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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Edward Gibbon
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patience de pousser plus loin
son calcul. Les suites d’un ulcère [4206] à la cuisse abrégèrent la vie de Siméon Stylite, mais n’interrompirent point sa
singulière pénitence, et il mourut patiemment sans bouger de dessus sa colonne.
Un prince dont le caprice infligerait de pareilles tortures, passerait pour le
plus cruel des tyrans ; mais tout le pouvoir d’un tyran ne parviendrait pas à
prolonger par force la misérable existence de sa victime. Ce martyre volontaire
avait sans doute détruit peu à peu la sensibilité du corps et de l’âme ;
et l’on ne peut raisonnablement supposer que des fanatiques si cruels pour
eux-mêmes fussent susceptibles d’affection pour les autres. Une insensibilité
cruelle a été le caractère distinctif des moines dans tous les temps et dans
tous les pays ; mais leur âme froide et inaccessible au sentiment de l’amitié
s’enflammait aisément d’une haine religieuse, et l’office de la sainte
inquisition à servi à exercer leur zèle impitoyable.
    Cette sainteté monastique, qui excite la piété dédaigneuse
des philosophes, obtenait la vénération et presque l’adoration des peuples et des
souverains. Des foules de pèlerins venaient de la Gaule et des Indes se
prosterner devant le pilier de saint Siméon. Des tribus de Sarrasins se
disputaient les armes à la main l’honneur de sa bénédiction ; les renies de
Perse et d’Arabie rendaient hommage à ses vertus surnaturelles ; et le jeune
Théodose consulta le pieux ermite sur les affaires les plus importantes de
l’État et de l’Église. Le patriarche et le maître général de l’Orient, six
évêques, vingt et un comtes ou tribuns, et six mille soldats, transportèrent
processionnellement les restes de saint Siméon de la montagne de Télénisse dans
la ville d’Antioche qui révéra comme son plus glorieux ornement et sa plus sûre
défense. Les anachorètes éclipsèrent peu à peu la renommée des apôtres et des martyrs
; le monde chrétien se prosterna devant leurs reliques, et les miracles
attribués à leurs précieux restes surpassèrent en nombre et en durée les
exploits spirituels de leurs vies ; mais la politique ou la crédulité de leurs
confrères ont fort embelli les légendes dorées où sont contenues les histoires
de leurs vies [4207] ; et les peuples d’un siècle non moins crédule se sont persuadé facilement que
la volonté d’un moine d’Égypte ou de Syrie suffisait pour interrompre l’ordre
éternel de l’univers. Ces favoris du ciel était accoutumés à guérir les malades
les plus désespérés en les touchant de la main, quelquefois même d’une parole,
ou par un message, lorsqu’ils se trouvaient trop éloignes. Ils forçaient les
démons les plus opiniâtres à sortir ou des âmes ou des corps dont ils s’étaient
emparés ; les lions et les serpents du désert s’en laissaient approcher
familièrement et se soumettaient à leurs ordres suprêmes. Ils faisaient
renaître la végétation dans un tronc dépouillé de sève, faisaient nager le feu
sur la surface des eaux. Ces contes extravagants, qui offraient les fictions de
la poésie sans briller de son génie, ont trop sérieusement influé sur la
raison, la foi et la morale des chrétiens. Leur crédulité dégradait les
facultés de leur esprit ; ils falsifiaient le témoignage de l’histone, et
les erreurs de la superstition éteignaient peu à peu les dangereuses lumières
de la science et de la philosophie. La révélation divine vint à l’appui de tous
les cultes religieux pratiqués par les saints,  de toutes les doctrines
mystérieuses qu’ils avaient adoptées, et le règne avilissant des moines acheva
d’étouffer toute vertu noble et courageuse. S’il était possible de mesurer
l’intervalle entre les écrits philosophiques de Cicéron et la légende de
Théodoret, entre le caractère de Caton et celui de saint Siméon Stylite, nous
apprécierions peut-être la révolution qu’éprouva l’empire romain dans une
période de cinq cents ans.
    II . Le christianisme remporta successivement deux
victoires glorieuses et décisives ; la première sur les citoyens civilisés
de l’empire romain, et l’autre sur les Barbares de la Scythie et de la
Germanie, qui renversèrent l’empire et embrassèrent la religion de Rome. Parmi
les sauvages prosélytes, les Goths furent ceux qui donnèrent l’exemple ; et la
nation fut redevable de sa conversion à un compatriote ou sujet digne

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