Hitler m'a dit
amèrement : de quelque côté qu’il se tournât, il ne voyait que vieillards plus ou moins retombés en enfance, faisant parade de leurs connaissances techniques, alors qu’ils avaient déjà perdu tout bon sens. « Si je dis que je veux faire telle et telle chose, Neurath me répond que ce n’est pas possible, parce que nous aurions tout le monde sur les bras ; si je dis : je me moque de toute votre science financière, trouvez-moi de l’argent, Schacht me répond : « Impossible ! Il faut d’abord préparer de nouveaux plans », et Hitler de se répandre en extravagances sur ce qu’il aurait pu faire, s’il n’avait pas été entouré de fonctionnaires rétrogrades dont le cerveau travaillait au ralenti. « Par exemple, cet Eldorado du Mexique ! Qui donc, parmi les diplomates avait consenti à s’en soucier ? C’était pourtant une grande affaire, qui valait d’employer les grands moyens. Ah ! Si nous possédions ce pays, nous serions vite sortis de toutes nos difficultés. Je n’aurais besoin ni de Schacht, ni de Krosigk qui viennent chaque jour m’assommer avec toutes leurs histoires et leurs jérémiades. Ce Mexique ! C’est un pays qui aurait besoin d’être mené par des gens compétents et qui est en train de crever sous ses maîtres actuels. L’Allemagne serait grande et riche si elle mettait la main sur les mines mexicaines. Pourquoi ne nous attellerions-nous pas à cette besogne ? Oh ! Loin de moi l’idée de me lancer dans la propagande coloniale, à la façon de von Epp. Pourquoi nous attarder à des méthodes timides, puisqu’on nous vilipendera dans tous les cas ? Il faut voir grand, faire du nouveau. Avec quelques centaines de millions, on pourrait acheter le Mexique tout entier. Pourquoi ne ferais-je pas une alliance avec le Mexique, un pacte d’amitié monétaire, une union douanière ? Ah ! ces bureaucrates sont de vieilles rosses qui ne trottent que si elles reconnaissent la vieille carriole qu’elles ont toujours tirée. »
XI
LA CONQUÊTE DES ÉTATS-UNIS
Hitler s’était fait sur les États-Unis d’Amérique une opinion préconçue, que rien n’aurait pu modifier. À son avis, l’Amérique du Nord n’interviendrait plus jamais dans une guerre européenne. Cet immense pays, avec ses millions de chômeurs, était au bord d’un abîme révolutionnaire dont lui seul, Hitler, pouvait encore le sauver.
En juin 1933, me trouvant à la table d’Hitler, je l’ai entendu exprimer cette double opinion dans les termes que je viens de dire, et par la suite, j’ai eu maintes fois l’occasion d’en entendre la répétition. Au déjeuner dont je parle, un invité, avait soulevé la question de savoir si l’intérêt de l’Allemagne n’était pas de se concilier l’amitié américaine. Des personnages importants du gouvernement avaient parlé en public du « prix inestimable d’un bon traité avec les États-Unis », et s’étaient demandé si à cet égard la politique antisémite du Reich n’avait pas certains inconvénients.
— « L’amitié américaine ? », répondit sèchement le Führer. « L’amitié de qui ? L’amitié des hommes d’affaires et des magnats juifs de la finance, ou celle du peuple américain ? » Il entendait de la sorte, exprimer le mépris qu’il ressentait pour le régime politique des États-Unis. « Nous assistons aux derniers soubresauts, aux derniers râles d’un régime de corruption qui est une honte pour le grand passé de cette nation, et qui agonise d’ailleurs. Depuis la guerre de Sécession, où les États du Sud ont été vaincus, contre toute logique historique et contre tout bon sens, les Américains sont entrés dans la phase de la décadence politique et raciale. Ce ne sont pas seulement les Sudistes qui ont été battus, c’est le peuple américain tout entier. Sous l’apparence trompeuse de la puissance économique et politique, l’Amérique a été entraînée dans le tourbillon de l’autodestruction progressive. Une clique de ploutocrates, qui prétend passer pour la bonne société, domine le pays par la fiction d’une démocratie qui ne s’est jamais affichée avec autant d’effronterie comme un régime de corruption et de vénalité légales. Les cadres d’une grande hiérarchie sociale, reposant sur l’idée de l’esclavage et de l’inégalité, ont été détruits, et avec eux, les germes futurs d’une Amérique, véritablement grande, d’une Amérique qui
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