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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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choses qui échappe à la compétence du physicien. Carnéade, pas plus qu ’ Arcésilas, n ’ est, comme Pyrrhon, un désespéré  ; mais ils ont le sentiment d ’ un univers plus profond et plus complexe que celui que prétendait atteindre d ’ un coup le rationalisme stoïcien.
    Carnéade enfin prépare aussi le développement de la morale, en montrant que la théorie stoïcienne des préférables aboutit à des conséquences très voisines des thèses que Platoniciens et Péripatéticiens s ’ accordent à admettre  ; car leur principe de choix entre les actions est le même  [554] .
    Le rôle de Clitomaque fut surtout de maintenir dans sa pureté la pensée de Carnéade. Stobée a conservé de lui quelques phrases où s ’ expriment d ’ une manière frappante l ’ incertitude des choses humaines et la part prépondérante que la Fortune a dans les affaires humaines. Cicéron lui fait exprimer avec force la thèse que nous avons considérée comme celle de Carnéade : nous pouvons suivre ce qui nous paraît, et même approuver les représentations qui ne sont entravées par aucun obstacle, pourvu que ce soit sans assentiment  [555] .
    Sa critique de la rhétorique, que Sextus  [556] nous fait connaître, jette un jour curieux sur un débat qui commençait à poindre, et qui va se continuer pendant les siècles suivants  : c ’ est le débat entre la rhétorique et la philosophie comme moyens de haute culture. Ce débat n ’ avait aucun sens dans un mode d ’ exposer tel que celui des Stoïciens, qui ne rivalisait d ’ aucune p.393 manière avec la rhétorique. Au contraire les Académiciens sont des orateurs  ; des élèves des rhéteurs quittaient leur maître pour aller entendre Carnéade  [557] , et Clitomaque prend l ’ offensive contre eux en déniant à la rhétorique le droit d ’ exister comme un art de pure forme indépendant de la philosophie. Dès l ’ époque de Carnéade, d ’ ailleurs, son contemporain péripatéticien, Critolaüs, critiquait la définition stoïcienne de la rhétorique, l ’ art de bien dire, qu ’ il trouvait trop formelle et lui opposait la rhétorique comme art de persuader. On pressent la place que la rhétorique doit prendre comme organe naturel des doctrines complexes et nuancées que nous avons exposées dans ce chapitre. Le mode d ’ exposition de la philosophie change d ’ ailleurs sous ces influences, à partir de la fin du I I e siècle, et nous allons voir les Stoïciens eux-mêmes être les premiers à s ’ humaniser.
     
     
    Bibliographie
     
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CHAPITRE V
    LES COURANTS D ’ IDÉES
    AU I er SIÈCLE AVANT NOTRE ÈRE
     
    I. — LE MOYEN STOÏCISME   : PANÉTIUS
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    p.394 Les scholarques qui succédèrent à Chrysippe au courant du I I e siècle jusqu ’ à Panétius, de 204 à 129, nous font déjà assister à un certain changement de la pensée stoïcienne et comme à une détente du dogmatisme. Sextus dit, sans d ’ ailleurs préciser davantage, que les nouveaux Stoïciens admettent comme critère non plus la représentation compréhensive toute seule, mais la représentation compréhensive qui n ’ a pas d ’ obstacles  ; et ils empruntent aux Académiciens eux-mêmes des exemples de représentations compréhensives, qui pourtant n ’ emportent pas la croyance, telles que celle qu ’ Admète avait d ’ Alceste quand elle fut ramenée des enfers. C ’ était admettre que ce qui fait la certitude, c ’ est moins la représentation elle-même que son rapport à l ’ ensemble dont elle fait partie. Ils luttent sans doute contre Carnéade, et l ’ on connaît l ’ argument ad hominem que lui adressait Antipater de Tarse  : Carnéade devait admettre qu ’ il apercevait au moins une chose, à savoir que rien ne peut être perçu  [558] .
    Pourtant on voit tomber des traits essentiels de la conception du monde, notamment la thèse de la conflagration universelle  : Zénon de Tarse et Diogène de Babylone (qui l ’ avait d ’ abord acceptée) n ’ osent la nier, mais ils suspendent leur p.395 jugement. Boéthus de Sidon, en revanche, emploie contre elle toute une série d ’ arguments qui nous ont été conservés par Philon d ’ Alexandrie  [559] . Le fond de ces arguments, c ’ est que le caractère divin et parfait du monde n ’ est pas compatible avec sa corruptibilité. En de beaux vers, Lucrèce ( V, 1215 ) montre l ’ homme contemplant les étoiles et se demandant si, « capables grâce aux dieux de se

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