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Kommandos de femmes

Kommandos de femmes

Titel: Kommandos de femmes Kostenlos Bücher Online Lesen
Autoren: Christian Bernadac
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qu’appelé pour un accouchement difficile et épouvanté de l’état sanitaire du camp, il avait proposé de faire chaque semaine une consultation gratuite. Le commandant lui avait répondu : les S.S. se soignent tout seuls. Le soir, après le travail, les appels étaient interminables : les Gitanes constituaient une faune mobile et fantasque, et notre commandant, jeune « Untersturmführer », fort satisfait de sa personne, ne possédait pour exécuter ses ordres confus qu’une demi-douzaine de souris et cinquante vétérans à moustaches blanches. Cet état-major d’opérette était totalement débordé par les mille diablesses dont certaines, pour comble, étaient fort séduisantes. On n’en finissait pas de les compter, de battre les buissons à la recherche des évadées. Les Françaises, pendant ce temps, faisaient le piquet ; lorsqu’enfin l’on tombait sur sa paillasse terrassée par le sommeil, les Gitanes, souples comme des chats, entraient par les fenêtres et volaient jusque sous notre tête les derniers débris de nos richesses.
    Le camp de Schlieben eut bientôt, lui aussi, son affaire policière.
    — J’avais cviii passé la journée à charger les lourdes caisses de « Panzerfaust » sur des wagons. Il pleuvait. J’étais trempée jusqu’aux os. À l’arrivée au camp (deux kilomètres de marche), je quitte robe et chemise afin que ma chemise soit au moins sèche pour le lendemain. J’avise avec une camarade un tas de couvertures qui n’étaient pas en très bon état, mais elles étaient sèches ; nous en prenons une et la partageons. Ainsi nous avons pu dormir au sec.
    — Le lendemain matin j’ai eu le tort de glisser ce morceau de couverture sous ma paillasse afin de le retrouver le soir car la journée s’annonçait « pluvieuse ». Hélas ! il fut découvert. Le lendemain matin donc, à cinq heures, deux tziganes polonaises qui remplissaient les fonctions de stubowas, pénètrent dans le block, me font lever… et en route pour la place du camp où un bureau était installé avec des officiers et une vingtaine de soldats en armes. C’était le jugement. On m’interroge. Une interprète traduit demandes et réponses. Je suis condamnée pour sabotage.
    — Une gardienne polonaise vient me prendre et m’entraîne dans une cave avec une prisonnière tchèque. Là, la gardienne commence à nous attacher les bras derrière le dos et ensuite nos deux corps dos à dos. À grands coups de pieds, elle nous fait rouler sur un tas de charbon. Un moment après, cinq officiers arrivent et nous font lever, toujours à coups de bottes (se lever n’est guère facile pour deux personnes attachées dos à dos et encore moins marcher, surtout que la Tchèque était plus petite que moi). On nous conduit devant un cercueil. Je n’ai pas su pourquoi, car je ne comprenais pas l’alleman. Nous sommes restées là, debout, quelques heures. Ensuite, toutes les heures environ, nous avions la visite de deux déportées tziganes munies d’une schlague. Ces séances de coups furent terribles. Dans la soirée, ma compagne réussit, à force de remuer les bras, à desserrer un peu les cordes. Je ne pouvais rien lui dire puisque nous ne parlions pas la même langue et ce qui devait arriver arriva ; une de nos tortionnaires s’aperçut du desserrement des liens. Elles s’acharnèrent sur nous : coups bien sûr mais aussi cheveux arrachés par poignée, prothèse dentaire cassée ; les cordes replacées pénétraient dans les chairs. La peur sans doute me provoqua une crise de dysenterie. La nuit fut hallucinante. À l’aube, nouvelle visite des geôlières accompagnées des S.S. venus assister au spectacle. On nous détacha. J’ai cru tomber évanouie lorsque le sang a pu gicler des plaies ouvertes par les cordes. Mes mains étaient noires. J’avais envie de pleurer mais je me suis contenue ne voulant pas verser de larmes devant les Allemands.
    — On nous poussa ensuite sur la route de la forêt, sans boire, sans manger, sans se laver. Là, ce qui m’attendait était pénible : jointe à des Tziganes dont les jambes étaient couvertes de plaies d’avitaminose, il a fallu décharger un wagon de briques, ensuite un autre de sacs de cinquante kilos de ciment. À onze heures, l’Aufseherin a vu que je n’en pouvais plus (c’était une Alsacienne). Elle me fait asseoir sur un arbre coupé en me disant : « Bientôt manger. » Les dernières forces m’ont abandonnée et j’ai

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