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Je n'aurai pas le temps

Je n'aurai pas le temps

Titel: Je n'aurai pas le temps Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Hubert Reeves
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par les deux techniques permet de déterminer l’origine des atomes que nous retrouvons dans les étoiles et sur la Terre.

    Gare aux pesticides !!!
    Près de Chalk River, j’avais loué pour ma famille un chalet plein de charme, au bord de la rivière Petawawa. Avec les enfants, nous allions écouter au petit matin les hululements des grands plongeons huards nageant dans les brumes du large. Ces longues séquences de chants plaintifs évoquaient pour moi la sérénité et la lumière bleutée des territoires nordiques. Le soir, nous observions les étoiles, et les enfants me bombardaient de questions.
    Dans ces régions, les moustiques pullulent au printemps. Pour agrémenter les traditionnels barbecues des dimanches en famille, les autorités de Chalk River procédèrent un jour à l’aspersion de DDT, une substance chimique miraculeuse. Le résultat fut spectaculaire : plus un moustique… Quel soulagement ! Merci les chimistes ! Mais deux jours plus tard, invasion de minuscules insectes noirs : les « brûlots » ! Ils ne piquent pas, ils mordent ! Ils creusent des petits cratères sanguinolents sur la peau, jusque sur le cuir des chevelures les plus abondantes.
    Quelques années plus tard, le DDT fut interdit, en grandepartie grâce au livre de Rachel Carson The Silent Spring (« Le Printemps silencieux »). Ce fut le début d’une longue guerre, qui fait encore rage aujourd’hui, contre l’emploi des pesticides. Et ce fut pour moi un premier message des risques de l’utilisation de certains produits chimiques sans étude préalable de leurs effets secondaires (le principe de précaution…).
    Pendant mon séjour à Chalk River, j’avais rencontré Marcel Demeur, un physicien nucléaire de l’Université libre de Bruxelles qui y effectuait un stage. Il me dit un jour qu’ayant eu connaissance de ma présence dans ce centre, ses collègues lui avaient demandé de m’inviter à venir présenter mes travaux sur la nucléosynthèse stellaire aux chercheurs belges. « Vous donneriez une série de cours étalés sur un an dans notre Institut national à Bruxelles », m’expliqua-t-il.
    J’y vis aussitôt l’occasion de réaliser mon projet d’aller en Europe. Une fois sur place, je pourrais essayer de démarcher des laboratoires de physique nucléaire. Après l’échec de mes tentatives nord-américaines, j’espérais pouvoir obtenir, grâce à des accélérateurs européens (notamment celui du CERN à Genève), les données nécessaires à la poursuite de mes investigations sur l’origine du mystérieux trio lithium-béryllium-bore. Il n’en fallut pas davantage pour enflammer mon imagination et j’acceptai la proposition qui m’était faite. L’université de Montréal m’accorda une année sabbatique pour ce séjour.
    Tout Québécois, et sans doute tout francophone « hors Hexagone », nourrit l’idée d’aller un jour en France. Je comptais bien profiter de ce séjour européen pour faire un pèlerinage aux sources de notre culture.
    Je connaissais, au travers de mes lectures, la cartographie des quartiers parisiens situés en bord de Seine et de leurs ponts aux arches de pierre ainsi que l’existence des châteaux de la Loire et du Mont-Saint-Michel. J’avaisgrande hâte de les voir en vrai. La France a le privilège d’être à la fois une contrée de romans, de contes de fées, et aussi un pays réel… J’étais bien décidé à ne pas me contenter du bref séjour du touriste pressé. Je tenais à rencontrer chez eux ces Français dont, à l’étranger, on disait le meilleur et le pire : « tous supérieurement intelligents », « tous supérieurement arrogants ». Je me suis toujours méfié des généralités, et l’expérience m’a prouvé qu’heureusement aucune de ces deux affirmations n’est vraie.
    Mais un problème de santé me contraignit à reporter provisoirement l’invitation belge. Je fus victime d’une épidémie d’hépatite survenue à la suite d’un incident dans le système de distribution d’eau de notre banlieue montréalaise. Résultat : six mois de repos forcé pour restaurer mon foie bien malmené. Cette période de grande faiblesse me fut profitable sous plusieurs aspects. J’eus amplement le temps d’approfondir mes connaissances en astrophysique. Les promenades à la campagne que les médecins m’avaient conseillées me permirent de retrouver le plaisir d’observer les oiseaux. Il m’arrivait souvent d’emmener mes

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