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Julie et Salaberry

Julie et Salaberry

Titel: Julie et Salaberry Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Louise Chevrier
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de victuailles destinées au pique-nique, Salaberry, qui s’apprêtait à repartir, bousculait tout sur son passage, jetant des regards venimeux aux domestiques qui s’affairaient.
    Il avait fait un voyage éclair à Chambly, accompagnant lui-même sa femme qu’il voulait savoir en sécurité au manoir de Rouville. La situation se détériorait dans les régions du sud-ouest de Montréal qui étaient placées sous sa responsabilité. Les hommes du général Wade Hampton avaient commencé à se masser le long de la frontière et abandonné la route d’Odelltown, c’est-à-dire Lacolle, pour la rivière au Saumon et le lac Saint-François. Il y avait un gué facile à passer, sur la rivière Châteauguay, et il devait préparer la défense.
    â€” Je ne sais pas ce qui a pris à ton frère d’organiser un pique-nique, alors que toutes les troupes se rassembleront bientôt sur la frontière et à Montréal. Comme si la guerre n’existait pas! fulmina Charles, sa colère surtout dirigée vers Ovide.
    Rouville! Il s’était plaint à Vassal de Monviel de la discipline trop dure des Voltigeurs et demandait son transfert dans les milices d’élite. Dire que cette mauviette était son beau-frère! Il se retourna vers sa femme.
    â€” Je réprouve fortement l’idée de ce pique-nique. My God ! Julie, tu es l’épouse du commandant des Voltigeurs et à ce titre, tu dois donner l’exemple.
    â€” Charles, se défendit Julie dans une dernière tentative pour qu’il lui accorde ce plaisir. Se divertir pour oublier la guerre n’est pas interdit. La plupart des officiers de la milice d’élite qui sont actuellement à Chambly n’y voient aucun mal et ils ont accepté l’invitation de mon frère. Pense que la plupart de mes amis y seront.
    Un regard furibond lui répondit.
    Son mari attrapa sa longue cape noire qu’Antoine s’apprêtait à plier soigneusement pour la déposer dans son coffre de voyage et l’envoya au travers de la pièce.
    â€” Je ne suis pas un de tes Voltigeurs à qui tu donnes des ordres, se rebiffa-t-elle. J’irai à ce pique-nique, avec ou sans ta permission.
    Les vagissements du petit Salaberry réclamant à boire mirent fin à la discussion. Julie retira doucement le nourrisson de son berceau pour le présenter à son père, mais Charles avait déjà quitté la pièce sans dire adieu, laissant sa femme au bord des larmes. «Quand reviendra-t-il?» se demanda-t-elle, le cœur gros.

    â€” Ma sœur! s’écria Thérèse de Niverville, excitée comme une puce en lisant le mot qu’on venait de lui remettre. Le capitaine de Rouville enverra une voiture nous chercher. Quelle charmante attention de sa part! fit-elle en oubliant que le personnage avait tenté autrefois de s’en prendre à leur servante.
    Elle en gloussait de plaisir en buvant son chocolat du matin.
    â€” Hum! Hum! toussota Madeleine pour manifester sa désapprobation.
    Elle avait toujours été la plus prudente des deux et jugeait sévèrement l’organisation d’un pique-nique au moment même où la plupart des hommes en âge de porter des armes étaient cantonnés aux frontières pour les protéger de l’ennemi.
    â€” Un pique-nique! Mais à quoi pense-t-il? Avec le blé à quatre piastres le minot, qui peut se targuer de manger du pain aujourd’hui? Les habitants se sont nourris de mauvaises pommes de terre tout le printemps. Et maintenant que la plupart des hommes valides sont mobilisés dans les milices, on se demande qui fera la récolte. Bientôt, nous en serons réduits à mourir de faim.
    â€” Mais le capitaine de Rouville est si débrouillard, répliqua Thérèse qui ne comprenait pas l’indignité de sa sœur. Sans compter que notre cousine Stubinger et son mari le docteur sont également invités.
    â€” Je me demande ce que pense le colonel de Salaberry d’une activité aussi frivole. On m’a dit que monsieur de Rouville n’y sera pas.
    â€” C’est qu’il est très occupé avec les moissons et les vergers qui commencent à donner. Mais madame de Rouville accompagnera sa fille, m’a dit Marie-Desanges.
    â€” Malgré ces quelques réserves, il est évident que

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