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Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique

Titel: Histoire de la philosophie. Tome I, L'Antiquité et le Moyen Âge. I. Période hellénique Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Émile Bréhier
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réduit pas à une pédagogie morale, mais est une ample vision de l’univers qui va dominer la pensée philosophique et religieuse pendant toute l’antiquité et une partie des temps modernes ; il y a là comme un nouveau départ et non la continuation d’écoles socratiques qui se meurent.
    Devons-nous en chercher l’origine sur le sol grec ? Oui, semble-t-il, du moins en partie. La pensée du IV e siècle n’est en effet, épuisée ni par le conceptualisme d’Aristote et de Platon, ni par l’enseignement des Socratiques ; elle est bien plus diverse. Les écoles médicales étaient prospères, et elles s’occupaient fort des questions générales de la nature de l’âme et de la structure de l’univers ; qu’on se rappelle les apparitions inattendues p.294 de la médecine dans le Phèdre (cf. ci-dessus, p. 74) et surtout dans le Timée de Platon.
    Dans son livre Contre Julien , le médecin Galien, une de nos meilleures sources sur l’histoire du stoïcisme, nous apprend que Zénon, Chrysippe et les autres Stoïciens ont longuement écrit sur les maladies, que, au reste, une école médicale, l’école « méthodique », se réclamait de Zénon, et enfin que les théories médicales des Stoïciens étaient celles mêmes d’Aristote et de Platon. Il les résume ainsi : il y a dans le corps vivant quatre qualités opposées deux à deux ; le chaud et le froid, le sec et l’humide ; ces qualités ont pour support quatre humeurs, la bile et l’atrabile, le flegme acide et le flegme salé ; la santé est due à un heureux mélange de ces quatre qualités, et la maladie (du moins la maladie de régime) est due à l’excès ou au défaut d’une de ces qualités, tandis que d’autres maladies viennent d’une rupture de continuité des parties du corps. Il arrive aussi que telles opinions physiques des Stoïciens (sur le siège de l’âme dans le cœur, sur la digestion, sur la durée des grossesses) soient citées formellement par Philon d’Alexandrie [416] comme des opinions empruntées par les physiciens aux médecins.
    On peut préciser la portée de ces emprunts grâce aux fragments qui restent de l’œuvre de Dioklès de Karystos, un médecin du IV e siècle, cité par Aristote. Selon la doctrine physiologique que nous venons de voir attribuer aux Stoïciens, Dioklès pensait que tous les phénomènes de la vie des animaux sont gouvernés par le chaud et le froid, le sec et l’humide, et qu’il y a dans chaque corps vivant une chaleur innée qui, en altérant les aliments ingérés, produit les quatre humeurs, le sang, la bile et les deux flegmes, dont les proportions expliquent la santé et la maladie. Mais, d’autre part, nous le voyons admettre que l’air extérieur, attiré vers le cœur par le larynx, l’œsophage et les pores, devient, une fois dans le cœur, le souffle psychique p.295 en qui réside l’intelligence, qui, en se répandant dans tout le corps, le tend et le soutient, de qui enfin les mouvements volontaires prennent leur origine. « Les corps vivants, dit Dioklès, sont ainsi composés de deux choses, ce qui porte et ce qui est porté. Ce qui porte c’est la puissance, ce qui est porté c’est le corps. » Beaucoup de maladies sont dues à l’obstruction de cette puissance, identique au souffle et empêchée de circuler dans les vaisseaux, à cause de l’accumulation des humeurs.
    Ce sont là les théories mêmes des Stoïciens sur l’être vivant. Mais l’explication est généralisée ; chez eux, tout corps, animé ou inanimé, est conçu à la manière d’un vivant ; il a en lui un souffle (pneuma) dont la tension retient les parties : les divers degrés de cette tension expliquent la dureté du fer comme la solidité de la pierre. L’univers dans son ensemble (comme dans le Timée , si imprégné d’idées médicales, est aussi un vivant dont l’âme, souffle igné répandu à travers toutes choses, retient les parties.
    Des idées médicales, issues de la physique présocratique et qui se systématisent à nouveau en une physique et une cosmologie, semblent donc être à l’origine de l’image stoïcienne de l’univers. Ajoutons que les Stoïciens ne sont sans doute pas les premiers qui, à cette époque, instituèrent, en partant de théories médicales, une cosmologie vitaliste. Il existait encore, dans la seconde moitié du IV e siècle, des Pythagoriciens ; Aristoxène de Tarente, qui devint disciple d’Aristote et qui est connu

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