Histoire du Japon
l’Izumo. Il raconte que, remarquant qu’il y avait trop de terre dans le sud coréen, un dieu arracha une partie du pays de Silla et lui fit traverser la mer pour la rattacher à celui d’Izumo. C’est de toute évidence la version folklorique d’une migration, ce qui passa de l’autre côté des eaux n’étant pas un excédent de terre mais un trop-plein de gens. Ajoutons enfin que maints éléments du Kojiki et du Nihon-shoki sont sans aucun doute d’origine tungusique.
LE SYSTÈME DE GOUVERNEMENT
Une étude générale des parties mythologiques des premières chroniques à la lumière de ce que nous savons aujourd’hui semble justifier une opinion plus favorable quant à leur valeur historique que celle des premiers traducteurs occidentaux de Kojiki et du Nihongi. Les grands pionniers (Chamberlain, Aston et Murdoch) ont eu tendance à insister sur les défauts évidents de ces ouvrages. Ils cherchaient des données exactes, des récits véridiques : les inconséquences et les dates erronées des compilateurs les ont évidemment déçus. Mais ces faiblesses elles-mêmes sont riches de sens du fait qu’elles sont révélatrices de la pensée japonaise du vue siècle. Les chroniques ont été composées à une époque (vers 700) où l’influence des idées étrangères (à la fois confucéennes et bouddhiques) s’étendait rapidement au lapon. Cependant, elles montrent que les croyances traditionnelles sont encore puissantes et que le culte indigène garde beaucoup de sa vitalité. Depuis lors, non seulement maintes légendes sont restées partie intégrante iu folklore, mais les principes monarchiques et la théorie gouvernementale} ue les deux œuvres étaient destinées à défendre pénètrent depuis des sièges la pensée politique en dépit des grands événements qui, logiquement, luraient dû en venir à bout. Cette persistance d’un ancien modèle face aux contradictions est un phénomène caractéristique ; régulièrement, une situa-ion politique nouvelle apparaît, mais on l’adapte tant bien que mal afin lu’elle cadre avec l’ancienne doctrine. Peut-être cela vient-il du manque de aractère réellement positif, constructeur, du culte national désigné sous le lom de shintô, car en réalité il ne s’agit pas d’une religion ou d’un système le pensée, mais d’une expression du tempérament national.
La raison pour laquelle cet ancien paganisme rituel a survécu sans remédier à ses manques évidents ne peut s’expliquer plus clairement que ne l’a lit Sir Charles Eliot dans son Japanese Buddhism, cité ici en pieux souvenir
« Il n’a pas de code moral ; ses prières et ses sacrifices visent à obtenir une prospérité temporelle et ne trahissent aucun désir de bienfaits moraux ou spirituels. Toutefois, ces curieuses lacunes sont un peu compensées par un esprit intensément patriotique. Pour lui, le Japon est le pays des dieux ; les plus grands président au destin de l’empire, les plus petits à celui des villes ou des villages ; qu’ils soient nobles ou humbles, les morts ont tous la place qui leur est due dans le culte de l’État, de la cité ou de la famille. La pensée du shintô est à ce point primitive que l’on peut à peine dire que des phénomènes naturels ou des individus ont été déifiés. Ils sont simplement acceptés comme des faits importants de la vie nationale courante, et des discours, des invocations, leur sont adressés à propos de telles choses qui les concernent. Bien qu’il s’exprime dans un langage presque enfantin, ce sens de la communauté dans la vie nationale revient effectivement à dire que l’individu n’existe qu’en tant que membre de la famille, et la famille, en tant que membre de l’État : que le présent doit se sacrifier aux traditions du passé et aux besoins de l’avenir. Et l’héroïsme du Japon découle ainsi naturellement d’une religion qui, si on la considère froidement à la lumière de la raison pure, est aussi insensée qu’un conte de fées. »
Si l’on a peu de témoins directs et tangibles de la nature de l’État du Yamato tel qu’il s’est développé durant les premiers siècles après sa formation, on peut le reconstituer sans trop de peine sur la base des chroniques et des vestiges des premières institutions qui ont survécu aux réformes entreprises par la dynastie régnante pour consolider son pouvoir.
Le récit mythologique et les légendes des premiers souverains
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