Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain
différents sujets
géologiques, une explication complète des psaumes et des évangiles, et une
grande quantité d’épîtres et d’homélies [3839] .
Au jugement des critiques les plus judicieux, l’érudition superficielle de
saint Augustin se bornait à la connaissance de la langue latine [3840] . Son style,
quoique animé quelquefois par l’éloquence de la passion, est ordinairement gâté
par un goût faux et une vaine affectation de rhétorique ; mais il possédait un
esprit vaste, vigoureux, et doué d’une grande puissance de raisonnement. Il a
sondé d’une main hardie les abîmes obscurs de la grâce, de la prédestination,
du libre arbitre et du péché originel. L’Église latine [3841] a prodigué des
applaudissements, peut-être peu sincères au système de christianisme rigide
qu’il a institué ou rétabli [3842] ,
et qu’elle a conservé jusqu’à nos jours.
L’intelligence de Boniface ou l’ignorance des Vandales fit
traîner le siége d’Hippone durant quatorze mois. La mer était toujours libre ;
et lorsque les environs eurent été épuisés par le brigandage des Vandales, la
famine força les assiégeants d’abandonner leur entreprise. La régente de
l’Occident sentait vivement l’importance et le danger de l’Afrique ;
Placidie implora le secours de Théodose, et Aspar amena de Constantinople un
puissant secours de troupes et de vaisseaux. Dès que les forces des deux
empires furent réunies sous les ordres de Boniface, ce général marcha hardiment
à la rencontre des Vandales, et la perte d’une seconde bataille confirma
irrévocablement la perte de l’Afrique. Boniface s’embarqua avec la
précipitation du désespoir, et les habitants d’Hippone obtinrent la permission
d’occuper dans les vaisseaux la place des soldats, la plupart tués ou faits
prisonniers par les Vandales. Le comte dont la fatale crédulité avait fait une
plaie incurable à sa patrie, se présenta sans doute devant sa souveraine avec
une inquiétude que dissipa bientôt le sourire de Placidie. Boniface accepta
avec reconnaissance le rang de patrice et celui de maître général ales armées
romaines ; mais il devait rougir en voyant les médailles où il est représenté
avec les attributs de la victoire [3843] .
Aussi orgueilleux que perfide, Ætius ne put voir sans colère la découverte de
sa trahison, le ressentiment de l’impératrice et la faveur dont jouissait son
rival. Il revint précipitamment de la Gaule en Italie avec une suite ou plutôt
une armée de Barbares ; et telle était la faiblesse du gouvernement, que les
deux généraux décidèrent leur querelle particulière dans une bataillé
sanglante. Boniface remporta la victoire et perdit la vie ; il revint
mortellement blessé de la main d’Ætius, et ne vécut que peu de jours. Il poussa
les sentiments de la charité chrétienne dans ses derniers moments, jusqu’à
presser sa femme, riche héritière d’Espagne, d’accepter Ætius pour son second
mari ; mais Ætius ne tira pas alors grand avantage de la générosité de son
ennemi : Placidie le fit déclarer rebelle. Après avoir inutilement essayé de se
défendre dans les forteresses qu’il avait construites dans ses domaines, il se
retira en Pannonie, dans le camp de ses fidèles Huns ; et l’empire d’Orient
perdit, par leur discorde, le secours de ses deux plus braves généraux [3844] .
On pourrait naturellement imaginer qu’après la retraite de
Boniface, les Vandales achevèrent sans obstacle et sans délai la conquête de
l’Afrique. Cependant huit années s’écoulèrent depuis l’évacuation d’Hippone
jusqu’à la réduction de Carthage. Daris cet intervalle l’ambitieux Genseric, en
apparence au faîte de la prospérité, négocia un traité de paix par lequel il
donna son fils Hunneric pour otage et consentit à laisser l’empereur d’Occident
paisible possesseur des trois Mauritanies [3845] .
Ne pouvant pas faire honneur de cette modération à l’équité du conquérant, on
ne doit l’attribuer qu’à sa politique. Genseric était environné d’ennemis
personnels qui méprisaient la bassesse de sa naissance et reconnaissaient les
droits légitimes de ses neveux, les fils de Gonderic. L’usurpateur sacrifia la
vie de ses neveux à sa propre sûreté, et fit précipiter leur mère, la veuve du
roi défunt, d’ans la rivière d’Ampsague ; mais le ressentiment public se
manifestait par des conspirations fréquentés, et le tyran est accusé
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