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Kommandos de femmes

Kommandos de femmes

Titel: Kommandos de femmes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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mais pas sans m’être fait rendre celles qu’elles avaient rachetées, afin qu’il ne soit pas fait, au block 3, le block des Françaises, un commerce malhonnête avec ces schüssels, comme chez les Russes. J’ai distribué aussi toutes les gamelles qui me restaient aux petites Françaises qui n’avaient que des boîtes à conserve rouillées. Par la suite, j’ai toujours été suppliée par des femmes du block qui se faisaient voler leur schüssel, afin que je leur en procure, mais je ne pouvais pas renouveler une autre fois ce geste. Si les Russes s’étaient doutées que c’était moi, elles m’auraient fait passer le goût du pain. La pauvre Léone aurait été kapout…
    Un jour la M… m’a barboté ma couverture, en plein hiver. J’ai dormi toute une nuit sans couverture. Une petite Française qui était de nuit comme elle, avait vu la M… me la voler et m’a dit :
    — J’ai vu la Pie vous voler votre couverture Léone, elle en a au moins quatre ou cinq dans son lit.
    J’avais fait une marque à ma couverture avec de la peinture, je l’ai reconnue et reprise. J’ai aussi pensé qu’elle avait trop encore avec les quatre qui lui restaient. J’ai donc repris ma couverture et deux autres. L’une était justement celle de Ginette, la sœur de Sissy, qui dormait avec elle car elle n’avait plus de couverture dans son lit. L’autre, était à notre camarade Marie Dupuy. J’ai remis les couvertures dans chacun des lits et je n’ai rien dit à personne pour éviter un scandale chez les Françaises. Mais la M…, qui en tient une bonne couche, m’a dit quand elle s’est aperçue qu’il ne lui restait que sa couverture :
    — Tiens, madame Bodin, vous avez donc retrouvé votre couverture ? Où était-elle ?
    Je lui ai répondu :
    — Oui ma chère, je l’ai retrouvée et reprise.
    — Ah ! où était-elle, me dit-elle (la chipie) ?
    — Mais madame M…, lui ai-je dit, vous ne le savez pas mieux que moi, mais tout aussi bien.
    Elle s’est tue et elle a bien fait, car je sentais la colère me monter. Par exemple, elle s’est vengée le lendemain en lançant tous ses poux vivants sur mon lit. Cela m’était bien égal, ils ne restaient pas sur moi. Mes camarades n’ont jamais su comment leur couverture était revenue dans leur lit.
    *
    * *
    Sirène xxviii , alerte. « Alarm ». Vrombissements d’avions, nous y sommes habituées, mais cette attaque paraît particulièrement puissante. Les bombes sifflent et tombent en faisant un vacarme épouvantable, nous sommes à huit kilomètres du champ d’aviation allemand. Dans le camp, on crie des ordres. Défense de sortir des blocks, les femmes pleurent, hurlent, la peur de périr carbonisées dans les baraquements affole les prisonnières enfermées. Évelyne se serre contre moi, nous ne faisons qu’une, je perçois un murmure qui monte, s’amplifie. C’est une prière récitée par les Slaves dont les accents se perçoivent dans les silences entre chaque chute de bombes ou de rafales de D.C.A. et j’entends tout à coup une voix gémissante : « Dis, madame Sacha Guitry, tu dois savoir toi, fais la prière pour les Françaises. » C’est la grosse Margot, tremblante de peur, qui m’implore…
    Je n’avais pas besoin de la requête de cette femme pour prier, mais à présent je prie à haute voix. Après le Pater, je cherche dans ma mémoire les paroles des actes de foi, de contrition et, au Credo, des femmes répètent mes paroles : « Je crois en Dieu tout-puissant, je crois en Dieu, le Père tout-puissant. » Le camp est épargné.
    Le lendemain, les femmes travaillant dans les bureaux nous disent que le champ d’aviation a été touché. Quant à la grosse Margot, elle vient vers moi, toute douce et me glisse à l’oreille : « Si tu as besoin… je me bagarrerai pour toi, quand tu voudras…»
    Ce bombardement qui m’a rapporté le soutien de la « terreur » a mis hors de service le champ d’aviation, ce dont nous pouvons nous rendre compte nous-mêmes ; en effet, toutes les colonnes de terrassement abandonnent leur travail et se retrouvent sur le terrain défoncé pour le remettre en état. Il faut soulever d’énormes madriers, des blocs de pierre pour les rejeter au-dehors. Il faut déblayer et niveler. On travaille sans cesse, on mange la soupe sur place ; comme tout ne va pas assez vite au gré des Aufseherinnen, elles nous giflent. Le soir je ne peux plus me traîner sur la longue route que

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