prince disciple du christianisme, semble admirer
la modération de Sapor qui se contenta d’une si petite portion de l’empire
romain. S’il eût porté ses prétentions jusqu’à l’Euphrate, sûrement, dit
Libanius, il n’eût pas essuyé de refus ; s’il eût exigé que l’Oronte, le
Cydnus, le Sangarius, ou même le Bosphore de Thrace, servissent de bornes au
royaume de Perse, la cour de Jovien n’aurait pas manqué de flatteurs qui se
seraient empressés de convaincre le timide empereur que le reste de

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