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Julie et Salaberry

Julie et Salaberry

Titel: Julie et Salaberry Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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que ses hommes se contentaient de leur ration, misérable pitance du soldat.
    â€” D’où tenez-vous ce vin? demanda-t-il.
    Ovide rougit. Généralement, quand il recevait son beau-frère, il évitait de surcharger la table, le sachant tatillon sur des détails qui lui importaient peu. Lorsqu’on avait les moyens, pourquoi se priver? se disait Rouville sans éprouver l’ombre d’un remords.
    â€” Oh! Il vient de la cave de mon père, mentit effrontément l’hôte en répondant la première chose qui lui passa par la tête. Quant au reste, disons que je connais une fermière des environs qui, comment dirais-je?... sait faire preuve d’une belle largesse d’esprit.
    Perrault émit un ricanement égrillard.
    â€” Celle qui, disiez-vous, cache ses jambes de reine sous un jupon troué? Rouville, vous vous y connaissez en affaires!
    â€” Pour ma part, les jambes de ma reine sont bien au chaud à Montréal, dit Viger en dégustant le vin.
    Salaberry parcourut la table d’un regard sévère.
    â€” J’espère qu’aucun d’entre vous ne cherche à profiter de son rang d’officier pour obtenir des faveurs indues. Je tiens à ce que mes capitaines soient honnêtes.
    â€” Honnêtes, cher colonel, mais pauvres, grâce à ces maîtres de paye qui déclarent ne pouvoir nous payer. À l’intendance! trinqua Viger en levant son verre.
    â€” Capitaine, je ne peux vous contredire sur ce point, l’appuya Salaberry qui n’était pas plus choyé que ses hommes. Changement d’à-propos. Figurez-vous que j’ai eu de la visite de Chambly: le notaire Boileau et le docteur Talham, dit-il, une fois les verres déposés sur la table.
    â€” Deux excellentes personnes de ma connaissance, affirma Viger. Sont-ils repartis? J’aurais eu grand plaisir à les saluer.
    â€” Ils venaient plaider la cause d’un certain Lareau.
    â€” N’est-ce pas un des déserteurs de Lacolle? demanda Perrault. Il me semble qu’il appartient à votre compagnie, Rouville.
    â€” Pour mon plus grand malheur, répliqua ce dernier.
    â€” Mais en quoi ce mauvais drôle concerne vos visiteurs? demanda Viger à Salaberry.
    â€” Lareau est le frère de madame Talham. Tous deux sont des cousins des Boileau, expliqua Rouville. Ces gens-là se serrent les coudes, même devant la lâcheté.
    â€” Vos affirmations me renversent, Rouville, commenta Jacques Viger avec sérieux, après avoir essuyé ses moustaches et déposé sa serviette repliée sur la table. Je ne connais pas le Lareau dont il est question, mais j’ai rencontré sa sœur, l’épouse du docteur Talham, une petite femme douce et agréable. Quant au docteur, c’est un homme qui force le respect.
    â€” Talham jouit également de l’estime de votre père, Rouville, ajouta Salaberry, et même votre sœur croit ce soldat innocent du crime dont on l’accuse.
    â€” Ma sœur est naïve, Salaberry. J’imagine que vous vous en êtes rendu compte, après quelques mois de mariage. Elle se laisse facilement berner par ses amis.
    Ovide prenait un air important, comme s’il détenait des informations dont personne n’avait encore connaissance. «Nous y voilà, se disait-il. Le plan fonctionne à merveille.»
    Lorsqu’il avait eu vent de l’arrestation de Peltier, il s’était arrangé pour se trouver seul avec lui. Il avait été facile de le convaincre d’accuser Lareau contre la promesse de le tirer de là. N’était-il pas le beau-frère du commandant des Voltigeurs? Peltier avait accepté le marché, se disant qu’à la rigueur, il pourrait faire chanter le capitaine de Rouville.
    â€” Pour ma part, je me suis toujours méfié des Boileau, dit Ovide. Ils ont trop d’influence. La moitié de la seigneurie de Chambly leur est apparentée et ils ont plutôt tendance à vouloir s’élever plus haut que ne le permettra jamais leur naissance.
    Salaberry se rappela en effet la désagréable impression de parvenu qu’il avait ressenti dans la maison du sieur Boileau et sa méfiance envers le notaire. Mais encore une fois, Viger ne semblait pas de cet avis.
    â€” Voilà qui me surprend encore plus. Le notaire Boileau est un ami intime de mon cousin Louis-Michel Viger. Par

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