Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
Journal de Jules Renard de 1893-1898

Journal de Jules Renard de 1893-1898

Titel: Journal de Jules Renard de 1893-1898 Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Jules Renard
Vom Netzwerk:
comme des lions ! » Pourquoi ce lion ne pourrait-il être une pauvre bête ?
« Et les hoquets de l'homme saoul ! L'adultère ? La petite fatigue à trois. Mais je n'ai pas la force de vous répondre.
« Oh ! les mâles gros et fermes ! Et M. Zola, qui s'attarde quelquefois à prendre le menton de la jeunesse, ne nous a-t-il pas conseillé de nous isoler, une ou deux fois par semaine, dans les blés, avec les belles filles ? Grâce ! Ménagez-nous ! Nous allons mourir de rire.
« Et nous sommes plus haut et plus loin que vous, parce que vous êtes encore empêtré dans la vie, et que nous nous rapprochons de la mort.
« Vous attendez que quelqu'un se lève : personne ne se lèvera. On est si bien, assis, et si mieux, couché ! Et puis, nous avons trop lu : tous les passionnés, tous les sceptiques, à partir de Jules Lemaitre, et tous les farceurs. Nous avons lu des plaisanteries légères comme l'eau qui coule, et des systèmes de philosophie hauts comme des maisons de rapports Nous sommes écoeurés, moulus, noyés.
« Et les petites saletés de l'odorant amour ! »
Mai.
Les roses ont le sang à la tête.
    La guigne ne s'acharne que sur la bêtise.
Surtout, ne pas confondre tristesse et ennui.
Voyage à Chitry. - De la joie et de la tristesse selon que le coeur se serre ou se dilate, et il ne fait que ça.
Sardy-les-Epiry, quel nom !
Et tant d'histoire ancienne qui dort...
Regarder ces villages si éloignés les uns des autres, puis les voir se presser frileusement comme sur une petite carte.
Tous ceux qui ont vécu là ne sont pas nés en même temps que moi. Et les morts me disent : « Dépêche-toi de vivre ! »
L'amusant, c'est que tous ces petits villages comptaient, au Moyen Age, un ou deux artistes. Aujourd'hui l'on n'y trouverait pas un sabotier capable de sculpter une tête de République.
Titre : les Puces de nos grands hommes.
Ne t'imagine pas qu'il y a des grands hommes inconnus.
N'as-tu pas souhaité quelquefois d'être l'amant d'une Mme Roland ? Ne cherche pas : il n'y en a pas. S'il en existait une, tu le saurais. Toutes les femmes que tu as rencontrées sont - oh ! n'en doute pas - bel et bien stupides.
A six heures du matin son ménage est fini. Quelqu'un passe devant sa porte, et on cause. On cause ainsi jusqu'à midi, et le reste de la journée passe de même.
    Jamais on ne la surprend à faire quelque chose. On frappe. Elle vous ouvre, en sabots, propre, les mains sur le ventre. Tout est en ordre. A quoi s'occupe-t-elle ? Des fois, elle tricote. Elle est si heureuse d'avoir perdu son mari qui se saoulait et la battait que la mort d'un de ses deux garçons n'a pu l'attrister. Elle vivrait ainsi aussi longtemps que le bon Dieu.
Perché sur ma butte, je les observe ; et je voudrais surprendre les secrets de leur humble vie.
Toute la journée, travaillé d'un oeil.
26 mai.
Chaumot. La Gloriette. - Il a acheté un pulvérisateur pour vitrioler sa vigne. C'est assez semblable à l'appareil que portent sur leur dos les marchands de coco. Comme il voulait voir si ça marchait bien, il regarda la pomme d'arrosage, tourna le robinet et reçut un jet de vitriol dans les deux yeux. Il courut comme un aveugle au ruisseau, se lava avec de l'eau boueuse, et, depuis, ses yeux pleurent sans cesse, et ils sont rouges comme des anneaux de corail. Mais ça va mieux. Oh ! ça va bien mieux.
Le commerce. Dans les magasins de Corbigny il n'y a personne, excepté les jours de foire. Il n'y a que la sonnette, et elle dort. Elle crie quand on la réveille. Dans la salle du fond dont la porte ouvre sur le jardin, on aperçoit quelqu'un qui tend la tête, bouche ouverte, yeux étonnés.
    Et la femme ou l'homme hésite à venir. Qui suis-je donc ? Qui est-ce qui peut bien venir les déranger en semaine ?
Une fois mariée, la femme se fane. Elle n'a plus ni jolité, ni coquetterie. Elle ne se soigne plus. Elle s'habille pour vivre dans l'arrièreboutique. Quelquefois, ce qu'elles avaient de mieux persiste : des dents restent blanches. L'une d'elles, qui était jolie, en quatre ans a tout perdu. Elle n'a plus que ses cheveux qui mettent longtemps à se défriser.
Et on livre de la main à la main, sans faire de paquets.
- Oh ! moi, me dit une marchande de vaisselle, je ne sais pas faire les paquets.
- Qu'est-ce que vous pouvez bien savoir faire, ma brave dame ?
Pauvre homme ! Quand il sera mort, sur sa tombe il faudra mettre une couronne de cinq livres, en pain.
Tu as rejeté les pierres de ton jardin dans le jardin des

Weitere Kostenlose Bücher