Inaccessible Étoile
longtemps du fait qu’elle avait les mêmes attitudes envers moi que l’autre.
Papa était beau gosse, genre Jean Gabin avec sa gouaille de sa période cinématographique d'avant-guerre. Petit, trapu, musclé, je pense qu'il a dû connaître pas mal de femmes, mais à l'extérieur, car je ne l'ai jamais vu en compagnie féminine avant Maman Muguette.
Papa et Muguette s’étaient rencontrés rue des Vinaigriers, près de la Gare du nord à Paris où ils travaillaient. Papa était couvreur plombier zingueur, Maman travaillait dans une usine, à la chaîne et sur de grosses presses.
Ils firent connaissance dans un café où tous deux prenaient leur repas le midi.
Papa avait fait les Bat d'Af, les bataillons d'Afrique au temps des colonies...
Il avait été stationné à Dakar, et à Abidjan dans les années 50. Il avait aussi fait l'Indochine.
Papa était donc un homme, un vrai comme on disait à l'époque.
Pour moi Muguette est et restera ma seule maman, ainsi donc quand je parle de ma maman, c'est d'elle que je parle, appelant l'autre Ginette.
Maman donc, était belle, blonde, douce, et pourvue d'une tendresse infinie.
Je n’ai jamais trop su de choses sur son enfance, sa vie avant, elle n’en parlait que rarement.
Je sais qu'elle n'a pas été très heureuse non plus.
Papa nous la présenta un vendredi, alors que nous rentrions de Vitry, Pierrette et moi.
La rencontre eut lieu en 1967 ou 1968, dans un café près de la cité.
Maman était très intimidée le jour de notre rencontre dans ce café de La Courneuve.
Elle fut vite confrontée à ce qui l’attendait puisqu’en guise d’accueil, Pierrette lui vola 100 francs (d’avant l’euro) dans son sac, ce qui était beaucoup pour l’époque et pour eux, ouvriers.
J’eus le coeur brisé de la voir pleurer.
Déjà dès la première entrevue, nous la faisions pleurer.
Plus tard, à l'appartement, ému par la tristesse de Muguette, qui me plut tout de suite, car je l’avais adoptée d’office, j’avoue avoir fini par jouer les balances, pour la première, et probablement la dernière fois, car ce n'était pas moi qui avais volé cet argent.
On commença par m’accuser moi, mais on découvrit bientôt le véritable auteur de ce forfait. Entre Pierrette et Maman Muguette, pour une raison que j’ignore, ça n'est jamais bien passé.
Maman avait eu une vie assez dure ; avait eu deux enfants, Joëlle et Dominique, placés dans des familles d’accueil, pour des raisons que je n'ai jamais sues, bien que les ayant rencontrés plus tard. Elle était divorcée depuis déjà pas mal de temps et vivait seule.
Je sais qu'elle a beaucoup souffert de la séparation d'avec ses enfants, et autant que je m'en souvienne, je crois que son ex-mari était responsable du placement de ses enfants.
Muguette reporta tout son amour sur nous, moi en particulier, mais elle n'oublia jamais ses enfants. Elle nous en parlait souvent, puis eut l’occasion de les revoir avant la fin de sa vie.
Ses enfants non plus ne l’avaient pas oubliée, ils l'aimaient et le lui montrèrent lors des retrouvailles, bien après la mort de Papa.
En fin de compte, pour moi, ça faisait une demi-soeur et un demi-frère en plus, dommage que je ne les ai jamais revus ensuite.
C’était un demi-frère et une demi-soeur pour moi seul, que je n'avais pas à partager avec mes soeurs officielles, de plus je les adorais.
Probablement m'ont-ils oublié, mais ils peuvent savoir que Muguette Dupont était une femme vraiment bien. Femme vertueuse telle que décrite dans la Bible (Proverbes 31:10-31).
Sa douceur, sa gentillesse, sa peur de ne pas nous plaire. Une peur telle que même à mon âge je pouvais déceler.
Aujourd'hui, avec le recul, je peux dire que seule la grâce pouvait mettre une telle créature sur notre route. Une créature avec autant d'amour à donner, elle qui en reçut si peu au cours de sa vie. Je peux dire qu'elle a payé très cher tout l'amour qu'elle nous a donné. J'ai tout de suite aimé Muguette ! Pierrette beaucoup moins, quant à Françoise et Mauricette, n'étant pas élevées par elle c'était différent. Maman en a vu de toutes les couleurs avec nous.
Elle était là lorsque je fis presque sauter l'immeuble, en faisant exploser le vide-ordures lors de ma tentative d'en finir. C'est elle qui m’emmena à l’hôpital de Saint-Denis, où je m’enfuis ensuite des mains du médecin (chapitre La DDASS).
Elle faisait un travail épuisant, assourdissant en usine, sur des presses toute
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