Jack Nicholson

et utiliser cela pour Maerose. Ça me donnait la chair de poule. »
    Bien qu’un journal new-yorkais ait relaté que « le réalisateur chevronné, Huston, 78 ans, avait l’air affaibli et avait besoin de se reposer après avoir traversé la moitié d’un bloc », le tournage se déroula sans encombre. Aussi affaibli qu’il pût être, Huston savait exactement ce qu’il voulait, et en particulier ce qu’il voulait de Jack.
    Ce que le réalisateur voulait, c’était de la simplicité, pas de secrets, pas de « plans secrets ». Charley Partanna devait être « simple, stupide et compétent », point. « Les spectateurs ne devaient pas penser : "Oh, Jack a un expédient en réserve." »
    Lors du tournage d’une scène où Charley passait un coup de téléphone déterminant, Nicholson « entraîna le laconique Mr Huston dans une exceptionnelle discussion de détails », put-on lire dans un article publié dans le New York Times. « Où est-ce que je vais avec cette scène, suis-je Pagliacci, suis-je hystérique, suis-je en larmes, où suis-je ? » demanda l’acteur. D’après Nicholson, Huston aurait réfléchi une minute avant de lui répondre : « Eh ben, je te verrai bien en train de te faire les ongles. »
    Après le tournage, Nicholson déclara aux journalistes qu’il n’avait pas fait autant de « prises uniques » depuis l’époque de Roger Corman. L’assurance et la rapidité de Huston étonnaient l’acteur.
    La relation que Jack et Anjelica entretenaient à la ville fut intégrée à la publicité du film alors que l’on préparait sa sortie au cours de l’été 1985. Le couple fit la couverture du magazine People. Le producteur Robert Evans, toujours très généreux pour ce qui était des commentaires, proclama que Jack ne quitterait jamais Anjelica : « C’était un vagabond doré, et elle lui a donné la stabilité dont il avait besoin. Son éducation et sa culture ont donné un certain raffinement à sa vie. Cet homme est un diamant, et elle lui procure un magnifique écrin. » « Il y a une rare dévotion entre eux », acquiesçait le père d’Anjelica, le réalisateur. « On le voit dans la vie et on le ressent dans les scènes qu’ils jouent ensemble. Douze ans ! C’est plus long que n’importe lequel de mes cinq mariages ! » L’Honneur des Prizzi se révéla être l’un des films remarquables des années 1980 – un Parrain de comics , dont l’humour décalé paraissait d’autant plus cruel que le film était joué de façon sérieuse. Ce ne fut qu’un succès modeste dans les salles, mais les critiques embrassèrent unanimement cette satire pince-sans-rire. Anjelica Huston fut complimentée pour son jeu ingénieux, tandis que John Huston, qui semblait vraiment à l’aise dans le monde farfelu de Richard Condon, fut à juste titre acclamé pour avoir porté les valeurs de cette excellente production.
    Nicholson reçut lui aussi son lot de louanges pour sa subtile interprétation du tueur à gages idiot-savant qu’était Charley Partanna. Jack s’était entraîné avec La Bonne Fortune et En route vers le sud à jouer les imbéciles dans de franches comédies, mais Huston avait ici créé un ton quasi classique de subtilité et de sobriété. Parfois montré du doigt comme un acteur qui en faisait trop, Nicholson prouva une fois de plus qu’il ne pouvait pas être rangé dans telle ou telle catégorie. Il pouvait se montrer léger et complexe tout comme ne pas chercher à faire dans la dentelle.
    « C’est vraiment un excellent acteur » s’exclamait le producteur, Foreman. « Le plus courageux de tous, je dirais. Il est passé du statut d’acteur admiré à aimé, d’apprécié à célébré, à adoré. C’est maintenant un acteur adoré. Il est prêt à faire tout ce que le rôle requiert, et tout ce qu’il fait devient en soi intéressant. »
    Cette année-là, Nicholson reçut de l’Academy of Motion Picture Arts and Sciences sa huitième nomination à l’Oscar du meilleur acteur. Les autres nominations pour L’Honneur des Prizzi étaient celles du meilleur film, meilleur réalisateur, meilleur acteur dans un second rôle (William Hickey), meilleure actrice dans un second rôle (Anjelica Huston), meilleur scénario (Roach et Condon), meilleur montage (Rudi et Kaja Fehr) et meilleur création de costumes (Donfeld). (La grande oubliée était le très sexy premier rôle féminin Kathleen Turner, la tueuse à gages faire-valoir