Histoire du Japon
participants fut interceptée et presque totalement détruite par la marine chinoise. Dès lors, le Japon abandonna sa politique d’attaque et s’occupa de construire des ouvrages défensifs sur les îles d’Iki et de Tsushima, au Kyüshü, ainsi qu’à Yashima Sanuki et Shikoku. L’importance spéciale que revêt la base de défense du Kyüshü, à Dazaifu, remonte à cette période. Peut-être le danger immédiat fut-il exagéré, mais, la puissance de l’empire Tang se confirmant en même temps que son alliance avec le Silla, il y avait vraiment de quoi s’inquiéter ; et l’on comprend qu’aucun changement bien important dans le système des clans n’ait pu être entrepris aussi longtemps que la défense du pays exigeait qu’on disposât d’hommes et de matériel.
Il est curieux, compte tenu de la réputation posthume du prince Shôtoku, que nous ayons très peu d’informations exactes sur ses activités. Son plus grand intérêt semble avoir été pour l’étude de la littérature bouddhique et des classiques chinois. Sa valeur intellectuelle est décrite comme miraculeuse ; on nous dit qu’il savait parler dès le moment de sa naissance et que, devenu adulte, il était capable d’écouter les plaintes de dix hommes à la fois et de trancher sans commettre d’erreurs. Il est clair qu’il était exceptionnellement doué et vertueux, et qu’il fit beaucoup pour élever le niveau du savoir et de la piété dans son pays. Les premiers monastères des environs de Nara, notamment le Höryüji, et les trésors de son époque qu’ils renferment encore aujourd’hui, témoignent de ce qu’il accomplit sinon en tant qu’auteur réel, du moins par ses encouragements et son inspiration.
Mais de ses activités profanes dans le domaine des affaires intérieures il n’v a guère de traces. Si sa « Constitution » doit être écartée comme un pieux faux, sa seule contribution certaine à la réforme politique se résumerait à l’institution des « rangs de coiffures », c’est-à-dire des rangs assignés aux ministres et autres officiers, dont l’ordre de préséance était signalé par des coiffures à la couleur et au dessin prescrits. C’était sans doute le préliminaire au changement des titres de noblesse en grades officiels. Cette institution, inspirée d’une pratique chinoise de la cour des Sui, visait bien sûr à démontrer que les charges n’étaient pas occupées de droit mais par la volonté du souverain. Outre qu’elle est un premier pas vers la formation d’une bureaucratie chargée de l’exécution de la politique du gouvernement central, cette mesure a l’intérêt de souligner le goût traditionnel des Japonais pour les distinctions de rang, que les voyageurs Wei du me siècle avaient déjà noté.
Il n’est pas même certain que Shôtoku Taishi ait introduit ce système, bien que la chose paraisse probable. Là où il fut le plus actif, c’est en envoyant des missions en Chine, ce qui était effectivement essentiel à tout plan de réforme, car ce sont les connaissances acquises en Chine, connaissances de la théorie et de la pratique politiques chinoises, qui furent appliquées à l’organisation japonaise d’un gouvernement central et d’un système administratif bien défini. Le premier envoyé officiel à représenter le souverain d’un Japon uni fut Ono no Imoko, qui quitta l’archipel en 607 et revint l’année suivante avec un homologue chinois. En dehors des missions purement diplomatiques, des lettrés, seuls ou par groupes, étaient dépêchés en Chine pour y étudier, et des érudits religieux et laïcs venaient au Japon de Corée et de Chine, souvent pour échapper au désordre des régions envahies par des armées en lutte.
En 622, alors que ces études étaient en plein essor, le prince Shôtoku mourut, âgé de quarante-neuf ans. Soga Umako l’imita peu après, et fut remplacé à la tête de son clan et comme grand ministre par son fils Emishi. A la mort de l’impératrice Suiko, en 628, ce dernier s’arrogea le droit de lui choisir un successeur. Comme d’habitude, de violentes querelles éclatèrent, qui, après bien des intrigues et quelques meurtres, furent réglées par la nomination d’un petit-fils de Bidatsu en 629. Le prince Yamashiro no Oe, fils de Shôtoku, fut écarté malgré des droits bien établis. Lui aussi avait dans les veines beaucoup de sang Soga, et Emishi ne jugeait pas prudent de le faire disparaître. Le
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