Je n'aurai pas le temps
quelques démarches mentales qui m’ont paru à l’origine de ces différences.
Réincarnation ou pas réincarnation ?
J’ai en mémoire une discussion avec un groupe de moines tibétains, hautement considérés par leurs confrères pour leur savoir et leur compétence. J’ai abordé avec eux la question de l’après-vie. Je cherchais à savoir ce qui motivait leur croyance en la réincarnation. Plus précisément, je leur posais la question : entre deux affirmations – 1) il y a réincarnation, 2) il n’y a pas réincarnation –, qu’est-ce qui vous amène à choisir ?
J’ai écouté avec attention leurs longs discours. Ma difficulté n’était pas tant de faire sens des phrases énoncées, j’y arrivais à peu près – quelquefois après avoir fait répéter leurs mots et vérifié leurs approbations mutuelles. C’était plutôt de comprendre comment ces propos auraient pu me faire adhérer à leurs convictions. Il y avait là, pour moi, comme un langage étranger dans lequel les motsn’avaient pas le même sens et les arguments pas la même dialectique que celle qui m’était familière.
Voici un exemple. Je demande : « Les personnes réincarnées gardent-elles quelque mémoire de leurs vies antérieures ? » Réponse : « Certains de nos bonzes, généralement ceux qui sont parvenus aux plus hauts échelons de l’Éveil, disent qu’ils s’en souviennent. » Réponse qui paraissait parfaitement satisfaisante aux autres moines présents à la discussion. Je les sentais rassurés, cohérents entre eux, calmes, sereins et confiants. La distance me donnait le vertige. Je me suis senti comme à l’extérieur et dans un sentiment d’étrangeté.
Une question posée par ma femme, présente à la conversation, m’a fait saisir l’abîme qui nous séparait. « La réincarnation du défunt en une autre personne ou en un animal se fait-elle immédiatement après le décès ?
– Pas nécessairement. Il peut se retrouver dans un futur plus ou moins lointain.
– Peut-il aussi renaître dans le passé ?
– Non, impossible ! On ne peut pas reculer dans le temps », répondent-ils avec une certaine véhémence. Ouf ! enfin un propos auquel je pouvais adhérer pleinement. J’étais soulagé. Nous avions au moins ces mots en commun. Mais leur sens, pour moi, ne faisait que rendre plus incompréhensibles les discours précédents et marquer le contraste entre nos fonctionnements mentaux, capables à la fois de se rejoindre sur certains points et de diverger tellement sur d’autres.
Cette anecdote m’a montré une fois de plus la grande variété des mentalités humaines dans leur fonctionnement et m’a permis de prendre conscience du fait que la nôtre n’en est qu’une parmi tant d’autres.
Chapitre 35
Coïncidences en astrophysique
L a méthodologie scientifique a été initiée dans la Grèce antique il y plus de deux mille ans. Elle a pris sa forme contemporaine durant la Renaissance, sous l’impulsion de Galilée. Elle est basée sur la volonté ferme de chercher des réponses à nos interrogations sur les phénomènes naturels dans le cadre de la nature elle-même. De s’abstenir de faire intervenir en science des éléments surnaturels, transcendants et religieux.
Les résultats de cette activité pourraient-ils, d’une façon paradoxale, nous projeter hors du champ défini par la règle elle-même et nous ouvrir des portes vers quelque sorte de transcendance ?
La situation n’est pas nouvelle. Les développements des sciences biologiques aux XVIII e et XIX e siècles ont mis en lumière un certain nombre de « coïncidences » énigmatiques. Par exemple : le fait que la sensibilité de l’œil soit précisément ajustée au maximum d’intensité du spectre des couleurs du rayonnement solaire. Ou encore le fait que les trompes de certains papillons aient exactement la longueur requise pour atteindre le nectar des fleurs qu’ils pollinisent.
Pendant des décennies, ces coïncidences biologiques furent considérées comme des manifestations d’un « projet » dans la nature. L’étude de l’horloge, pour citer Voltaire, avait révélé l’existence d’un horloger. La science avait retrouvé Dieu dans ses filets. La transcendance, exclue au départ du domaine scientifique, était revenue par la grande porte.
Toutefois, cette période de « concordance » entre la science et la religion ne dura pas longtemps. Pendant la seconde partie du XIX
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