Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
Vom Netzwerk:
ceux qui se refusèrent aux conditions
ignominieuses prescrites par un tyran arien, et que l’honneur ainsi que la
religion leur défendaient d’accepter, furent condamnés à quitter leur patrie
pour toujours. Rome, l’Italie et les provinces d’Orient se remplirent d’une
foule de fugitifs, d’exilés et d’illustres captifs qui sollicitaient la
compassion publique, et les Épîtres du sensible Théodoret ont fait passer
jusqu’à nous les noms de Célestien et de Marie [3853] . L’évêque de
Syrie déplore les malheurs de Célestien, noble Carthaginois qui, dépouillé du
rang de sénateur et d’une fortune considérable, se voyait réduit, avec sa
femme, ses enfants et ses domestiques, à mendier son pain dans un pays étranger
; mais il applaudit à la pieuse résignation de cet exilé chrétien, et à son
caractère philosophique, qui lui conservait, au milieu de ses infortunes, un
bonheur plus réel que celui dont on jouit d’ordinaire au sein de la
-prospérité. L’histoire de Marie, fille du magnifique Eudemon, est intéressante
et singulière. Dans le sac de Carthage, les Vandales la vendirent à des
marchands de Syrie, qui la revendirent dans leur pays. Une des servantes de
Marie, prise et vendue avec elle à Carthage, se trouvait sur le même vaisseau,
et fut achetée par le même maître en Syrie. Toujours également respectueuse
pour une maîtresse que le sort condamnait à partager son esclavage, elle lui
continua, par attachement, les soins qu’elle lui avait rendus précédemment par
obéissance. Cette conduite fit connaître le rang de Marie ; et, dans l’absence
de l’évêque de Cyrrhe, elle dut sa délivrance à la générosité de quelques
soldats de la garnison. A son retour, Théodoret fournit libéralement à son
entretien. Marie, après avoir passé dix mois parmi les chanoinesses de l’Église
; apprit que son père, heureusement échappé du massacre de Carthage, exerçait
un emploi honorable dans une des provinces de l’Occident. Le prince évêque
seconda l’impatience qu’elle avait de rejoindre Eudemon ; et dans une lettre
qui existe encore, il la recommanda à l’évêque d’Ægæ, ville maritime de la
Cilicie, que les vaisseaux de l’Occident fréquentaient tous les ans durant la
foire. L’évêque de Cyrrhe pria son confrère de traiter Marie avec les égards
dus à sa naissante, et de ne la confier qu’à des marchands capables de regarder
comme un avantage suffisant le plaisir de rendre à un père affligé une fille
qu’il devait croire à jamais perdue.
    Parmi les insipides légendes de l’histoire ecclésiastique,
on remarque la fable mémorable des sept dormants [3854] , dont la date
imaginaire correspond au règne de Théodose le jeune et à la conquête de
l’Afrique par les Vandales [3855] .
Durant la persécution de l’empereur Dèce contre les chrétiens, sept jeunes
nobles d’Éphèse se cachèrent dans une caverne spacieuse creusée dans le flanc
d’une montagne voisine, dont le tyran, voulant les y faire périr, fit boucher
solidement l’entrée d’un monceau de grosses pierres. Ces jeunes gens tombèrent
sur-le-champ dans un profond sommeil, qui fut prolongé miraculeusement durant
une période de cent quatre-vingt-sept ans, sans produire aucune altération dans
les principes de la vie. Au bout de ce temps, les esclaves d’Adolius, alors
propriétaire de la montagne, enlevèrent les pierres pour les employer à la
construction de quelque bâtiment rustique. Dès que les rayons du soleil
pénétrèrent dans la caverne, les sept dormants s’éveillent persuadés que leur
sommeil n’avait été que de quelques heures. Pressés par la faim, ils résolurent
que Jamblichus, un des sept, retournerait secrètement à la ville afin d’y
acheter du pain pour ses camarades. Le jeune homme, si on peut l’appeler ainsi
ne reconnut point son pays natal, et sa surprise augmenta quand il vit une
grande croix élevée et triomphante sur la principale porte d’Éphèse. La
singularité de ses vêtements, son vieux langage, et, l’antique médaille de Dèce
qu’il offrait pour de la monnaie courante, parurent fort extraordinaires au
boulanger ; et Jamblichus, soupçonné d’avoir trouvé un trésor, fut traîné
devant le juge. Leurs questions mutuelles découvrirent la miraculeuse aventure,
et il parut constant qu’il s’était écoulé prés de deux cents ans depuis que
Jamblichus et ses compagnons avaient échappé à la rage du

Weitere Kostenlose Bücher