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Iacobus

Iacobus

Titel: Iacobus Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Matilde Asensi
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ans environ. Le visage tanné, le corps trapu, on
devinait rapidement que la réflexion n’était pas son fort, et qu’il lui
suffisait pour être heureux de manoeuvrer avec succès son embarcation le long de
la côte. Néanmoins, c’était aussi un habile commerçant, et j’étais sûr qu’il ne
laisserait pas échapper une bonne occasion. S’il refusait, je n’avais pas
d’autre choix que de descendre à terre et aller chercher un autre bateau.
    — Je ne sais pas..., murmura-t-il. Est-ce
que vous êtes d’accord pour une pistole ?
    — Une pistole !
    — Bon, bon, cent maravédis, mais c’est mon
dernier prix ! Les récifs du cap Finisterre sont les plus dangereux du
monde. Ce sera très difficile de vous approcher jusque-là.
    Je me mis à rire.
    — Non, Martino, une pistole me paraît un
prix raisonnable. Et je suis même prêt à vous en donner deux : une
maintenant et une autre quand tout cela sera terminé. Vous êtes d’accord ?
    Il l’était, évidemment. Même en faisant
cinquante voyages, il n’aurait pas gagné une telle somme. Mais s’il était déjà
difficile de maintenir à l’abri le bateau dans cette mer violente, ce que je
lui demandais tenait du miracle : qu’il accoste en pleine nuit, esquivant
rochers et récifs, et me débarque peu de temps avant l’aube... Un tel effort
valait bien, sans aucun doute, deux pistoles.
    Cette nuit-là, Martino prouva son talent de
pilote et son courage inébranlable. Un coup de vent nous précipita contre
l’écueil de Bufadoiro, mais Martino manoeuvra son embarcation avec une science
insurpassable, et peu de temps avant l’aube, la barque frôlait les rochers
granitiques du cap Finisterre. Quelques instants plus tard, je foulai la terre
des confins du monde.
    — Faites attention à vous, père, me supplia
Jonas alors que le navire s’éloignait déjà.
    Je fis quelques pas en avant et m’arrêtai pour
regarder autour de moi. Il n’y avait pas d’autre chemin à parcourir. J’étais
arrivé.
     
    Tandis que j’attendais que le soleil se lève et
que Manrique de Mendoza arrive, je parcourus de long en large cette presqu’île
déserte. Je ne pouvais oublier le regard douloureux que m’avait lancé Sara
alors que je débarquais, comme si elle craignait de me voir pour la dernière
fois. J’aurais aimé l’étreindre, l’embrasser et lui dire à l’oreille combien je
l’aimais et combien j’avais besoin d’elle. C’est pour elle que j’étais là,
marchant transi de froid entre les rochers escarpés de la fin du monde, pour
elle et pour ce jeune garçon efflanqué et dégingandé qui avait ma voix et un
sacré caractère. S’ils n’avaient pas existé, s’ils n’avaient pas été à bord de
cette petite embarcation qui se balançait au loin sur la haute mer, je n’aurais
pas été là à jouer mon va-tout par cette matinée qui s’annonçait triste sous la
brume.
    J’étais armé, bien sûr, mais la fine dague que
je portais cachée sous mon pourpoint me serait inutile si une troupe d’hommes
armés apparaissait dans ce lieu désert avec l’intention de m’éliminer. Mais ce
n’était pas leur intérêt, je le savais, et eux aussi, comme l’avait prouvé leur
diligence à répondre à mon offre. Ils étaient prêts à négocier. Mais il y avait
toujours des inconnues. Mendoza avait peut-être imaginé une tout autre issue,
je l’avais peut-être mal jugé...
    Je me récitais avec un désespoir croissant les
points majeurs de mon offre. Mais au fur et à mesure que passaient les heures
sans que Manrique n’apparaisse, ils me semblaient chaque fois plus faibles et
inconsistants. Je me rassurais en me disant que cette impression n’était due
qu’à la peur et que la peur était précisément le seul sentiment que je ne
pouvais m’autoriser parce qu’il me transformait d’avance en perdant de la
partie.
    Enfin, à mi-journée, la silhouette d’un cavalier
se découpa à l’orient. La brume m’empêchait de bien le distinguer, mais je
devinai qu’il s’agissait de Manrique de Mendoza.
    — Ah ! vous êtes arrivé le
premier ! s’écria-t-il en arrivant à ma hauteur.
    Je m’étais mis debout, les bras croisés sur ma
poitrine dans une attitude de défi.
    — Vous en doutiez peut-être ? lui
répondis-je avec orgueil.
    — Non. Vraiment, non. Vous êtes un homme
prévoyant, Galcerán de Born, c’est bien.
    Il descendit de cheval et attacha les rênes à un
buisson.
    — Nous voilà de

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